Le Journal De Bord D'un Gars Paumé

Le mort

Mes yeux s'ouvrent. Doucement. Millimètre par millimètre. Au plafond, un globe baigne la salle de sa douce lumière blanche.
Je suis étendu sur un lit d'hôpital. D'un court pivotement de la tête, qui me fait un mal de chien, j'observe la machinerie, reliée à mon corps par un enchevêtrement de câbles de toutes les couleurs. Une sorte de pompe fait circuler quelque chose dans mon estomac, tandis qu'une autre, faisant un ronronnement bruyant, fait ressortir une matière étrange de mes intestins. Un écran vert, séparé horizontalement en deux par une ligne rouge, émet un bip toute les dix secondes environs.
La pièce est carrelée de carrés de chocolat coulant. D'un mouvement de doigt, j'en décroche une petite once, et la met dans ma bouche. Le goût est à la fois amère et acide, ma esprit a aussitôt fait le lien avec un truc chimique mauvais pour la santé... Le petit bruit me fait reprendre surface. Il me semble, d'après les quelques séries télévisées que j'ai vues, que cet écran devrait indiquer mon rythme cardiaque, mais c'est comme s'il indiquait que je n'en avais pas... Après de vagues réflexion, je suis du regard les fils du capteur, et voit un bidule pendouiller au dessus de ma tête... Le problème est résolu.
Qui m'a sauvé ? Quelqu'un m'a-t-il sauvé ?
Il n'y a qu'un moyen de savoir : je décide de me lever. Ce n'était peut-être pas ma meilleure idée, puisque je m'affale par terre, au pied du lit.
Je ne peut pas bouger mes jambes. Alors je rampe vers la porte. Arrivé en face, mon regard se fixe sur la clenche... Comment l'actionner ? Je suis allongé un mètre plus bas...
Des pas. En faisant mes mouvements de bras les plus grands et synchronisés possible, je tente de retourner à mon couchage. Manque de temps, la porte s'ouvre lentement, donnant sur une fille aux courts cheveux bruns, qui me regarde d'une façon à la fois moqueuse et hébétée.