Chapitre 11

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23 octobre 1348


Tout le jour durant, Hanano n'a cessé de faire preuve d'effervescence. D'un côté, la cité s'est préparé à une nouvelle attaque si d'aventure les affirmations du dieu de la montagne s'avéreraient erronées ; de l'autre, le clan s'est attelé à préparer quelques festivités pour fêter dignement le retour à la paix en cas de victoire décisive. Concentrées à la porte nord, fébriles, les cinq clans guettent ainsi l'heure fatidique qui leur apportera confirmation.

Après trois longues heures d'attente, la conclusion tombe. Si les attaques yōkai ont toujours été d'une diabolique ponctualité, rien ne semble vouloir venir. Pas l'ombre d'une présence ; pas même un froissement de feuilles. Aokimori paraît jouir d'une rassurante tranquillité.

Encore une heure de patience réservée à une assurance que tout danger est désormais écarté, puis Senri finit par avancer au beau milieu de ses troupes, prenant le risque de dépasser les unités de première ligne. Son regard averti scrute une ultime fois les environs tandis qu'il use de son pouvoir pour analyser toute présence spirituelle aussi éloignée soit-elle mais rien, là non plus. Si bien qu'il finit par se tourner vers les siens, le visage serein et assuré.

— Au regard de ce que nous pouvons attester, je crois pouvoir dire que notre citadelle est bel et bien sauvée. Et puisqu'il semble qu'aucune attaque n'aura lieu cette nuit, j'autorise les festivités à se tenir dans l'instant.

Le chef du village ne pouvait pas annoncer meilleure nouvelle. Les cris de joie éclatent aux alentours ; des armes se brandissent en signe de victoire. Sous peu, l'ordre de repli est donné et les guerriers quittent la porte pour retrouver leurs familles sur la place centrale, face à la demeure Kirin. Toute la ville s'y retrouve ainsi réunie, à la lumière des lampions, des torches et des lucioles.

Pour l'occasion, saké, buffet géant et divertissements ont été prévus. La foule se retrouve bientôt assise à genoux sur de nombreux coussins préparés à cet effet, servie par des dizaines et des dizaines de serviteurs s'activant au mieux pour contenter tout le monde. Certains regroupements ont lieux entre dirigeants ou membres de clans mais tous restent tournés en direction de Senri qui préside le rassemblement et s'impatiente d'être rejoint par son jeune frère une fois encore tenu à l'écart de toute stratégie défensive de la ville.

Seiran finit enfin par daigner se montrer. Encadré de quatre servantes, il fend la masse pour retrouver son aîné auprès de qui il vient s'installer en silence. Pas un salut, pas un sourire ; ce qui a tôt fait de contrarier ce dernier.

— Que t'avais-je dit, Seiran ?

— De parader tel un paon et de faire bonne figure ?

Senri fronce les sourcils. Il s'apprête à le remettre en place mais Seiran poursuit :

— Je n'ai pas oublié et c'est ce que je vais faire. Toutefois, il ne me semble pas que le contrat impose de moi que je sois aimable en privé.

— Ne joue pas à ça avec moi, otōto ! Tu as plus à perdre que moi.

Comment l'oublier ? Senri s'est montré très clair à ce sujet. Seiran doit se forcer à se calmer en dépit de la pression qui monte en lui.

— Tu aurais pu mettre ce somptueux kimono qu'Otōsan t'avait offert, le bleu et blanc. D'autant qu'Himawari est là, dans ses plus beaux atours. Un effort de ta part aurait été appréciable, étant donné que j'attends de toi que tu ailles la courtiser.

Si l'intéressé ne répond pas, son regard noir le fait pour lui. Ce n'est, hélas, pas suffisant à impressionner Senri.

— Vas-y ! ordonne-t-il. Fais honneur aux Kuruizaki et reçois avec dignité les félicitations des Yokan pour ce soutien qui nous a été accordé grâce à toi.

Temet Nosce (Les Chroniques de Sorohar - T4) [MM/BL/Yaoi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant