Chapitre 12

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C'est à son tour de jouer cartes sur table, je vois bien que me raconter une partie de sa vie ne va pas être un jeu d'enfant, il a ce regard expressif qui montre chacune de ses émotions : lorsqu'il est joyeux, son regard pétille ; à contrario quand il est énervé, ses sourcils froncés montrent qu'il ne faut absolument pas venir lui chercher des noises. Quand il est gêné ou bien mal à l'aise, il fait cette petite moue trop mignonne et surtout, il se frotte la nuque... Pourtant Zac reste un mystère, même s'il y a énormément de signes qui permettent de savoir ce qu'il pense ou dans quel état d'esprit il se trouve.

— Tout d'abord, tu dois savoir que je suis atteint de trouble bipolaire depuis que je suis très jeune, j'ai été diagnostiqué à huit ans, pour le plus grand malheur de mes parents.

Je l'avais deviné en quelque sorte Zac...

— J'ai été l'enfant attendu pendant neuf mois. Mais j'ai vite compris que je ne serais pas comme eux, pas comme ma famille et mon entourage. Vers l'âge de six ans, j'ai grossi, énormément, j'étais gras, je le savais puisque mes camarades d'école me le faisaient remarquer et après, ce sont mes parents et leurs amis qui m'ont fait comprendre que je n'étais pas comme tout le monde : j'étais gros. Mes parents avaient honte de moi !

— Mon Dieu, mais ce n'est pas possible, peu importe l'apparence de son enfant, c'est toujours son enfant...

— Oui, c'est ce que je me disais aussi, et puis est venu le jour où on m'a demandé de rester enfermé dans ma chambre lors d'une garden-party, parce que je ne devais pas faire honte à mes parents, je ne devais pas être en maillot de bain devant tout le monde.

J'essuie rapidement une larme qui coule sur ma joue, je lui ai demandé de ne pas avoir de pitié pour moi et je suis clairement en train de pleurer devant lui, je suis tellement touchée, attristée par ce qu'il me raconte. Comment un enfant peut vivre ce genre de choses ? Les parents devraient être une source de réconfort, de fierté. Je comprends mieux pourquoi il disait lire en moi, ses parents sont des pourris, comme ceux qui m'ont adopté.

— J'ai alors commencé à manger des quantités astronomiques de nourriture de peur d'être plus souvent enfermé dans ma chambre et de manquer de nourriture, j'ingurgitais le double ou voir le triple de portions pour un enfant de mon âge et à toute heure. Pendant un an, j'ai explosé la courbe de poids, j'avais huit ans quand ma mère en a eu marre de voir son enfant grossir, devenir laid et lui faire honte, elle m'a emmené consulter un spécialiste. Quand elle lui a raconté que je mangeais comme un boulimique, le médecin m'a posé énormément de questions, il a essayé de comprendre.

— Tu as donc eu une batterie d'examens...

Il acquiesce de la tête, c'est la suite logique aux troubles alimentaires mais a huit ans, c'est inimaginable ! Et par la faute de ses parents qui plus est.

— On m'a mis dans un hôpital pour enfants, d'une part, pour que je maigrisse et ensuite, pour savoir ce qu'il se passait à l'intérieur de ma tête. Mais j'ai ressenti tellement de haine contre mes parents, j'avais une impression d'abandon, ils partaient en me laissant. Alors toute la haine, la rancœur que j'avais en moi ont refait surface. J'étais devenu incontrôlable, j'ai associé l'hôpital à l'enfer.

— Et les médecins ont compris ? demandé-je.

— Ça a été un peu long, ils avaient saisi dès le début que j'étais ce qu'on appelle atteint d'hyperphagie boulimique, plus tard le diagnostic est tombé, j'étais bipolaire, déclare-t-il.

— Tes parents sont venus te chercher une fois qu'ils ont su ?

— Non, je suis resté jusqu'à l'âge de onze ans dans le centre, ils me disaient que c'était mieux pour moi, et je les croyais. Mais avec le temps j'ai compris que c'était mieux pour eux surtout.

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