Chapitre 26 - Lyam Lacombe

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Trois mois plus tard...

Malone

Me voilà de retour à Mons.

Quand Marly est partie, je n'ai pas supporté de rester dans mon studio, là où il y avait encore son parfum qui embaumait l'air comme stigmate de sa présence passée. C'était trop difficile. J'étais perdu, angoissé, à la dérive. J'ai rempli un sac avec quelques fringues et j'ai pris un train pour la France. Je me suis retrouvé quelques heures plus tard à Paris et j'ai décidé d'y louer un Airbnb. C'était temporaire, le temps que je réfléchisse à ce que je venais de faire, que je fasse un peu le point. Au final, je n'ai pas pu trouver d'autre explication sur le fait que j'avais foutu ma vie en l'air et écarté la seule personne qui avait été capable de m'aimer tel que j'étais. J'en revenais toujours au même point : je suis mauvais pour elle.

Les jours sont alors passés puis les semaines et enfin les mois. Je me suis dégoté un job dans un atelier de réparations de voitures. C'est comme ça que j'ai réussi à survivre. J'envoyais de temps à autre des nouvelles à ma famille afin de signaler que j'étais toujours bien vivant, mais ça se limitait à de simples messages. J'avais retiré une bonne somme en liquide avant de partir et je demandais à toucher mon salaire en cash, ma mère ne pouvait pas me retrouver facilement. À vrai dire, elle ne m'a demandé qu'une ou deux fois où je me trouvais, je doute qu'elle s'en souciait tant que ça finalement. Le mal était fait. Je n'étais pas allé travailler avec mon père comme c'était prévu et j'avais abandonné la natation alors que la compétition finale approchait.

J'étais devenu le cauchemar de mes parents : un raté entretenu par ses vieux, incapable de saisir des opportunités.

C'est il y a deux jours que j'ai réalisé qu'il fallait que je me bouge. J'étais avec une femme, c'était la deuxième avec qui je tentais d'avoir une relation sexuelle depuis Marly. Je n'avais pas cherché à les rencontrer, ces filles étaient tout simplement venues à moi. Et, comme avec la première, je n'arrivais pas à me mettre dans l'ambiance, toutes mes pensées convergeaient systématiquement vers la même personne : Marlène Favre. C'est alors que j'ai compris quelque chose : ça ne pouvait pas fonctionner avec elle parce que j'étais toxique, mais je pouvais devenir quelqu'un d'autre, un homme qu'une fille aussi géniale qu'elle pourrait aimer sans qu'il ne lui détruise l'existence. J'ai donc décidé de rentrer chez moi et d'expliquer clairement à mes parents que je refusais le poste de direction.

Je franchis la porte à double battant au bois ancien restauré de la demeure familiale. À cette heure-ci, je sais que mes parents sont rentrés tous les deux et doivent même certainement être en train de diner. Je me réjouis déjà à l'idée de revoir Lyam, ces quatre mois sans lui étaient beaucoup trop longs.

Quand je pénètre dans la salle à manger, je me fais accueillir par un silence de mort. Les trois paires d'yeux convergent vers moi, mais mon frère abaisse les siens tout aussi tôt. Un profond malaise m'envahit soudain face à son expression. On dirait qu'il a honte, mais de quoi ? De moi ?

-       Ce n'est pas vraiment le moment, Malone, annonce assez sèchement mon père.

J'en reste un instant bouche bée. J'ai disparu pendant quatre mois et je ne suis pas le centre de leurs préoccupations. Ça ne me dérange pas, au contraire, ça m'intrigue tout simplement.

-       Il se passe quelque chose ? tenté-je, très mal à l'aise.

Maman affiche un air de dégout, mais en entendant ses paroles, j'apprends qu'il ne m'est pas destiné.

-       Ton frère est pédé, crache-t-elle presque.

Je hausse les sourcils, stupéfaits d'entendre ce terme sortir de sa bouche. Je sais que mes parents ont des défauts, mais je les avais toujours pensé assez ouverts d'esprit à ce niveau. Et puis je réalise. Bien sûr qu'ils n'ont rien contre les homosexuels, dans l'absolu. Mais les autres personnes ? Leurs clients ? Que diront-ils ?

Cœur solitaire ('Je veux tes yeux')Où les histoires vivent. Découvrez maintenant