Chapitre 7

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19 octobre 1348


Les paupières lourdes, les membres en coton, Seiran peine à ouvrir les yeux. Il croît flotter entre deux eaux. Au moins est-il vivant. La douleur lancinante qui étire la peau de son cou et le contraint à retenir tout mouvement brusque est une preuve suffisante. Il reste qu'il fulmine intérieurement de se retrouver dans cet état. Il se souvient de tout. De ses provocations, de la frénésie du vampire et de sa morsure fatale à ses résistances. Cette dernière est la raison d'une profonde déception. L'onmyōji n'en veut pas à Valoïs, c'est lui-même qu'il blâme. Pour avoir une fois de plus échoué ; pour avoir défailli. Il a d'autant plus la rage qu'on l'avait prévenu. Zurui, Nox, tous deux avaient douté de ses capacité à le contenter. Il voulait tant leur prouver qu'ils se trompaient. À l'évidence, Seiran s'est surestimé.

Cette colère et cette honte sont l'étincelle qui l'aide finalement à sortir de sa torpeur. Se rasseyant dans le lit qui a accueilli sa convalescence, il constate qu'il n'a guère été reconduit dans sa propre chambre. Doutant que Valoïs l'aurait gardé longtemps à ses côtés, il envisage de fait qu'il ne se soit pas écoulé beaucoup de temps entre son malaise et son réveil, ce qui serait déjà une bonne chose, mais il ne jurerait de rien. Il faut dire que le temps lui paraît s'écouler étrangement au sein du château. Depuis combien de temps est-il au service du vampire ? On lui parlerait d'éternité que le calcul lui semblerait à peine exagéré.

Le grincement de la poignée le ramène tout à coup à la réalité. Ce son est la raison de l'emballement immédiat de son palpitant, car il ne doute pas de l'identité de celui qui va en franchir le seuil.

Le trouvant réveillé et assis dans ses draps, Valoïs lui dédie toute son attention.

— Tu es réveillé ? Comment te sens-tu ?

— Furieux ? Je me suis encore effondré...

Valoïs accueille cette introduction avec une surprise qu'il peine à dissimuler derrière un masque de glace. S'il s'attendait à rencontrer la colère du jeune homme, ce n'est pas dans cette direction qu'il l'imaginait.

— Oui. Deux jours.

— Deux jours ? s'étrangle Seiran. Si longtemps ?

— Tu as frôlé la mort, après tout.

À ce point ? Seiran se fige. À aucun moment il n'a pensé avoir approché un état aussi critique. En conséquence, il ne sait comment accueillir l'annonce. Deux jours pour revenir d'entre les morts n'est peut-être pas si déshonorant, finalement. Pour autant, il ne trouve aucune satisfaction à avoir surmonté l'épreuve. Il sait que son malaise a dû indisposer son maître. Qui ne l'aurait pas été en se retrouvant avec un partenaire catatonique sous son corps au bord de l'extase ?

— Je vous demande pardon, Val-sama, d'avoir gâché votre plaisir.

L'accueil qu'il reçoit n'est pas celui escompté. Se frottant les tempes d'une main, l'autre sur ses hanches, Valoïs s'éclaircit la voix puis lui signifie :

— Écoute ! Je vais être franc et direct. Si tu pensais bien faire, c'est raté.

Seiran blêmit d'un coup. Sa tête se baisse en signe de dépit.

— C'était de la folie de t'offrir à moi ainsi ! J'ai manqué de te tuer et j'espère que ça te servira de leçon. Ne te présente plus jamais à moi au retour de mes absences, encore moins après une purification !

Là encore, ce discours n'est pas accueilli de la manière attendue. À défaut d'en traduire l'angoisse éprouvée par le vampire, l'onmyōji n'en tire que le reproche de son erreur. Une boule se forme dans sa gorge.

Temet Nosce (Les Chroniques de Sorohar - T4) [MM/BL/Yaoi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant