Prologue

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Le silence, la bonne humeur, et l'esprit familial qui régnait chez les Phown ne sera plus jamais.

C'était une petite famille soudée, constituée d'un père, d'une mère, et d'une fille unique. Le père subsistait en tant qu'homme de la maison, celui dont le tempérament se trouvait être le plus autoritaire par rapport aux deux femmes, sans que son comportement n'excède un certain degré de mépris. Il semblait être un père comme un autre ; gentil, professionnel, assez sévère quand le besoin s'en faisait sentir, conscient du monde qui l'entourait et très attentionné en ce qui concernait l'éducation de sa fille. Le monde de la mère, femme au foyer, se résumait à sa fille unique, qu'elle chérissait bien plus qu'elle même, et à son mari. Elle semblait être une mère comme une autre ; attentionnée, aimante, attachante, bienveillante, gentille, charmante, même du haut de ses quarante-sept ans. La fille se comportait comme une adolescente de son âge. Grandissante, elle découvrait sa personnalité, son monde, et respectait ses parents qu'elle aimait malgré tout. Elle paraissait être une jeune comme les autres avec ce besoin de prendre de plus en plus d'autonomie pour se préparer au grand vol dont elle rêvait depuis si longtemps. Aimée des autres jeunes de son âge, elle se rendait souvent à des fêtes pour profiter de la vie, malgré sa timidité maladive. Une belle petite famille en vigueur, qui se ressemblait beaucoup sur l'attrait physique, mais dont les caractéristiques morales n'étaient propres qu'à chacun. Une union forte, des entraides régulières que ce soit concernant l'école, la maison ou le travail. Les voisins connaissaient les habitudes des Phown sur le bout des doigts, toujours prêts à raconter quelques petites anecdotes croustillantes tirées de leur quotidien aux petits jeunes et aux nouveaux habitants du quartier. Les célibataires enviaient leur convivialité, et les jeunes couples espéraient vivre une aventure similaire à la leur. Les parents, eux, ne pouvaient s'empêcher de comparer leurs propres enfants à la douce adolescente des Phown. Tout le monde les connaissait, et tout le monde les appréciait pour ce qu'ils étaient.

Ainsi semblaient être Mattew et Kate, père et mère d'origine américaine de l'adolescente. Ainsi étaient les Phown, avant un dimanche ensoleillé qui avait commencé comme tous les autres, dans la bonne humeur matinale et dans l'amour familial qui les unissait. La fille était sortie du domicile avant midi pour rejoindre ses amies et avait laissé sa chambre dans un état pitoyable, comme à son habitude. Kate était donc passée avec le balai, fidèle à son rôle et avait ramassé une feuille volante parmi d'autres sur le bureau désorganisé. Elle n'avait pas l'air de contenir quelque chose de particulier, c'était juste une feuille, simple, trouée près de la marge avec de grands carreaux. Dessus se lisait l'écriture fine de sa fille, celle qui rendait sa mère fière après tout le mal qu'elle s'était donné pour que l'adolescente comprenne qu'écrire bien et droit était primordial. Kate remarqua en un clin d'œil que ce n'était pas un cours qui était écrit dessus, ni un contrôle ou un brouillon. Ce n'était non plus un énième dessin qui reflétait le talent artistique de sa fille, ou une future lettre à sa grand-mère habitant loin d'ici.

Intriguée, Kate prit alors l'écrit entre ses mains, et s'assit sur le lit. Elle commença sa lecture, ne se doutant pas que l'adolescente pouvait avoir des choses à cacher à ses parents, et encore moins que ce seraient précisément ces choses qui changeraient le cours de leur vie.

À 19h pile, la porte s'ouvrit chez les Phown, découvrant un père enragé et une mère en pleurs au pied de l'entrée, comme si cela faisait de longues heures qu'ils attendaient le retour de leur fille. Un placard tomba, déversant son contenu sur le sol avant même que la vue sur le salon ne soit plus accessible. Les voisins, apeurés par ce comportement anormal, s'étaient barricadés chez eux, et avaient tout fait pour ne pas entendre les hurlements et les claquements qui brisaient pour la première fois le silence de la résidence des Phown.

Personne n'avait cherché à comprendre ce qui s'était exactement passé ce soir-là, comme s'il n'y avait rien eu, certainement pour ne pas salir le nom des Phown. Mais le comportement de l'adolescente, malgré elle, changerait inévitablement. Et cela ne resterait pas sans conséquences, et éveillerait les soupçons de ses plus sincères connaissances.



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