Chapitre 20

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Une boule grossit dans mon ventre au fur et à mesure que je m'approche de l'endroit du rendez-vous. Tout se bouscule dans ma tête, je me pose des centaines de questions, car le trajet me paraît durer une éternité. Je ne sais pas comment va se dérouler le plan, encore moins si Newton m'attendra bien sagement à l'accueil de l'hôtel. Toutes ces questions m'angoissent et me font réfléchir à l'utilité de cette rencontre. La seule et unique chose que j'espère, c'est qu'à l'issue de ces retrouvailles, si nous pouvons les nommer ainsi, je ne sois plus sous son emprise.

Me voilà garée sur le parking de l'hôtel. Je ne vois pas la voiture de Zac, je pense qu'il a pris de la distance pour ne pas arriver en même temps que moi. Si mon corbeau est l'allié de Newton, il sait que je fréquente Zac. Comme prévu, je récupère mon téléphone dans mon sac pour me mettre en relation avec Zac. Le ventre totalement noué, je n'ai pas le courage de lui dire quoi que ce soit lorsqu'il répond. Je verrouille mon téléphone, afin que l'écran ne soit pas allumé et le glisse dans la poche de ma veste.

Inspire, expire. Je répète ce schéma plusieurs fois, le temps de faire redescendre ma pression artérielle et de me mettre en condition. Je suis une femme très organisée, je refuse de passer une journée sans qu'elle ne soit planifiée au préalable et cette soirée promet des imprévus... Je ne suis pas sûre que les plans élaborés par Zac fonctionnent. L'inconnu m'effraie, je suis capable à tout moment de faire une crise de panique et de faire échouer notre stratégie. Lorsque je suis angoissée je deviens en plus de paniquer maladroite au possible. Tout me paraît insensé, ma vie elle-même me paraît insensée. Quoi qu'il en soit, c'est l'heure pour moi d'affronter celui qui aurait dû me donner tout l'amour du monde, remplacer un père que je n'ai pas pu avoir. L'heure de peut-être faire tomber l'homme de loi, le mari infidèle et violent. J'ai une pensée pour Shirley, sa femme, qui sera certainement aussi soulagée que moi d'être éloignée de cet homme qui n'en est pas un. Soulagée de voir son bourreau être puni. Je reste persuadée que depuis le jour où j'ai pris cet avion, il s'est remis à passer sa haine sur elle, la haine qu'il avait envers moi, celle qu'il avait envers elle, sa vie a dû être un enfer. Je n'ai peut-être pas de cœur, mais à choisir, je préférais que ce soit elle plutôt que moi. Un mauvais karma, si elle avait empêché son mari de me faire toutes ces choses, si seulement elle avait parlé à quelqu'un de ce qu'il lui faisait avant de s'attaquer à moi, elle comme moi, nous n'en serions pas là aujourd'hui.

Inspire, expire. Roselia, c'est le moment, si tu ne sors pas de cette voiture maintenant, tu ne le feras jamais. Ne réfléchis plus, vas-y. Quelquefois, je me demande si ma conscience n'est pas suicidaire, mais c'est elle qui me pousse à faire des choses aussi folles, c'est sûrement elle aussi qui me tuera un jour également. Une jambe après l'autre je sors enfin de la Jeep, mes pieds se mettent en action tout seuls, un pas devant l'autre, je ne suis plus maîtresse de mes mouvements. Mon corps m'emmène tout seul jusqu'à l'entrée de l'hôtel, les portes coulissantes s'ouvrent, je le repère immédiatement.

Assis dans le hall d'entrée, habillé d'un smoking, comme si c'était le rendez-vous de sa vie. Un verre de whisky à la main, ses cheveux grisonnant toujours bien coiffés en arrière, des dents droites, impeccablement blanches, il a ce sourire insupportable sur les lèvres surplombées d'une moustache grisonnante, comme sa chevelure. Il a l'air d'un homme d'affaires, un homme riche et sans le moindre problème. Le sosie parfait de Victor Newman*. Je me souviens un instant du peu de fois où j'avais le droit de passer du temps dans le salon. Shirley regardait la série télévisée « les feux de l'amour » et me répétait sans cesse à quel point la ressemblance était frappante entre son mari et le personnage de cette série. Seulement la ressemblance alors ! Si le personnage du feuilleton paraît est un homme tout à fait respectable, Newton lui ressemble au diable en personne, il a un visage sournois, un regard rempli de haine, un sourire qui en dit long sur ses intentions. Je le déteste, son visage me donne envie de vomir, dès lors ou je croise son regard, des flash-back me reviennent. Je ravale la boule dans ma gorge. Je dois être forte, pour ma fille. Maintenant que j'ai goûté à la liberté, je ne peux le laisser reprendre le dessus sur moi.

Give Your Heart A BreakOù les histoires vivent. Découvrez maintenant