Bus Stop 15.

1.4K 162 15
                                    

Je prends une grande inspiration et mon courage à deux mains. Je m'apprête à lui dire tout ce que j'ai sur le cœur depuis tant d'années. Est-ce que je pourrais y arriver ?

Ma conscience me dit oui.

Ma raison me dit oui.

Mon moi intérieur me dit oui.

Je me dis oui.

"Écoute moi bien espèce de sale pimbêche, tu m'a pourri la vie pendant plusieurs années et ça t'a apporté quoi, hein ? De montrer aux autres que tu pouvais être une fille redoutable et qu'on était censé avoir peur de toi et de tes faux ongles manucurées ? Bravo, je dis bravo à la connerie et à la jeunesse d'aujourd'hui. Je suis désolé de te le dire mais tu es fausse, de A à Z. Ce n'est qu'une apparence que tu t'es construit pour paraître méchante et impassible aux yeux des autres. Coucher avec toute l'équipe de baseball, vraiment ? À part perdre ta virginité plus tôt que tout le monde tu n'a rien prouver à personne. Tes actes sont censé te définir et montrer qui tu es à tout le monde. Pour le lycée aujourd'hui, tu es une pute, la reine des emmerdeuses. Et j'ai trop longtemps été effrayé par toi parce que je ne savais jamais de quoi tu étais capable. Mais tu veux savoir une chose ? J'en ai plus rien à faire. Tu pourras me dire ou me faire ce que tu veux, en fin de compte ce sera la même chose parce qu'on est pareil toi et moi. On est fait de la même façon. Alors fais ce que tu veux pour améliorer ton image de poufiasse mal baisé mais au final, c'est pas ça qui va t'assurer un avenir prometteur. Je me souhaite de ne jamais recroiser ta route après le lycée parce que si c'est le cas, ça voudrait dire que j'aurais pris le mauvais chemin."

Quelques secondes défilent sans que rien ne se passe et un silence de plomb a envahi le bus. Toute l'attention des passagers est dirigé vers moi et je ne m'en rends compte que maintenant. Etant donné la manière dont je lui ai dit toutes ces choses, il m'aurait étonné que je passe inaperçue aux yeux des autres. Mais finalement lui déballer tout ça d'un seul coup m'a fait un bien fou. Ça m'a libéré d'un vrai poids qui commençait à lentement m'écraser. Je ne savais pas que j'avais autant d'hargne et de colère enfoui en moi.

Je continue de fixer Janessa d'un mauvais œil alors qu'elle cherche désespéramment quelque chose à répliquer. Si je pouvais, je lui collerais mon poing dans la figure devant tout le monde pour qu'elle comprenne ce que ça fait d'être humilié et être la risée de tout le monde mais je n'ai pas envie de me faire virer du bus et de devoir rentrer à pied jusque chez moi, c'est beaucoup trop loin d'ici. Et puis je finirais trempée et malade, non merci autant gardé ma place bien au chaud et me tenir à carreaux. J'aurais une autre occasion de pouvoir réaliser cette envie qui me démange depuis si longtemps. 

"Ouvrir ta bouche, ne changera pas ta réputation au lycée ni ce que tu es." finit-elle par me dire.

Je lâche un petit rire amer, "Ouvrir la tienne ne me fera plus jamais fermer la mienne."

Janessa me toise longuement avant de se lever et de se trouver une place à l'avant du bus, suivi de près par son ombre. Je lâche un profond soupir que je ne savais pas retenir. Mais d'où me vient cette répartie et ce courage ? Il y à peine cinq minutes, j'aurais tuer pour m'enfuir en courant et me cacher dans mon lit et maintenant c'est plutôt Janessa que je veux tuer. J'ai l'impression d'avoir fait un marathon et d'avoir puisée dans toutes mes forces, mes mains en tremblent et je parie que si j'étais debout, mes jambes flancheraient automatiquement.

"Mais qu'est-ce qui vient de se passer ?" me chuchote Lauren, encore étonné de cette scène. 

Je vois son regard dérivé vers quelque chose entre moi et Zachary qui la fait légèrement sourire mais je n'y fais pas plus attention sur le moment. Je suis plus préoccupé par son expression.

"Je ne sais pas." bredouillai-je en me mordant les ongles. 

"Tu te rends compte de ce que tu viens de lui dire ?" demande-t-elle, n'ayant aucune expression sur le visage. 

Mon cœur menace de sortir de ma poitrine et ce qu'elle me dit ne m'aide en rien à me calmer. Est-ce qu'elle en est en colère contre moi parce que Janessa est une de ces amies et que je viens de lui dire tout ce que je pense d'elle dans un bus bondé de gens que je ne connais pas et qui m'ont regardés lui crier des choses affreuses ?

"Je..." réussis-je à dire avant qu'elle ne me coupe.

"C'est incroyable Jane. Je suis carrément fière de toi !" s'exclame en m'adressant un grand sourire. 

Quoi ? Je suis perdue là. N'est-elle pas en colère contre moi ? 

"Mais... tu n'est pas en colère ?" demandai-je, sur mes gardes.

"En colère ? Pourquoi ?" 

"Parce que Janessa est ton amie et -" Elle me coupe d'un signe de main. 

"Alors là je t'arrêtes. Janessa n'est pas mon amie mais seulement une connaissance. Ma mère connait sa mère et elles ont organisés une soirée toutes les deux à laquelle nous avons aussi assistés puis fais connaissance. Pour tout te dire." Elle s'approche de moi et chuchote. "Je ne l'aime pas." sourit-elle. 

Je souris légèrement et dans un élan de joie, je la prends dans mes bras. Jamais je n'aurais cru rencontrer quelqu'un comme Lauren un jour comme celui-ci. Pourquoi cette journée est-elle différente des autres ? Pourquoi m'est-il permis de faire des choses que jamais je n'aurais cru possible ? 

Peut-être qu'il faut que j'arrête de me poser des questions et enfin croire que la vie m'a offert une chance de remonter la pente. 

"Je dois y aller, c'est mon arrêt." nous dit Lauren, une fois qu'elle s'est retiré de l'étreinte. 

Je lui souris largement et hoche la tête pour lui dire que j'ai compris. 

"De toute façon, tu as mon numéro. N'hésite pas." me sourit-elle en me faisant un clin d'œil avant de me prendre une dernière fois dans ses bras et de se diriger vers la sortie. 

Je lui fais un signe de main auquel elle me répond puis elle descend du bus, me laissant seule avec mes réflexions farfelues, mon sens de l'observation tordue et ... ma main enlacé dans celle de Zachary ?

Terminus.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant