Ilona
le lendemain 08h, Cleveland,
– Hey Ali, tu es prête ? lui demandai-je.
Elle s'étirait doucement, et ses yeux prirent quelques secondes pour s'adapter à la lumière du jour, mais elle hocha la tête.
– Aujourd'hui, j'aimerais aller récupérer des affaires à l'appartement.
Elle hocha la tête à nouveau. Je ne savais pas si ce que je faisais était trop risqué ou non, mais il fallait que nous trouvions une solution, au moins pour nous alimenter. J'avais laissé quelques maigres économies qui nous permettraient de survivre à court terme, mais c'était ma seule idée.
Nous entamions alors une petite marche pour rejoindre les quartiers plus pauvres de Cleveland. Malgré les longues tirades d'Alia, je n'arrivais pas à me détendre. La pression était trop grande, cette décision ne m'incluait pas seulement moi, mais aussi Alia, et je ne pouvais pas la laisser toute seule au parc en attendant mon supposé retour. Il fallait que nous restions unies, ce qui incluait le fait de prendre le risque à deux.
Dès les premiers mètres, j'eus l'étrange sensation d'être observé, mais je ne savais pas s'il s'agissait simplement d'une paranoïa déclenchée par ma peur ou d'une réalité. Quoi qu'il en soit, je préférais ne rien dire à Alia pour ne pas la paniquer.
Nous étions arrivées devant l'immeuble sans que cette désagréable sensation ne me quitte du trajet, cependant il ne nous était toujours rien arrivé. L'hésitation était palpable, il me restait une dizaine de secondes pour décider de faire demi-tour. J'eus un rapide flashback de différents moments de ma vie où j'avais eu bien raison de faire confiance à mon instinct et ma décision fut prise.
– Alia, ça te dit qu'on aille se promener un peu avant ?
Elle m'observa silencieusement un instant, et elle dut apercevoir quelque chose dans mes yeux car elle accepta de suite d'un hochement de tête.
On marcha silencieusement vers un petit chemin qui nous guiderait jusqu'à plusieurs kilomètres de notre immeuble, me laissant ainsi le temps d'élaborer un plan.
Une fois arrivées au bout du chemin, je sentis ma cuisse me haïr pour ce trajet supplémentaire, mais je ne me plaignis pas. Alia n'était même pas au courant de son existence.
On s'assit toutes les deux sur un banc de l'espace public, et nous observions le monde qui nous entourait, celui auquel nous n'avions pas accès. Nous étions cernées par des boutiques de vêtements, de sacs, ou de bijoux hors de prix ainsi que des restaurants, alors que nous ne pouvions même pas aller au fast-food. Plus loin, on pouvait voir des immeubles et de grandes maisons dont les prix étaient exorbitants.
J'étais incapable d'offrir cette vie à ma sœur. J'avais déjà du mal à lui offrir une unique boule de glace pour son anniversaire, alors lui offrir ne serait-ce qu'un foulard dans une de ces boutiques m'était impossible, et la situation n'était pas prête de s'arranger.
J'avais honte de ne pas pouvoir lui offrir les mêmes vêtements que tous ses copains portaient. Je ne pouvais pas non plus lui donner d'argent pour qu'elle puisse manger à l'extérieur avec eux, sachant que j'avais déjà du mal à payer sa cantine.
Pourtant Alia ne se plaignait de rien. Elle ne me demandait jamais d'argent de poche, elle faisait toujours comme s'il n'y avait pas de problème.
Cependant il y en avait bien un, la moindre dépense supplémentaire m'empêchait de me nourrir. Il m'était arrivé de ne pas manger pendant plus d'une semaine. Je souffrais régulièrement de malnutrition à tel point que les gens se retournaient sur moi dans la rue, sûrement dégoûtés par ma maigreur.
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Bratva
RomanceIlona, une jeune femme de vingt-trois ans, essaie d'assurer un avenir à sa sœur alors qu'elles n'arrivent pas à sortir de la pauvreté qui les entoure. Spencer fut pris d'un vif intérêt pour cette femme mystérieuse et il n'eut plus qu'une idée en têt...