Chapitre 11.1

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𝘚𝘈𝘕𝘎 𝘌𝘛 𝘊𝘖𝘕𝘛𝘙𝘌𝘚𝘈𝘕𝘎
└                                     𝙏𝙝𝙚𝙖

Je ne vais pas le nier, les taches de sang m'ont donné le tournis. 

Elles sont sorties de nulle part comme pour nous effrayer. Ça a bien marché sur moi. Et, à la vue des regards écœurés d'Esther et Ruben, c'est aussi leur cas. Certes, on n'a trouvé aucune poubelle dans cette forêt, mais la route est à seulement un kilomètre. Le gros dégueulasse incapable de jeter ses ordures au bon endroit aurait pu faire un effort.

Sauf s'il ne pouvait pas.

Impossible de savoir à quoi ils pensent. Esther ne dit pas un mot et Ruben triture les lingettes avec un bâton comme si c'était un rat mort. En silence, on l'observe attraper avec brio le tissu si imbibé de sang que des gouttes se déversent sur la terre... et sur sa chaussure.

Il sursaute, mais finit par rapprocher sa main tremblante de l'unique partie blanche.

— Tu devrais pas y toucher, lâche Esther.

Le silence est rompu.

Ruben s'arrête pour se retourner vers elle.

— Et tu voudrais en faire quoi ?

— Je sais pas, répond-elle en tapant un petit cailloux avec sa basket. Il faudrait juste s'en débarrasser, vous pensez pas ? C'est un peu dégueulasse et ça me donne la gerbe, désolée.

Je pense qu'on est tous d'accord sur le fait qu'on ne peut ni le laisser là, ni y toucher à mains nues. Pourtant, je ne vois pas d'autres options pour l'emporter avec nous. On se regarde tous en silence en se demandant qui se sacrifiera pour le groupe. Puis, au bout d'un moment, je déglutine, prend mon courage à deux mains et approche mon bras du sommet du bâton d'où gît le tissu cramoisi, avant que Ruben ne me bloque dans mon élan. 

— Tu sais quoi ? J'ai une idée. T'as pas à toucher ça.

Intérieurement, je le remercie un million de fois, même s'il n'y a qu'un simple "merci" qui sort de ma bouche.

— Rassemblons pleins de feuilles, des grandes surtout. On enveloppera la lingette dedans et je la mettrai dans ma poche.

S'ensuit une chasse au trésor pour créer une sorte de coquille étanche planquée dans la poche de Ruben. Après le sang, on retourne à contresens, vélos à la main, sans savoir qu'à quelques mètres de nous se trouve le lac.

Il faut dire que le retour est bien moins joyeux que l'aller. Ruben ne se surpasse pas et ne pilote plus à merveille mon vélo, il se contente de marcher à côté de nous. Esther n'est plus une fusée qui chante à tue-tête, elle semble même essoufflée. Quant à moi, je n'arrête pas de penser à ce qu'on a trouvé sur le sol. À qui est-ce que ce tissu appartenait ? Tout semblait si... récent.

PÊCHE CRAMOISIEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant