Une fois de retour dans la suite, elle semble deux fois moins grande que lorsque nous sommes arrivés et je suis sûre que cela a à voir avec le fait que nous sommes sur le point de nous débarrasser de nos vêtements pour aller dormir. Et je n'y suis pas prête.
Ethan laisse tomber son portefeuille et sa carte magnétique sur le comptoir. Je jure qu'en atterrissant sur le marbre, ils font autant de bruit que deux cymbales qui s'entrechoquent.
– Quoi ? lance-t-il en réponse à mon sursaut exagéré.
– Rien. Juste. (Je désigne ses affaires.) La vache.
Il me dévisage pendant un long moment avant de sembler décider que ma remarque n'est pas digne
de son attention, et il se penche pour retirer ses chaussures près de la porte. Je traverse la suite, mes pas crissent sur le tapis comme des bottes dans un champ d'herbe à hauteur de genou. Est-ce une plaisanterie ? Chaque son est-il amplifié ici ?
Et si j'ai besoin d'aller aux toilettes ? Vais-je devoir faire couler l'eau de la douche pour étouffer les bruits ? Et s'il pète dans son sommeil et que je l'entends ?
Et si je pète dans mon sommeil ?
Oh, Seigneur !
Je le suis dans le couloir et j'ai l'impression de marcher vers une mort certaine. Une fois dans la
chambre, Ethan se dirige vers l'une des commodes sans un mot et je vais vers l'autre. On dirait la routine tranquille d'un couple marié, rendue hyper-gênante par le malaise ambiant et le fait que nous soyons sur les nerfs.
L'énorme lit se dresse comme une guillotine entre nous.
– Je ne sais pas si tu as remarqué, mais il n'y a qu'une seule douche, dit-il.
– Ouais, j'ai vu.
Au contraire de la salle d'eau, seulement dotée d'un petit lavabo et de toilettes, la salle de bains de
la chambre est grandiose. La douche est aussi grande que ma cuisine de Minneapolis et on pourrait facilement envisager d'équiper la baignoire d'un plongeoir.
Je fouille dans mon tiroir en priant pour que, dans la précipitation post-mariage apocalyptique, je me sois souvenue de prendre un pyjama. Ce qui me fait réaliser la quantité de temps que je passe en sous- vêtements chez moi.
– Tu la prends le soir, en général ? me demande-t-il.
Je me tourne dans sa direction.
– Euh, pardon ?
Ethan soupire profondément, comme un vampire qui souffrirait le martyre depuis des siècles. – Ta douche, Oscar !
– Oh. (Je serre mon pyjama contre moi). Oui, je me douche le soir.
– Tu veux y aller la première ?
– Dans la mesure où je vais dormir dans la chambre, pourquoi ne commencerais-tu pas ?
De peur de lui sembler trop généreuse, j'ajoute :
– Comme ça, tu débarrasseras le plancher plus rapidement.
– Tu es tellement attentionnée !
Il me passe devant en direction de la salle de bains, la porte se referme derrière lui dans un clic
sonore. Même si les portes du balcon sont closes, je perçois le ressac de la marée qui monte, des vagues qui s'écrasent sur la berge. Mais le bruit des vagues n'est pas assez fort pour couvrir le froissement des vêtements qu'Ethan retire et laisse tomber sur le carrelage, ses pas lorsqu'il avance vers la douche ou le grognement léger qui lui échappe lorsqu'il se glisse sous le jet d'eau chaude.
Les joues écarlates, je trottine immédiatement vers la porte du balcon et reste dehors jusqu'à ce qu'il finisse. Honnêtement, je n'aurais envie d'écouter ça que s'il se noyait sous la douche.
JE SUIS SÛRE QU'ETHAN ADORERAIT m'entendre dire que la nuit a été interminable et que j'ai à peine fermé l'œil, mais le lit est incroyable, putain. Désolée pour le canapé, mec.
En réalité, je suis tellement reposée et redynamisée que je me lève convaincue que nos rencontres fortuites avec des gens de la vie réelle ne sont pas une catastrophe. Il n'y a pas de problème ! Nous n'avons aucun problème ! Sophie et Billy n'ont pas plus envie de nous revoir que nous et, quoi qu'il en soit, leur chambre se trouve probablement de l'autre côté de l'hôtel. En outre, les Hamilton partent aujourd'hui. Nous sommes tirés d'affaire.
Mais, bien sûr, il a fallu que nous tombions sur eux sur le chemin du petit déjeuner. Apparemment, nos liens se sont sérieusement renforcés hier soir : ils nous serrent dans des câlins étroits... et nous donnent leurs numéros de portable personnels.
– J'étais sérieuse quand je parlais du club des conjoints, dit Molly à Ethan sur un ton de conspiratrice. Nous nous amusons bien, si tu vois ce que je veux dire. (Elle lui adresse un clin d'œil.) Passe-nous un petit coup de fil à ton retour.
Ils se tournent vers le comptoir de la réception et nous leur faisons signe tout en jouant des coudes pour nous frayer un chemin en direction du restaurant. Ethan se penche et marmonne dans sa barbe :
– Je n'ai vraiment aucune idée de ce qu'elle voulait dire quand elle a parlé de s'amuser.
– Ça pourrait être innocent, du genre, des épouses qui se réunissent pour boire un verre et se plaindre de leurs maris. Ou ça pourrait être plus osé, comme dans Beignets de tomates vertes.
– « Osé comme dans Beignets de tomates vertes » ?
J'acquiesce d'un air sombre.
– Un groupe de femmes qui observent leurs lèvres avec des miroirs de poche.
Ethan semble lutter contre l'envie de sprinter dans l'allée pour se jeter dans l'océan.
– Je crois que tu apprécies un peu trop la situation.
– Seigneur, je suis complètement détraquée, n'est-ce pas ? Apprécier Maui !
Nous nous arrêtons devant l'hôtesse, donnons notre numéro de chambre et la suivons en direction
d'une alcôve au fond du restaurant, tout près du buffet. Je glousse.
– Un buffet, chéri ! Ce que tu préfères.
Une fois assis, Ethan – qui n'a apparemment pas aussi bien dormi que moi – parcourt le menu d'un air critique. S'il pouvait y mettre le feu par la force de son esprit, il le ferait. J'avance vers le buffet et remplis mon assiette de morceaux géants de fruits tropicaux et de toutes sortes de viandes grillées. Lorsque je reviens, Ethan a apparemment commandé à la carte et tient une grande tasse de café dans ses énormes mains. Il ne se rend même pas compte que je suis revenue.
– Salut.
Il grogne.
– Avec toute cette nourriture à disposition, tu commandes à la carte ?
Il soupire et répond :
– Je n'aime pas les buffets, Olive, pour l'amour du ciel. Après ce dont nous avons été témoin il y a
deux jours, j'aurais pensé que tu partagerais mon avis.
Je croque dans un morceau d'ananas et suis ravie de le voir grimacer lorsque je commence à parler
la bouche pleine.
– C'est juste pour t'embêter.
– Je vois ça.
Seigneur, il est de si mauvais poil le matin.
– Mais sérieusement, tu crois que j'apprécie trop ces vacances ? Est-ce que tu t'entends ?
Il repose prudemment sa tasse, comme s'il devait faire appel à toute la force de sa volonté pour ne
pas s'en servir comme un projectile.
– Nous nous en sommes bien sortis hier soir, déclare-t-il calmement. Mais la situation s'est
drôlement compliquée. Mon ex-copine – avec qui j'ai plusieurs amis en commun – pense que nous sommes mariés. La femme de ton nouveau boss veut faire des trucs de fille avec moi.
Je le coupe :
– Ce n'était qu'une hypothèse. Il se peut que la version qu'à Molly de l'amusement soit plutôt du genre réunion Tupperware.
– Tu ne trouves pas que c'est compliqué ?