DanteL'homme pleurait. Écroulé au sol, suppliant, il frottait ses mains entre elles pour demander pardon.
Moi, je le regardais. Lui, seul et désespéré au milieu du danger, pauvre homme rattrapé par la Cosa Nostra.
- Scusate, scusate !
Il était âgé. Cheveux blancs, rides autour de ses yeux, et toute la tristesse du monde dans son regard. Oui, son monde s'écroulait à cet instant, et nous étions les monstres qui y mettaient fin.
Détruire, détruire, détruire...
Je me tenais dans l'ombre. Immobile, observateur de la scène, détaché et horrifié.
Léandro entra en scène. Il s'accroupit auprès du vieil homme.
- On t'a laissé du temps, pour payer ... On t'a dit, à plusieurs reprises, qu'ici, pour vivre tranquille... hein ?! Et pourtant, ça fait des mois que tu donnes plus rien.
À ses pieds, le vieux se mît à pleurer. Je l'observais, comme on observe un enfant qui pleure. Lorsqu'il n'a plus rien, lorsqu'on ne l'écoute plus et que pour s'exprimer, il ne lui reste plus que sa souffrance car elle crie plus fort que l'ignorance.
Léandro se redressa alors et se racla la gorge avant de cracher aux pieds du vieil homme.
- On te laisse jusqu'à demain soir, seulement parce que t'a famille a toujours payé. Après, tu sauras ce qui devra t'arriver ...
Léandro frappa dans une chaise et cette dernière se renversa dans un bruit fracassant, tandis qu'il se fraya un chemin vers la sortie accompagné de son soldat. Il me lâcha un regard en passant devant moi avant de disparaître dans l'arrière-cour. Moi, je restai un instant à observer le commerçant accroupi au sol, sanglotant et défait.
Et j'aurais tellement voulu lui dire à quel point je suis désolé, et que j'aimerais qu'il y ait un autre chemin, une autre issue. Que l'on puisse échapper à cette violence qui nous enserre, qui nous étouffe. Cette violence assassine.
Il pleurait, misérable et pathétique. Je l'observai, risible et tragique. Et alors, il leva les yeux vers moi, le spectre dans l'ombre. Il m'observa, et son regard perça mon échine.
Regarde. Regarde ce que tu as fait. Regarde ce que tu es.
Il avait cessé de pleurer. Le magasin était silencieux. Son visage tuméfié, les gouttes de sang qui perlaient de son nez. Et ses yeux, mitraille impossible.
Je te hais. Tout ce que je suis te hais, et je te souhaite le plus grand malheur du monde, la tristesse et la souffrance. Oui, regarde moi. Vois-moi. Ce que tu m'as fait. Jamais je n'oublierais, jamais je ne pardonnerais.
Et le vieil homme se leva, tremblant et titubant. Il se rapprocha.
À quelques centimètres enfin, il s'arrêta. Les yeux dans les yeux, et les rayons du soleil qui dardaient dans la petite échoppe.
- Tu es un monstre.
Et ce fut tout.
...
VOUS LISEZ
S A P H I R
Romance2009. De retour à Palerme, Sélène retrouve ses côtes baignées par le Soleil, l'éternité ocre et jaune de la jeunesse encore pure qui se veut invincible. L'été de 1999 est resté gravé dans sa mémoire telle la relique de l'immortel. Foulant les mêmes...