Chapitre 8

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Ils avaient pris leur temps pour rentrer, parcourant le parc dans lequel ils jouaient enfants, flânant dans les rues arborées. C'était agréable de faire une pause, d'oublier le bordel dans lequel ils étaient, même s'ils restaient tous les deux silencieux. Cela aurait été un exploit pour Stiles en temps normal, mais entre la fatigue et la culpabilité de sa confession, il ne savait plus quoi dire. Mais finalement, c'était peut-être de ça dont ils avaient besoin tous les deux : du silence et du temps.

Ils ne rejoignirent le studio de Styles qu'au coucher du soleil. Isaac n'y était jamais venu mais ne fut pas surpris par l'aspect général de l'endroit : très peu de décorations, mis à part les photos aimantées sur le frigo, les étagères pliant sous le poids des livres, les tableaux de liège remplis d'informations divers, le bureau couvert de feuilles volantes, de post-it et d'un ordinateur portable, la cuisine minuscule, le large lit posé dans le coin de la pièce. Fonctionnel mais confortable.

- Désolé, c'est un peu bordélique. J'ai pas l'habitude de recevoir du monde.

Isaac se contenta de hocher la tête pour toute réponse. Il posa la pizza qu'ils avaient achetée sur le comptoir de la cuisine et fit glisser son sac près du lit.

- Tu sais, je comprends pourquoi tu as fait ça. Je ne t'en veux même pas. Si les rôles avaient été inversés, j'aurais peut-être fait pareil.
- Moi, je m'en veux...
- C'est juste que... j'ai toujours cru que tu t'étais éloigné parce que je n'étais pas assez bien pour toi...
- Quoi ?! Non, c'est pas du tout ça, ça n'a jamais été ça...

Stiles était complètement incrédule face à cette révélation. Il avait toujours vu le loup comme quelqu'un de sûr de lui, de cool, imperméable aux critiques. Il faut croire qu'il n'était pas aussi fin psychologue après tout.

- Et vu ta réaction tout à l'heure avec Deaton, j'ai cru que c'était toujours ce que tu pensais, que tu étais déçu...
- Non, je te jure, c'est tout le contraire !

À bout d'argument, Stiles entraîna Isaac vers son lit, le força à s'asseoir et s'installa à califourchon sur ses jambes. Il le serra dans ses bras tout en posant son visage dans le cou du loup. Il resta quelques instants dans cette position avant de se mettre à chuchoter.

- Je suis tellement désolé de t'avoir blessé à ce point... J'ai été un gamin lâche et stupide.

Il se redressa et regarda le loup dans les yeux. Il voulait qu'il comprenne, qu'il lui pardonne.

- Tout à l'heure, avec Deaton, j'étais sous le choc. Pas parce que tu n'es pas assez bien, mais parce que je n'arrivais pas à croire en ma chance. Avec toutes les merdes qui nous sont arrivées, pour une fois, la solution à nos problèmes est ce que j'espérais le plus au monde.

Il voyait bien que Isaac ne voulait pas le croire, qu'il hésitait à lui faire pleinement confiance sur ce sujet.

- Tu l'entendrais si je mentais, non ? Est ce que je mens ?
- Non...
- Et tu le sentirais si c'était de la pitié, non ? Est ce que tu sens autre chose que de la sincérité venant de moi ?
- Non...
- Alors laisse-moi te le redire : tu es assez bien, tu es beaucoup plus que ça. Tu es parfait pour moi.

N'obtenant toujours aucune réponse, Stiles continua sur sa lancée.

- Tu es extrêmement séduisant.
- ...
- Ton sourire est à tomber.
- ...
- Ton corps est magnifique.
- ...

Isaac ne répondait pas, mais ses yeux ne quittaient pas ceux de Stiles. Un sourire naissait doucement sur ses lèvres et Stiles commençait à sentir qu'il rougissait petit à petit.

- Tu es drôle.
- ...
- Tu es gentil.
- ...
- Tu es intelligent.
- ...
- Tu es loyal.
- ...
- Tu peux être féroce.
- ...
- Et j'ai très envie de t'embrasser maintenant

Ils se regardaient toujours dans les yeux, figés, dans l'attente. Finalement, c'est Isaac qui s'avança. Doucement. Vraiment très doucement. Il frôla à peine les lèvres de Stiles et se recula aussitôt. Il souriait toujours et regardait Stiles avec tant de tendresse que celui-ci eut l'impression de fondre sur place. Un deuxième baiser, puis un troisième, toujours aussi doux et léger.

- Toi aussi, tu es très beau.

Stiles hocha la tête négativement, puis se cacha le visage entre ses mains, gêné.

- Je te l'ai déjà dit ce matin, mais tu ne m'as pas cru. Alors je te le redis, tu es très beau.

Stiles se redressa doucement et plongea ses yeux dans ceux de son loup. Il y chercha la moindre trace de moquerie, sachant au fond de lui qu'il n'en trouverait aucune. Il s'avança alors pour l'embrasser à son tour. Un baiser léger, puis un deuxième. Le troisième, plus appuyé, fit se rencontrer leurs langues. Il pouvait sentir les larges mains d'Isaac parcourir son dos, alors qu'il enfonçait ses doigts dans la chevelure du bouclé. Il rêvait de faire ce simple geste depuis si longtemps...

Leurs bouches finirent par se séparer, mais gardèrent leur position encore quelques instants, profitant simplement de ce contact souvent espéré. Ce fut le grondement émis par le ventre de Stiles qui finit par faire éclater leur bulle.

- Allez, il est temps que je te nourrisse !

Avec un léger appui sur ses jambes, Isaac se leva, emportant Stiles, qui était toujours installé sur ses genoux.

- C'est quand même vachement pratique de sortir avec un loup !
- Sortir avec un loup ? Je ne suis pas un garçon facile, moi, Monsieur !
- Vous faudrait-il une demande officielle ?

- Mais bien entendu !

- Dans ce cas, Monsieur Lahey, me feriez vous l'insigne honneur de devenir mon petit ami ?

- Avec plaisir Monsieur L'adjoint Stilinski.

Toujours avec la même facilité, le loup posa enfin le jeune homme sur le comptoir de la cuisine et vint s'installer entre ses jambes, naturellement, comme si c'était la place faite pour lui.

En un sens, la taille restreinte de la pièce jouait en leur faveur. Tout était plus ou moins à portée de mains pour Isaac : le frigo d'un côté, la boîte de pizza ouverte de l'autre côté. Ils purent ainsi reprendre le ballet qu'ils avaient commencé le matin dans le loft, tout en discutant de choses légères durant leur repas. Ils n'avaient pas à s'écarter d'un centimètre l'un de l'autre pour saisir une part de pizza ou attraper leur verre de soda.

Malgré leur proximité, Isaac semblait manquer de quelque chose.

- On a fait plus romantique qu'une pizza mangée à même la boîte...
- Romantique ?
- Avoue, c'est quand même pas très sexy comme rencard...
- Un rencard ? Oh non non non, crois moi, quand tout ça sera réglé, je t'emmènerai à un vrai rendez-vous, romantique ET sexy!
- Un vrai rendez-vous !? Avec le seul et unique Mieczyslaw Stilinski !? Mon rêve !
- Qu'est ce que tu as dit ?
- Oh mon dieu ! La tête que tu fais! C'est ton propre prénom qui te met dans cet état ?
- Sérieux ! Presque personne ne le connaît, et encore moins arrive à le prononcer!
- Ton père me l'a appris, l'après-midi où j'étais venu jouer chez toi... Il me l'avait répété plusieurs fois. Il l'avait même écrit, mais ça n'a pas vraiment aidé...
- Et tu t'en souviens encore, 15 ans après ?
- Au risque de paraître complètement niais et fleur bleue... oui... Il se pourrait que j'aie continué à m'entraîner, au cas où...
- Au cas où quoi ?
- Je sais pas. Juste au cas où... Et j'ai bien fait, on dirait
- On dirait bien, oui

Le sourire de Stiles à ce moment-là valait tout l'or du monde.

MalédictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant