Chapitre 9

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21 octobre 1348


Au goût de Seiran, l'aube est venue trop tôt. La tête emplit de ses souvenirs merveilleux de la veille, il n'a cessé d'espérer que le temps s'arrête depuis la fin de ses ébats avec Valoïs. Ébats qui se sont finalement étendus du matin jusqu'au crépuscule, moment où son amant a assuré devoir s'absenter. Il aurait souhaité que, pour une fois, celui-là ne parte pas en vadrouille. Hélas, le vampire ne lui a rien cédé. À peine s'était-il lavé qu'il reprenait la chasse, mettant de côté tous leurs échanges et jeux du jour, le laissant seul dans le grand lit sans s'être lui-même reposé ne serait-ce qu'une petite heure.

Là que les premiers rayons menacent de chasser le voile noir du ciel, Seiran n'a plus le choix que d'accepter la fatalité. Dans son kimono noir, sur la pas de la porte du château, il se tient prêt à partir sans pour autant trouver le courage de pousser le battant de bois. À dire vrai, il guette pour la toute dernière fois le retour du maître des lieux avec l'espoir d'un adieu tendre entre eux.

Seulement, le petit renard qui se tient à ses côtés n'a pas tant de patience. Bras croisés, les yeux fermés, voyant le silence s'étendre entre eux sans un geste de la part de l'onmyōji, Zurui finit par initier la conversation.

— Pouvons-nous nous mettre en route ?

— J'aurais aimé saluer Val-sama une dernière fois avant de partir et le remercier.

— Penses-tu que ce soit un bien pour lui comme pour toi ?

Seiran hésite. Il ne sait que trop bien, pour l'avoir déjà vécu, ce que sont la douleur et la peine des adieux. Néanmoins, ses jambes refusent de bouger. Son cœur joue du tambour dans sa poitrine. Il veut ce dernier échange malgré tout.

— Je vois, soupire Zurui en se contentant de son silence.

L'attente se poursuit un court moment, jusqu'à ce que la porte s'ouvre sur Valoïs dont le visage, s'il tente de se faire de marbre, dégage un profond soulagement à découvrir que Seiran n'est pas encore parti. Le message passe d'ailleurs à la perfection car l'onmyōji y voit l'invitation qu'il espérait et se précipite dans ses bras pour l'embrasser.

De son côté, Valoïs y répond avec un enthousiasme qui n'échappe pas à Zurui. Le renard les observe s'enlacer, se presser l'un contre l'autre et lier leurs bouches dans un échange passionné auquel il ne se montre que peu réceptif. Il en veut à Seiran. D'avoir conquis le vampire et de l'avoir entraîné dans une histoire impossible. D'être trop humain ? Il en veut par ailleurs tout autant à son propre ami de ne jamais faire les bon choix. À terme, il y trouve assez de raisons pour se permettre d'intervenir.

— Bon, c'est quand vous voulez, les tourtereaux !

Il en reçoit un regard assassin de la part de son maître qui cède tout de même à s'y plier. Un échange furtif qui ne dure pas car il importe qu'il explique à Seiran la suite des opérations.

— Zurui va te ramener jusqu'à chez toi. Tu y seras d'ici ce soir. Pour ma part, j'ai encore une poignée de détails à régler. En dépit de cela, je tiendrai ma promesse et viendrai prêter main forte à ta cité dès demain. En revanche, sitôt l'affaire réglée, je sortirai de ta vie. Je repartirai et nous ne devrons plus jamais nous revoir, tu m'entends ?

Seiran avait beau s'y être préparé, l'entendre est un couteau lancé en pleine poitrine. Il se force à faire bonne figure mais, à l'intérieur, c'est tout son être qui saigne.

— Val-sama, je ne pourrais jamais...

— Tu dois m'oublier ! Nous sommes de deux mondes différents. Nos routes n'auraient jamais dû se croiser.

Temet Nosce (Les Chroniques de Sorohar - T4) [MM/BL/Yaoi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant