Bus Stop 10.

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Je n'ose plus faire marcher un seul de mes membres, beaucoup trop submergé par cette vague de chaleur familière. Mon cœur bat si fort dans ma poitrine que j'ai l'impression qu'il va en sortir d'ici quelques secondes.

Je voudrais vraiment disparaître, m'enfuir dans un endroit où personne ne me trouverait et où je pourrais me ridiculiser toute seule sans être constamment effrayé par le regard des autres sur mes moindres faits et gestes. Je voudrais pour une fois qu'on me laisse tranquille. Je voudrais vivre sans la peur d'être juger. 

Il y a tant d'autres choses que je désire mais qui n'arriveront jamais. Je le sais pertinemment. Il est arrivé un moment où je me suis résigné. Les miracles ne font plus partie de mon monde. Ils n'en ont jamais fait partie d'ailleurs.

Je me décide à prendre une longue respiration et verrouiller mon téléphone comme si de rien n'était. Le bruit des trombes d'eau s'abattant sur Montelivet calment peu à peu mon rythme cardiaque et me ramène à mon état initial.

Après tout, il ne savait pas de quoi ce message parlait alors autant le garder pour moi et ne pas en lui parler. Même si j'étais assez folle pour lui en faire part, de toute façon, il se moquerait de moi comme l'ont fini par faire tous les autres avant lui. Les humains ne changent jamais.

"Est-ce que tu dessines ?" La voix de Zachary me fait sortir de mes pensées

Je me tourne vers son visage dont je m'efforce de retenir chaque petit détails insignifiant à chaque fois que mes yeux ont l'opportunité de se poser dessus. Son sourire est surement la chose pour laquelle je tuerais.

Je fronce les sourcils, me demandant comment il peut aussi bien tomber. Et comme s'il devenait mes questionnements, il me montre d'un coup de menton, le crayon que je n'ai pas lâcher depuis que Lauren avait essayé de me voler mon cahier de dessin. Je soupire. Ce n'est que ça.

"Oui." répondis-je en lui souriant faiblement alors que le bus effectue son énième arrêt.

"Est-ce que je peux savoir ce que tu dessines ? Si ce n'est pas trop indiscret, bien sur." me demande-t-il en m'offrant un de ces sourires, furtif mais incroyablement communicatif.

Je mords furieusement ma lèvre inférieur entre mes dents. Comment lui dire que l'un de mes dessins est centré sur son portrait ? Et que tous les autres sont vraiment affreux ?

"Des choses." J'hausse des épaules.

"Quoi comme choses ?"

"Pourquoi tu t'y intéresses ?"

Ouch. J'avais peut-être dis ça un peut trop agressivement et je m'en voulais immédiatement. Ce n'était pas du tout mon intention mais je pouvais m'emporter très facilement.

"Peut-être parce que je te regarde depuis que je suis arrivé ici et qu'à chaque fois que je te vois, tu as le nez fourré sur ce cahier de dessin que tu emmènes partout avec toi ?"

Je secoue la tête en souriant. Lui aussi il m'étudiait pendant tous ces jours. C'est bête mais cette pensée anima une flamme assez grande pour enflammer chacun de mes membres.

"Si je te disais ce que je dessine tu t'enfuirais en courant."

"Je te rappelle qu'on est dans un bus." rit-il. "Le seul endroit où je pourrais m'enfuir serait à l'autre bout du bus. Ce qui n'arrivera pas." me rassure-t-il.

"Je t'assures que ce ne sont que des esquisses et ce n'est vraiment pas très bien." dis-je en m'abaissant vers mon sac pour en sortir mon cahier.

Ce même cahier que j'ai refusé de montrer à Lauren et que je m'étais promis de ne jamais faire montré à quelqu'un d'autre. Voyez, comme ce garçon a un tel pouvoir sur moi. C'est incroyable. Il me fait faire des choses qu'en temps normal j'aurais catégoriquement refusé de faire. Et ça me fait peur.

Je lui tend timidement mon cahier et il me sourit, comme pour que je me sente mieux. Malheureusement, ça n'arrange rien du tout. Les battements de mon cœur résonnent encore dans mes oreilles et dans tous mon corps. Je suis sûre que si je continue à me mordre les ongles, il ne me restera plus que ma peau.

Je le vois tourner les premières pages de mon cahier et je cache mon visage de mes mains. Pourquoi lui ai-je donné le fruit de mes quatre années de souffrance ?

La question ne cesse de rôder dans ma tête sans que j'y trouve forcément une réponse qui tienne la route. Excepté le fait que je sois une pauvre conne.

Terminus.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant