Il était 23 h 30 lorsque la voiture de Harley se gara dans l'allée. Ce fut Daren qui lui ouvrit la porte. Une expression de gravité voilait son petit visage. Dès qu'il vit son amie, il se jeta dans ses bras et s'accrocha à elle comme à une bouée.
- Je suis là, mon grand, je suis là. Ne t'inquiète pas.
Ils s'étreignirent longuement, puis ils entrèrent dans la maison en prenant le soin de verrouiller la porte d'entrée. Harley conduisit Daren jusque dans sa chambre, le borda, le rassura et attendit qu'il s'endorme avant de se diriger vers la chambre de Tatiana. Lorsqu'elle y entra, elle croisa le regard de cette dernière. Elle se tenait devant elle, immobile, silencieuse. Au bout de quelques instants, la danoise parcourut la petite distance qui les séparait et, glissant un bras sur les épaules de son amie, l'entraîna jusqu'à la cuisine. Celle-ci ne prononça pas un mot de tout le trajet. Harley lui prépara une tisane.
- Merci, dit Tatiana en acceptant la tasse qu'elle lui tendait. Je m'en veux tellement. Ces dernières heures étaient affreuses pour Daren. C'était comme si Lexa était morte de nouveau.
- Pourquoi ? A cause de la célébration de thanksgivings ? risqua Harley.
Tatiana secoua la tête. Elle ne savait pas par où commencer, bien qu'elle ait très envie maintenant de tout lui raconter. Elle se dirigea alors vers le bureau de Lexa, revint avec le carnet et le lui tendit. Harley hésita. Était-ce vraiment ce qu'elle voulait ? Elle lut la réponse dans son regard et prit le petit cahier. Tatiana se rassit à côté d'elle et enfouit son visage déjà inondé par les larmes, dans ses mains, tandis que la danoise lisait.
Quand elle eut terminé, elle leva les yeux. Leurs regards se rencontrèrent. Un chagrin inexprimable noyait celui de Tatiana. Harley savait à présent pourquoi. Sans un mot, elle se pencha vers elle et prit sa main dans la sienne. Elles restèrent un long moment ainsi, sans parler. Quelle terrible découverte ç'avait dû être !
Harley fut la première à briser le silence...
- Je suis sûre que tu as été une bonne compagne. Tu es aussi une très bonne mère. Et... en ce qui concerne ton physique, il est juste parfait. Juste parfait.
- Je n'ai jamais voulu regarder la vérité en face du vivant de Lexa... Je crois que je vivais dans le déni. Aveugle et stupide à ma manière, en fait...
- Tu l'aimais. C'est une réaction louable. Et comme elle l'a si bien écrit, à un moment de sa vie, elle t'a aussi aimé.
C'était ça qui lui faisait de la peine. Le carnet lui avait ôté sa seule illusion : l'amour que Lexa était censée lui porter malgré les secousses qu'elles avaient rencontrées. L'amour que Lexa continuait de lui porter même en étant dans la tombe. Quelle horrible farce !
- Tu devrais essayer d'oublier tout ça, lui conseilla-t-elle. Tu te fais du mal inutilement. Lexa est morte. Tu devrais passer à autre chose... Tu devrais penser à toi maintenant.
- Même morte, elle a quand même réussi à me briser...
- Que vas-tu dire à Daren ?
- Rien. C'est entre Lexa et moi. Je vais couper les ponts avec Liz et lorsqu'il le remarquera, j'inventerai quelque chose pour justifier cela. Ou, je lui dirai simplement que je le lui raconterai quand il sera plus grand.
- C'est mieux ainsi.
Harley serrait toujours sa main dans la sienne, mourant d'envie de la prendre dans ses bras. Dans son état, son amie n'aurait peut-être pas apprécié ce geste. Elle paraissait si fragile, si vulnérable...
- Je suis désolée Harley, je ne voulais vraiment pas t'inquiéter avec cette histoire.
- Ce n'est rien. Tu n'imagines pas à quel point Daren et toi, comptez pour moi.
Elle aussi avait prit conscience de ses sentiments pour Tatiana. Elle ne pensait pas que cette dernière prendrait une telle place dans sa vie. Toutefois, elle en était heureuse.
- Je sais qu'il fait un tout petit froid dehors à cette heure mais, ça te dirait qu'on aille sur la terrasse, Tat ?
Celle-ci acquiesça.
Après avoir enfilé leurs vestes, elles sortirent. Les yeux rivés vers le ciel, Harley l'enlaça par la taille et la serra doucement contre elle. Tatiana appuya la tête contre son épaule, tandis que le vent leur fouettait le visage.- Je ne sais pas comment te remercier, Harley. Tu es une personne exceptionnelle et adorable.
Elle faisait preuve de tant d'amour à son égard.
- Et toi, tu es une femme merveilleuse...
Elles se firent alors face, le regard de l'une, ancré à celui de l'autre.
- Tu mérites bien qu'on prenne soin de toi. Et Daren aussi.
Ils faisaient partie de sa famille désormais et elle de la leur.
- Je suis heureuse lorsque je suis avec toi, Harley.
- C'est juste parce que le bonheur est un choix.
- Alors c'est que mon choix s'est porté sur toi.
Sans la quitter des yeux, la danoise inclina légèrement la tête et effleura ses lèvres d'un baiser. Aucune femme n'était parvenue à toucher autant Tatiana depuis la disparition de Lexa. Alors, elles étaient là toutes les deux ; l'une, fragile et l'autre, prudente, comme deux adolescentes. Elles fermèrent les yeux, savourant ces instants de tendresse. Et lorsque Harley s'écarta, elles se contemplèrent en silence. Avec une douceur infinie, elle l'enlaça et la serra dans ses bras.
Tatiana soupira d'aise. Elle avait un tel besoin d'amour, de réconfort et de stabilité. Et, il n'y avait qu'auprès de Harley qu'elle éprouvait ce sentiment de sérénité qui lui manquait tant, ces temps-ci.
- Tat, mes sentiments pour toi ont évolué au fil des mois, sans même que j'en prenne conscience. J'avais peur de t'effrayer et de te perdre en t'ouvrant mon cœur. Tu as tant souffert...
- Toi aussi, chuchota-t'elle en caressant tendrement sa joue. Et tu continues de souffrir avec cette maladie qui ne cesse de te ronger. Mais tu sais quoi ? Tu n'es plus seule à présent. On va affronter ça toutes les deux, ensemble. Ah ! Dans toute cette histoire, c'est Daren qui va être content, termina-t-elle, un sourire espiègle aux lèvres.
Harley sourit à son tour.
- Je l'aime énormément aussi, tu sais. Il est comme mon fils !
- Et lui aussi est complètement dingue de toi, dit Tatiana, les yeux brillants de joie.
La danoise l'embrassa de nouveau.
- Bonne fête de Thanksgivings, ma chérie, murmura-t-elle contre ses lèvres.
Pendant ce temps, assis dans une voiture et muni de jumelles, quelqu'un les épiait.
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Ancrée à ton port
RomansaAutrefois, j'ai été brisée. Mais aujourd'hui, je reprends goût à la vie. Je pense à elle, tel un refuge. Elle avec ses balafres et moi, avec mes cicatrices; l'héritage de ces personnes qui nous ont un jour aimés. Nos victoires et nos défaites conv...