Le Temps de l'Univers - Tome 1 : Les Maîtres des Origines (en réécriture)

Prologue (réécrit)

L'escalier en colimaçon s'enfonçait sous terre, suivant à l'infini la courbe paresseuse des murs du puits profond de plusieurs kilomètres. Sa monotonie n'était rompue que par des paliers faisant le tour de la structure, desservant de hautes arches espacées régulièrement. Perché tout en haut des marches, Sundag regardait la distance interminable qu'il devait parcourir, tapotant le sol des griffes de ses pattes avant. Sa silhouette chevaline se dessinait sur les murs blancs, découpée par la forte lumière électrique qui inondait l'endroit. Lui qui pouvait voler pendant des heures aux plus hautes altitudes, il était pris d'un vertige inextinguible devant ce vide lumineux dont il semblait ne pouvoir s'échapper. Mais il fallait descendre. Le problème était que la voie réservée aux créatures de taille moyenne se trouvait au bord du précipice. Les bipèdes utilisaient la voie longeant le mur, et celle du milieu était réservée aux Grandes Kréatures, des quadrupèdes ailés à l'aspect draconique atteignant une vingtaine de mètres de haut, pour lesquels une chute serait trop dangereuse. Il grogna avec agacement, balançant sa queue. Les tréfonds de la Tour de l'Air, où se trouvaient les laboratoires scientifiques, avaient le don de le perturber depuis son arrivée il y avait une cinquantaine d'années.

Soupirant de nervosité, il déploya ses ailes pour améliorer son équilibre, et s'engagea dans l'escalier. Dans son for intérieur, il s'encourageait : une griffe, un sabot, ce n'est pas si compliqué. Soudain une vibration sourde empli l'endroit, et l'escalier se mit en rotation. Le scientifique abandonna définitivement l'idée de bouger, et décida de se concentrer sur la confrontation à venir. Qui allait s'avérer plutôt difficile, sa supérieure ayant encore une fois décider de flirter avec les limites de l'éthique. Normalement il n'y avait aucun problème à remettre des scientifiques dans le droit chemin, mais Laïkda était une Grande Kréature, et pas n'importe laquelle. L'une des plus vieille et plus puissante, et elle était connue pour être la plus grande scientifique de l'histoire de la République Galactique. Hautaine, elle prenait comme acquis une totale liberté d'action et ignorait tout ce qu'on pouvait lui dire. Une légère sonnerie le tira de ses pensées et de sa concentration, et il faillit rater les dernières marches. Il imprima une torsion à son corps élancé et parcourut quelques pas aléatoires avant de réussir à se retrouver exactement en face de l'arche qui l'intéressait. Il souffla de satisfaction, levant une mèche de sa crinière de devant ses yeux, et s'enfonça dans le couloir de roche sombre qu'il connaissait par cœur. Entendant du bruit au bout, il prit la parole, éveillant de vieux échos :

« Laïkda ? C'est moi. Tu es disponible ?

- Je le sais bien que c'est toi Sundag, ricana son invisible interlocutrice, sa voix résonnant sur les murs. Si tu es venu pour parler du Jugement ce n'est pas la peine, trancha-t-elle. »

Le scientifique inspira profondément dans un vain espoir de se détendre, avant de reprendre la discussion avec agacement :

« Tu exagères ! Il agita ses grandes ailes de plumes avec agacement : tes précédentes recherches ont déjà soulevé suffisamment d'oppositions pour que tu ne puisses pas te permettre de cacher ce que tu comptes faire. Et allume la lumière bon sang. »

Ses écailles argentées reflétant la lueur de sa crinière et de ses plumes bleu électrique lui permettaient de voir devant lui, mais il ne pouvait bien distinguer la silhouette de Laïkda dans l'obscurité du laboratoire, visible uniquement par les striures bleues de son cuir noir et ses yeux jaune brillant. Elle gronda avec mépris et la pièce s'illumina.

« C'est mieux, ricana Sundag. Tu te cachais de quoi ? »

La Grande Kréature grogna et se tourna vers lui, les pointes grises et oranges de sa crête dorsale raclant le plafond. Elle déploya ses ailes d'un air menaçant, découvrant ses dents blanches acérées, sa collerette d'épines dressée sur sa nuque.