Le réveil du Phénix

- XXI -

Alice

Après l'opération ratée pour l'Ordre, Alice resta trois semaines à l'hôpital Sainte-Mangouste. Elle avait fait une chute de plus d'une dizaine de mètres, et aucun des médicomages n'avait vraiment compris comment elle en avait réchappé. Enfin, presque réchappé.

Car le bébé qu'elle portait en elle n'avait pas survécu à la chute. Lorsque Lily, James et Frank avait compris qu'Alice faisait une fausse couche, ils l'avait emmenée en urgence à Sainte-Mangouste, où elle avait tout de suite été prise en charge. Frank ne pourrait jamais oublier la vision de celle qu'il aimait gisant là, sur le parquet poussiéreux de cette maison abandonnée, se vidant de son sang. Pendant le séjour de la jeune femme au sein de l'établissement magique, Frank eut comme l'impression que le temps s'était figé. Seule comptait Alice, pâle, respirant à peine, couverte de perfusions.

Lorsque les autres membres de l'Ordre du Phénix avaient appris la nouvelle, un voile de tristesse et de découragement s'était abattu. Car ce qui rassemblait les membres de l'Ordre du Phénix, c'était l'espoir. L'espoir qu'un jour, un monde meilleur se relèverait des cendres de celui qui était en train de s'écrouler sous leurs yeux. La mission de l'Ordre du Phénix était que ce monde ne s'écroule pas trop brutalement. Qu'il ne fasse pas trop de victimes. Mais en voyant Alice sur son lit d'hôpital, entre la mort et la vie, il était bien difficile de garder espoir. Mais si même l'espoir s'en allait, que resterait-il pour l'Ordre du Phénix ?

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Sirius

Sirius Black avait cru qu'il était mort. Il aurait préféré. Car s'il restait chez les vivants, son corps n'était plus que douleurs.

Sirius avait l'impression que l'intégralité de ses os avait été réduit en miettes. Il n'était pas si loin de la vérité, d'ailleurs. Lorsque Jack Fawley était venu pour s'emparer de Dorcas, il avait voulu tuer Sirius. Il avait presque réussi. Sirius avait été écrasé par une partie de la grotte qui s'était effondrée sur elle-même. Il ne devait son salut qu'à l'enchanteresse, Iduna, la métamorphe, qui lui avait sauvé la vie en l'entraînant avec elle dans la rivière souterraine.

Pendant plus de six mois, Sirius n'avait plus ouvert les yeux. Son corps brisé ne voulait plus se battre. Mais patiemment, à force d'onguents, de formules gaéliques et de gestes réparateurs, Iduna avait fini par recoller tous les morceaux. Sirius Black, qui n'était qu'un amas de chair au lendemain de la venue de Fawley, avait fini par retrouver l'usage de la parole, de la marche. Sa magie était toujours là, elle aussi. Elle l'avait attendu pendant ces longs mois d'immobilité. Par miracle, sa baguette avait survécu à la catastrophe, intacte. Sirius avait pris le temps de revoir les formules magiques qu'il avait appris à Poudlard, de la plus élémentaire à la plus avancée. Il avait voulu s'assurer que sa magie était comme avant. Fiable, puissante.

Mais Sirius Black ne pouvait plus rester indéfiniment en Irlande. Iduna lui avait offert un accueil qu'il n'aurait jamais espéré. Mais il était temps de partir. Dorcas avait besoin d'aide. Et l'Ordre du Phénix aussi, d'ailleurs. Sirius fit donc ses adieux à l'enchanteresse, qui l'accompagna jusqu'au Portoloin qui le ramènerait chez lui.

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Remus

Depuis son rendez-vous avec Marlene, Remus Lupin avait rarement été aussi peu loquace. Le jeune homme, malheureux, se renfermait sur lui-même comme une huître. Marlene et Emmeline, ensemble... En tant que loup-garou, Remus comprenait volontiers que certains souhaitaient maintenir une partie de leur vie privée sous silence. Mais tout de même... Ce qui faisait mal au jeune homme, c'était que Marlene n'avait jamais vraiment parlé d'Emmeline à Remus. Lui qui pensait qu'ils était amis... Mais non, manifestement, même pas.

Alors, pour oublier son malheur, Remus s'absorbait dans le travail. Dans le bureau de régulation des créatures magiques, le jeune Lupin faisait partie des éléments les plus efficaces. Remus s'absorbait dans les dossiers les plus problématiques, pour mieux oublier ses propres tourments. Il restait souvent tard le soir, dormait peu, ou pas du tout, avant de retourner au Ministère, avant que la plupart des employés n'arrive. La fausse couche d'Alice lui avait mis un coup supplémentaire au moral : comment un événement aussi traumatique, dramatique, que celui, pouvait arriver à une fille aussi gentille, joyeuse, ouverte, qu'Alice Londubas ?

Peu à peu, Remus devenait un spécialiste des cas les plus délicats du service de régulation. La plupart des fonctionnaires en poste n'abattait pas la moitié du travail accompli par Remus. Les chiffres des résultats du jeune homme étaient en hausse constante, pour le plus grand plaisir de son supérieur hiérarchique. Un soir, il le convoqua dans son bureau.

-Cher Remus, merci d'être venu. Je voulais vous voir par rapport à votre intégration dans le Bureau. Je vois que vous vous êtes parfaitement adapté aux modalités de travail du Ministère, et je voulais vous en féliciter. Comme vous le savez, la plupart des stages dans notre service durent trois à quatre ans, avant qu'un contrat soit officiellement instauré. Mais dans votre cas... nous aimerions vous proposer un contrat dès à présent.

-Merci beaucoup, monsieur.

-Attendez, il y a une condition. Voyez-vous, la plupart des fins de stage se soldent par un séjour dans un Ministère à l'étranger. Et... nous avons un accord avec le Ministère de la Magie de Taïwan. Vous avez encore le temps de vous décider, vous savez. Vous ne partiriez qu'au printemps prochain. Mais sachez que nous sommes vraiment très satisfaits de votre travail. Voilà, vous pouvez y aller.

-Merci beaucoup, monsieur, répéta Remus, comme un automate, complètement ahuri de la proposition qu'on venait de lui faire.

Le jeune homme se leva, et quitta la pièce. Il était tard, et Remus quitta le Ministère sans même se souvenir de l'avoir fait. Il rentra chez lui, ses pieds le conduisant comme par automatisme. Il ne reprit ses esprits que lorsqu'il vit quelqu'un l'attendre devant sa porte.

-Salut, Lunard.

Sirius était de retour.