Chapitre 17

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Appuyée sur la balustrade du balcon, je laisse le soleil de ce début d'après-midi me réchauffer la peau.

Qu'il y a-t-il de mieux que sentir le soleil sur ses paupières ?

Mes pensées errent sur les évènements d'hier. Les souvenirs ne provoquent aucun sentiment en moi. C'est comme regarder un diaporama.

Un homme est mort devant mes yeux. Il s'est vidé de son sang sur moi. Et cela ne provoque rien en moi.

Combien de temps oscillerai-je entre mes différents états d'engourdissement ? Combien de temps avant que mon mental ne se brise définitivement ? Combien de temps pourrai-je encore supporter ça ?

Un ricanement passe la barrière de mes lèvres.

Je suis cassée. Et ce monde piétine un peu plus chaque jour les derniers morceaux qu'il reste de moi.

J'ouvre les yeux en sentant une présence à mes côtés. Zaynir, accoudé à la balustrade et observant l'horizon. Il prend une gorgée de l'alcool qu'il a entre les mains avant de me tendre la bouteille. Je repousse son bras.

— Je ne bois pas.

Il rétracte son bras.

Zaynir : Une aversion pour l'alcool ?

— Non. Un manque de confiance.

Zaynir : Un manque de confiance ?

— Je ne me fais pas confiance avec l'alcool. Ou tout ce qui drogue et cigarette.

Zaynir : Pourquoi ?

— Ils disent tous que boire leur fait oublier. Que se droguer leur permet d'être heureux, ne serait-ce qu'un instant. Fumer les détend. D'une manière ou d'une autre, ces merdes leur permettent d'avoir un moment de paix.

Mon corps s'affaisse.

— Si je goute à cette paix, je ne pourrais plus jamais m'en passer.

C'est maintenant un rire amer que je laisse échapper.

— Je peine déjà à combattre mes problèmes émotionnels. Comment est-ce que je m'en sortirai si je dois aussi faire face à l'addiction ? Je ne peux pas m'infliger ça.

Zaynir : Il m'arrive de vouloir boire jusqu'à n'en plus pouvoir. Pour oublier. Avoir un moment de répit dans ce monde pourri. Ce serait tellement plus facile si j'avais une échappatoire.

Sa poigne se fait plus ferme sur la bouteille.

Zaynir : Mais dans ces moments-là, je revois le visage terrifié de ma mère lorsque mon géniteur rentré à la maison, bourré et remplit de haine pour nous.

Il finit le fond de sa bouteille d'une seule gorgé.

Zaynir : L'alcool fait ressentir ce qui a de plus mauvais chez l'Homme. C'est une leçon que j'ai très vite apprise. Alors, quand j'ai soudainement envie de boire plus que de raison, il me suffit de me souvenir de ma mère et toutes ces fois où elle m'a fait promettre de ne jamais devenir comme mon géniteur. Et l'envie disparait. Pour autant, il m'arrive parfois de céder.

— Quand les choses deviennent trop dures ?

Zaynir : Quand les choses deviennent trop dures.

— Comment fais-tu pour tenir le coup ? Affronter jour après jour les conséquences de cette vie ?

Zaynir : Je me rappelle ce pourquoi j'en suis là aujourd'hui. Puis je me dis qu'il n'y avait aucun autre choix possible. Encaisse ou crève, Ailyin, c'est la règle.

DETTE DE VIEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant