Chapitre 6

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— Arty, quelqu'un est mort ? demande Astrée en s'installant près de moi, une main sur ma cuisse.

Je secoue doucement la tête et ouvre plusieurs fois la bouche tel un poisson hors de l'eau sans pouvoir leur dire ce qui me travaille. Quand Asia dépose un verre face à moi, j'en bois la moitié d'une traite et lance la voix enrouée.
— J'ai embrassé Maxime...
— Tu as quoi ? s'époumone Astrée des yeux ronds comme des soucoupes.
— Ne m'oblige pas à le répéter, c'était assez gênant pour moi sur le moment. Et le pire vous savez ce que c'est ? Je questionne mes deux amies du regard. C'est qu'une fois prête à partir je lui ai dit « On se revoit bientôt, c'était sympa ».
 Je me remémore ma fuite honteuse de l'appartement en laissant Max en plan sans lui donner la moindre explication, si ce n'était que je devais rejoindre les filles.
— Tu lui as véritablement dit « c'était sympa » ? Demande Astrée.
— Ce n'était vraiment pas l'idée du siècle, me répond sa sœur sans se détacher de l'écran de son ordinateur où mon contrat de travail attend d'être imprimé.
— Merci pour l'info. Je raille en roulant des yeux, ce qui les fait pouffer.
 Je connais Astra et Asia depuis la naissance, leurs pères étant les meilleurs amis de ma mère et de celle d'Athéna, nous sommes vite devenues inséparables. Nos parents se sont tous donné le mot pour que leurs premiers enfants aient le prénom d'un ou d'une déesse. Par chance j'ai échappé à Aphrodite grâce à Apollon.
— Tu l'aimes ? Ou tu étais juste en manque ?
— Asia !

 Astrée foudroie Asia de ses iris sombre et cette scène me fait rire. Les filles ne se ressemblent aucunement, pour la simple raison qu'elles ont toutes deux été adoptées. Asia vient du japon, comme le confirment ses traits fins et ses jolis yeux bridés, quant à Astrée, ses pères ont voyagé jusqu'en Polynésie. Malgré ça, pour elles ainsi que toutes les personnes les connaissant, elles sont et resteront sœurs. Tout comme leurs parents seront toujours mes oncles préférés, et ce même si aucun lien ne nous relie.

— J'en sais rien en fait. J'adore Max, vous êtes au courant toutes les deux, mais je ne suis pas certaine d'envisager une relation avec lui. À chaque fois, j'aurais bien trop peur de tomber sur Flavien.
 Surtout que je n'ai pas ressenti les fameux papillons dans le ventre, tout ça, tout ça... Mais je me garde bien de leur dire.

— Et ce n'est pas du tout ce que l'on veut. Enchérir Asia tout en lançant l'impression.

Je secoue la tête pour éloigner toutes les images de mon ex qui m'assaille dès que je repense à lui, à nous...

— Bon, reprend Astrée, bien décidé à ne pas s'épancher sur ma vie que ce soit sexuel, amoureuse ou passé. Parlons de tes horaires et de ton poste. Tu seras des après-midis, Asia du matin et je serais en renfort toute la journée au cas où. Le salon de thé n'est pas ouvert à l'heure du déjeuner pour le moment, donc tu commences à treize heures trente jusqu'à la fermeture, à dix-neuf heures. Tu seras chargée du service ainsi que de la préparation des bubble teas et des thés chauds. Mais tu as l'habitude depuis le temps que tu nous épaules.

Mon amie m'offre un clin d'œil, rayonnante. Il est vrai que depuis l'inauguration de leur salon de thé « Mochi & Tea House » je vais régulièrement les aider. J'adore tellement le contact avec la clientèle et rire avec eux. Et puis, je connais chaque recoin par cœur, chaque recette de boissons et j'aime qu'Astrée me laisse carte blanche pour en inventer de nouvelles. J'ai hâte d'annoncer enfin la nouvelle à mes proches et de me lancer dans ma recherche d'appartement. J'ai pris goût à l'indépendance et à la tranquillité bien vite et revenir au domicile familial est un fléau pour moi. Non pas, car que je retourne dans les jupes de ma mère ou que je suis obligée de partager la salle de bain avec April ou Apollon, mais parce que je croise mon père bien trop fréquemment.

— Ah, et prend un livre avec toi ou ton carnet de croquis Arty. Le creux entre treize heures et quinze heures est souvent mortel.

J'opine de la tête tout en notant sur un pense-bête toutes les choses que je ne dois surtout pas oublier lundi après-midi. Alors que je suis plongée dans mes pensées, mon téléphone portable se met à vibrer, ayant coupé la sonnerie après avoir fui l'appartement de Maxime. Distraite, je lance un rapide coup d'œil en imaginant que ce doit être quelqu'un de ma famille, Athéna ou Max qui répond à mon SMS d'excuse, mais l'angoisse me saisit à la gorge. Pétrifiée, je n'arrive pas à réagir face aux filles qui me bombardent de questions.
— Artémis ! Qu'est-ce qu'il se passe ? Les deux mains aux ongles manucurés rose et or de mon amie s'agrippent à mes épaules tout en me secouant pour me sortir de ma terreur.
— Oh, le salaud ! s'exclame Asia après avoir contourné le canapé pour se placer dans mon dos. Mais il n'est pas humain, ce con !
— Asia ! Mais arrête de jurer bon sang et montre-moi ce qu'il...

Astrée n'a pas le temps de finir sa phrase que sa sœur tourne l'écran dans sa direction, ses yeux se voilent de colère et ses poings se resserre et se relâche tout en lisant le SMS de mon ex. Flavien m'a envoyé une photo de notre ancien appartement, ou plus précisément de la chambre que nous avons partagé durant une année. Il est allongé et dans derrière lui je distingue une chevelure épaisse et noire qui coule le long d'un dos féminin. Pour être sûr de me briser un peu plus mon petit cœur, il y a joint un texte.

« Regarde comme on était heureux tous les deux, ma biche. Reviens-moi, j'ai fait une erreur et je ne recommencerais plus. Je t'aime, ne l'oublie pas. »

— Il ose te dire qu'il t'aime en plus. Astrée claque sa langue contre son palais et se détourne de l'écran pour me prendre dans ses bras.

— Il a une drôle de façon de te le montrer dis donc.

Asia verrouille mon smartphone et me le rend, je ne me donne pas la peine de lui répondre ce serait avouer qu'il a encore de l'importance pour moi ou pire de l'emprise. Or, ce n'est plus le cas depuis ce fameux jour...

Et si...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant