Seriner

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Yang Jungwon.

Il ne comprenait pas. Il essayait du mieux qu'il pouvait, mais il trouvait cette situation incompréhensible. Pourquoi ? Il voulait juste connaître la réponse. Pourquoi continuait-elle de l'aimer, de persister pour rester à ses côtés. Il ne lui apportait rien, mis à part de la douleur. Malgré toutes les choses horribles qu'il a pu lui dire, elle le pardonnait sans compter.

- Jungwon, ne pars pas !

Il s'arrêta en soufflant, le regard ennuyé. Cette fille restait un vrai mystère pour lui, alors qu'ils se connaissent depuis petits. Même après tant de déclarations, sa réponse restait la même.

- Pourquoi t'obstines-tu à me suivre, à m'aimer ? Je te l'ai déjà dit plus de mille fois : je ne t'aime pas. Comprends-le et tu vivras mieux.

Il eut d'abord une pointe de regret. Il aurait pu trouver une autre façon de lui dire ceci. Mais sa réponse lui fait oublier toute trace de sympathie, tout comme les autres fois précédentes.

- Parce que je t'aime. Je t'abandonnerai pas. Tu es tout ce qu'il me reste.

- Et comment comptes-tu m'avoir ? En m'harcelant chaque jour ? Depuis gosses, tu n'as jamais réussi à me faire tomber amoureux. Crois-moi que c'est peine perdue.

Il reprit sa marche, d'un pas rapide. On aurait dit qu'il était furieux. Mais en réalité, il l'enviait. Il la jalousait même. Il l'admirait avant tout. Elle était capable d'aimer, de ressentir des émotions, et les dire, même après ce qu'elle a pu subir. Lui, n'était qu'un corps sans âme, rempli de vide. Ce même vide qui se comblait étrangement lorsqu'il posait les yeux sur elle. Cette fille arrivait à lui donner des sentiments : la haine, la jalousie. Elle avait réussi là où il avait échoué. C'est alors que sans surprise, sa main se fit attraper par la sienne.

- Je t'en supplie Jungwon, marche moins vite..

Elle peina à reprendre sa respiration, le cœur battant à vive allure. Le garçon commençait à s'impatienter. Si elle continuait à rester auprès de lui, il craignait qu'elle réussisse à faire naître en lui un autre sentiment. Il était effrayé de ce qu'il pouvait ressentir. Il avait peur de l'aimer. Alors pour se protéger, il la repoussait, encore et encore. Pourtant, la haine se mélangeait à la douleur lorsque son sourire disparaissait. Ce même sourire comblant ce vide.

- Je ne sais même plus quoi te dire mis à part que je ne t'aime pas. Si je t'avouais ce que je pensais vraiment de toi, m'aimeras-tu toujours autant ?

Elle eut une mine d'incompréhension face à ses dires. Elle se demandait tout de même ce qu'il pensait d'elle. Seulement, elle voulait continuer de l'aimer. Prendrait-elle le risque de l'écouter ? Elle n'eut pas le temps d'y réfléchir, qu'il lui cracha ces mots à la figure.

- Tu n'es qu'une fille insignifiante qui n'arrête pas de me coller depuis gamin. J'aurai dû te laisser crever au lieu de te sauver. T'es chiante.

Une simple phrase réussit à causer ce qu'il redoutait le plus. Une simple phrase réussit à le blesser, en voyant le regard vide de la personne se tenant face à lui. Elle lâcha lentement la main du garçon pour qui elle éprouvait une gratitude sans fin. Celui qui l'avait sauvée, celui dont elle était éperdument amoureuse. Aucune larme était venue déferler sur ses joues. Elle souriait juste, alors que ses yeux reflétaient maintenant une peine infinie.

- Attends, je...

- Je suis tellement désolée. Désolée de gâcher ta vie, alors que tu as sauvé la mienne. Tu aurais dû me laisser sauter. Au moins, je ne t'aurai pas aimé. Excuse-moi de t'aimer tant.

Il n'aurait jamais cru que ses sentiments dépendraient autant de son sourire. Il pouvait à la fois l'agacer, mais le blesser. Imaginer ne serait-ce qu'une seule seconde qu'elle ne portait plus son amour pour lui, était inconcevable. En la sauvant, il allait rencontrer divers sentiments. Aujourd'hui était venu le regret.

- Mon amour pour toi n'est pas la seule raison pour laquelle je persiste. Je veux t'aider à connaître le bonheur, puisque je suis heureuse grâce à toi. Qu'importe si le seul que tu me portes est haineux, je continuerai de t'aimer et j'en suis désolée. Tu t'en rendras compte, qu'on ne contrôle pas ses sentiments.

Il était tout bonnement subjugué. Il ne la méritait pas, et le savait depuis si longtemps. Elle méritait le monde, elle méritait l'amour. Avec lui, elle ne pourra jamais être épanouie.

- Tu m'agaces tellement. Crie moi dessus, hurle à quel point je t'ai blessée ! Reproche-moi de n'être qu'un égoïste, quelqu'un qui ne ressent rien pour les autres. Affirme haut et fort que tu m'en veux ! Dis-moi encore que tu m'aimes...

À peine eut-il le temps de finir sa dernière phrase, qu'elle rétorqua de suite. Elle ne pouvait le laisser dire de telles choses sur sa propre personne.

- Tu n'es ni un égoïste ni quelqu'un qui ne ressent rien. Tu es humain, Jungwon. Si tu ne ressentais rien, tu m'aurais laissée me jeter de ce pont. Mais tu es venu, m'as tirée de la rambarde, et m'as dit des mots que je n'aurais jamais cru entendre. Que j'attendais désespérément qu'on me les dise. Toutes ces fois où tu me repoussais montrent que tu ne m'aimais pas, certes. Mais au moins j'ai réussi à te faire connaître un sentiment.

Elle avait fini sa réplique sur une voix nouée, les yeux gonflés. Elle lui disait chaque jour ces trois petits mots. Il avait d'abord douté de sa sincérité, mais il s'avérait qu'elle avait réussi à lui prouver son authenticité.

- Je vais te faire connaître un tout dernier sentiment : le soulagement. Tu n'auras plus à me supporter. J'ai été une charge trop lourde pour toi. Je t'aime, Jungwon.

Ses larmes tombaient bel et bien. Ce fut la première fois qu'il la vit pleurer, qu'il en était attristé. Elle se retourna pour de bon, prête à partir. Ce chagrin qui habitait le jeune homme, lui fait enfin réaliser, après tant d'années, qu'il avait déjà connu ce sentiment qu'il redoutait. Elle lui avait fait connaître l'amour, sans qu'aucun d'eux ne s'en aperçoive. Il s'approcha d'elle, pour la seconde fois. Il la retint de sa main sur son bras, avant de la tirer contre lui. Il répéta les mêmes actions, que lorsqu'elle comptait se donner la mort. Cette fois-ci, elle ne fut pas sauvée, mais a réussi à le délivrer.

𝖮𝗇𝖾 - 𝖲𝗁𝗈𝗍 | 𝘌𝘕𝘏𝘠𝘗𝘌𝘕 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant