Je prendrais le saumon

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En marchant en direction du Freddy, Élie et Monika passèrent devant une librairie. L'insigne, bien qu'évidemment faite de plastique, abordait une texture sylvestre sur laquelle était marqué en lettres noires italiques "Retombées de rosée d'aube d'hiver". Élie ne comprit pas d'où pouvait bien venir un nom pareil, qu'il jugeait bien trop long pour une si petite librairie. Monika quand a elle, semblait analyser les titres de tout les livres en vitrine, comme pour deviner les gouts de ceux tenant ce magasin.
"Tu continue le lèche-vitrine ou on rentre ?"
Monika fut bien contente que ce soit lui qui propose et pas elle.
"Si tu insiste."
"Je sais que ça te fait plaisir."
Et Élie enfonçea la poignée. Une petite clochette sonna. L'espace intérieur de la boutique était principalement occupé par des étagères sur lesquelles reposaient une quantité de livre bien supérieur à ce que la superficie de la librairie devrait pouvoir accueillir. L'intérieur entier semblait correspondre au thème de la forêt, créant un contraste énorme avec tout ce qui se trouvait à l'extérieur de la boutique, qui était plus dans un thème futuriste avec un clair abus de néons. De l'herbe semblait même sortir d'entre les lames du plancher.
"Je peux vous aider ?"
Un jeune homme blond sortit de derrière une étagère, ce qui surprit quelques peu Monika.
"Très probablement. Je cherche l'étagère où je pourrais trouver l'auteur Jo Witek, s'il vous plaît."
"Jo Witek...ce sera celle juste a votre gauche."
"Merci bien."
Élie et Monika se dirigèrent donc vers l'étagère, et l'homme blond retourna derrière son comptoir.
"Maintenant, plus qu'a faire un choix."
"J'ai le droit de te donner mon avis ?"
Monika se retourna vers Élie.
"Tu t'y connais en littérature ?"
"Absolument pas. Mais j'ai bien aimé celui-ci."
Élie prit un livre sur l'étagère et le donna a Monika.
"'Le Domaine'... Je ne l'ai jamais lu, celui-ci."
"C'est l'un des seuls romans que j'ai lu, mais parmi ce peu de livres celui-ci est mon préféré."
"On verra bien que ça donne, alors."
Monika le prit et l'emportit au comptoir.
"Ça vous ferra 12$, s'il vous plait."
C'est seulement maintenant que Monika se rendit compte qu'elle n'était en possession d'aucune monnaie. Elle se tourna vers Élie.
"Élie..."
"Pas de problème."
Élie sortit sa carte et paya.
"...et passez une bonne journée."
"A vous aussi, au revoir."
Élie et Monika sortirent du magasin.
"Je te rembourse dès que possible, promis."
"Pas la peine. On va dire que c'est pour t'avoir laissée seule dans l'avion."
"Tu crois vraiment pouvoir acheter mon pardon avec juste un livre ?"
Élie regardat Monika dans les yeux.
"Bah oui."
Monika prit quelques secondes pour repenser sa réponse.
"Et bah t'a bien raison."
Ils reprirent donc leur route vers le Freddy. En arrivant, le collègue d'Élie était déjà là.
"Tien, t'est pas tout seul."
Monika tendit sa main droite, que le collègue d'Élie serra énergiquement.
"Je m'appelle Monika, je suis arrivé à l'Institut il y quelques jour. J'ai fait ma première mission d'instruction avec Élie hier."
"J'm'appelle Ernest. Il t'en a pas trop fait voir ?"
"Un peu quand même."
"Et si on s'installait ?"
Élie, Monika et Ernest asseyèrent donc a une table, et quelques minutes plus tard une jeune femme en tablier s'approcha.
"Bienvenue au Freddy's, qu'est ce que l'on peut vous servir aujourd'hui ?"
Élie répondit en premier.
"Je prendrais une 87. Et vous ?"
Ernest prit la parole.
"Je prendrais l'Estivale, avec un ricard. S'il vous plaît."
"Et je prendrais...une Margherita."
"Je vous amène une carrafe d'eau avec tout ça ?"
"Avec plaisir."
"Très bien, à dans quelques minutes !"
La serveuse repartit.
"Vachement sympa le personnel ici."
"Disons qu'ici c'est compliqué de trouver des personnes désagréables. Alors, vous me racontez comment c'est passé votre mission d'hier ?"
Élie réagit tout de suite, et dit froidement:
"Faut que j'aille aux toilettes."
Et il s'en alla. Monika dit:
"Je crois qu'il a un problème avec moi."
"Ho non, pas avec toi. Avec toutes les M04."
"Mais pourquoi ? Je lui ai rien fait de mal...du moins je crois. Je me suis gourré quelques part ?"
"Ho non, il est juste traumatisé depuis qu'il t'a fait l'amour et que t'es morte dans ses bras 2 semaines plus tard."
Ernest vit la réaction d'incompréhension sur le visage de Monika et compris qu'il avait besoin de développer.
"Attend, ni lui ni Suzanna ne t'ont expliqué quoi que ce soit ?"
"Non, pas vraiment."
"Alors en fait, quand Élie est rentré à l'Institut Markov il y a 7 ans, il y est pas rentré tout seul. Il y rentré avec toi, tout du moins une toi d'une autre dimension, et ils était..."
"AHEM, AHEM. "
Élie était revenu.
"Bah tient, t'est revenu. J'étais sur le point de dire à Monika que-"
"Et Monika allait te raconter la mission d'hier. Changez pas le sujet sans moi, sinon j'arrive pas a suivre."
"Mais attend, Ernest allait dire que-"
"Mais j'ai vraiment envie d'entendre ton ressenti sur la mission d'hier. Pourquoi tu est revenu, au final ? Qu'est-ce qui t'a poussée a abandonner tout ces gens ?"
Monika était quelques peu frustrée de ne pas entendre la fin du récit d'Ernest, mais elle se dit qu'elle pourrait toujours lui demander de lui raconter la suite plus tard, étant donné que cette histoire semblait mettre Élie mal à l'aise.
"Hé bien après que tu m'ai laissée toute seule, j'ai pas mal réfléchi à tout ce que tu m'a balancé a la figure plus tôt. En plus, je me suis dis que si je n'arrivais même pas a accomplir ce qui était très certainement une mission très basique, alors ça ne servait à rien de vouloir continuer ce travail. Je suis bien consciente d'avoir abandonné ces gens, et ça m'a mis extrêmement mal pour quelques heures, mais j'ai réussis a avancer."
Ernest  l'interrompit.
"Alors juste je te reprend sur un truc, ce n'était pas vraiment ce que l'on pourrait appeler une mission de base. C'était d'ailleurs la première fois que j'entendais parler d'une mission de formation aussi...dure, en particulier pour toi."
"Ha bon ?"
"Bah ouais. D'habitude, c'est plus une introduction aux logiciels qui sont préinstallés sur les ordinateurs. Bien loin de ce tu as fait hier, en bref."
"Ha oui d'accord."
La serveuse revint, une assiette dans chaque main, et une en équilibre sur son avant-bras.
"La Margherita c'est pour ?"
"Moi !"
La serveuse posa la pizza en face de Monika.
"Et la 87' pour vous..."
Elle posa une autre pizza devant Élie.
"Et enfin, l'Estivale."
Elle posa la dernière pizza devant Ernest.
"Je reviens dans quelques instants avec vos boissons ."
La serveuse repartit et Monika reprit la parole.
"Aussi une petite question que j'ai  pas osé poser à Suzanna. L'Institut n'a rien a voir avec un camp religieux, si ?"
Ernest et Élie furent un peu surpris, et Élie fut le premier a réagir.
"Mais où t'es allé chercher ça, toi ?"
"Eh bien le nom complet de L'Institut, c'est bien 'Institut Markovien Omniversel' ? Dans la pop-culture, Markov est beaucoup associé a ce genre de truc."
"J'en ai entendu parler. Mais là ça fait plus référence aux équations de Markov, qui permet de calculer les probabilités d'un événement futur. Mais pourquoi tu demande ça ? T'es branché religion ?"
"Pas vraiment. Ma mère est chrétienne, mais j'ai jamais vraiment adhéré a un culte et vous deux ?"
Ernest prit la parole.
"Bah moi j'avais des parents juifs, a ce qu'il paraît. Mais ils sont morts quand j'avais trois ans, donc je me souviens pas d'eux. Mes parents d'après était non-croyants, alors ils s'en foutaits."
"Donc tu est..."
"Il est circoncis."
"Coup bas ici. Tu veux qu'on ouvre les dossiers ?"
"Non non, c'est bon."
"Et toi, Élie ?"
Monika et Ernest prirent une part de pizza.
"Bah j'ai pas peur, donc je vois pas l'intérêt."
"....dévelloppe ?."
"Les dieux c'est des trucs que les hommes de l'âge de pierre ont inventés pour se rassurer. A ce moment là absolument tout voulait leur mort, alors j'imagine que l'idée d'une entitée  supérieure toute-puissante devait être rassurant pour eux. Je ne vis pas dans la peur, donc je n'ai pas besoin de Dieux."
Monika avala sa pizza.
"Je m'attendais pas a un avis aussi développé de ta part, ça c'est sûr."
"Je suis pas un abruti non plus."
Et Élie mangea sa pizza.
Quelques heures plus tard, après s'être promenés a travers la ville tout le reste de l'après-midi,  ils étaits de retour a L'Institut dans la soirée.
"C'était pas mal aujourd'hui ! Tu voudrais revenir avec nous dimanche prochain ?"
"Avec plaisir ?"
"Allez, je vous laisse tous les deux, je vais faire le rapport."
"Il faut faire un rapport pour les jours de sortie ?"
"Juste pour déclarer qu'il n'y a eu aucun incident. Y'en a pour deux minutes. Allez a plus !"
Ernest partit en direction de l'aile administrative. Élie et Monika restèrent donc seuls. Élie prit la parole.
"Bon, bah je retourne dans mon appartement alors."
"Tu permet que je te raccompagne ?"
"Si ça te fait plaisir."
Ils commencèrent donc a marcher vers les quartiers résidentiels. Monika avait toujours une question qui lui trottait dans la tête, alors elle prit la parole au bout de quelques secondes de silence.
"Dis-moi..."
"Oui ?"
"Ernest m'a dit des choses assez bizarre ce midi. Comme quoi tu aurais bien connue une version alternative de moi."
Élie tourna la tête vers Monika.
"C'est tout ce qu'il a dit ?"
"Il a aussi rajouté quelques détails vulgaires. Et il a dit qu'elle est morte dans tes bras."
"Considère tout ce qu'il t'a dit comme vrai, et ne me pose pas plus de questions."
Élie voulait couper court a la conversation, mais Monika voulait pousser un peu plus loin.
"C'est tout ? C'est pour ça que tu est désagréable avec moi comme ça ?"
"J'ai pas envie en parler du tout, et encore moins avec toi en particulier. Mais moi aussi j'ai une question."
"Vas-y."
Élie s'était senti offensé par cette question qu'il jugeait trop intrusive, alors il avait envie d'humilier un peu Monika.
"Pourquoi c'est toi qui marche devant ?"
Monika était un peu perplexe.
"Quoi ?"
"Je reformule: comment tu sais où est ton appartement ? Je ne l'ai jamais dit."
Monika ne savait pas trop quoi répondre, elle n'avait pas envie de lui dire qu'elle était venue la nuit dernière devant sa porte lui demander du réconfort.
"...Suzanna me l'a dit."
"A quelle occasion ?"
"Je lui ai demandé hier, quand je suis revenue."
Monika accéléra le pas.
"Et pourquoi tu lui a demandé, si je peut me permettre ?"
"On est arrivé."
Monika s'arrêta sec devant une porte et se retournât en face d'Élie. Elle avait les joues rouges et croisait les bras. Élie déverrouilla sa porte et l'ouvrit.
"...je t'offre le dîner ?"
"Ça dépend, qu'est-ce que tu as a offrir ?"
"De la ratatouille ou du saumon."
"Je prendrais le saumon."
Monika entra dans son appartement.

Markov: Livre 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant