Et si Wendy n'existait pas

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Je pensais échapper à tes silences, à me croire au-dessus de tes larmes, ce grand vacarme. J'avais erré longtemps entre les mondes comme un ange perdu qui aurait trouvé refuge dans un coin de ton cœur. Le jour où je t'ai vu. C'était un lundi. Il y avait dans ton regard la peur et la beauté de l'enfance, un émerveillement quotidien comme une flamme ouverte sur un monde nouveau, un univers inconnu qu'aucune carte n'aurait jamais référencé. Ce monde en toi c'était mon exploration à moi, une aventure où chaque page du calendrier serait une pièce d'un puzzle, celui de ton cœur éparpillé, comme si quelqu'un l'avait brisé. Peut-être même étais-tu née comme ça, avec cet espoir de rencontrer celui qui relierait toutes ces parties de toi. Celui qui trouverait la route pour te sortir de ce labyrinthe et de la noirceur de tes pensées, de ces nuits sans fin dans lesquelles tu te perds parfois.

C'était moi Peter Pan.

J'étais cet ange déchu dans un monde qui ne voulait pas de lui. Je volais jour et un nuit, comme un prince invisible, que tout le monde aurait oublié. Et puis je t'ai trouvé comme un point lumineux dans ma destinée, une lueur qui s'est allumée, un nouvel espoir, l'éternité. D'étincelle en étincelle j'ai cherché à exister. Tu étais ce phare qui éclairait la route, une porte d'entrée vers cette terre que j'étais venu chercher. Telle était ma mission sur cette Terre, te retrouver dans l'immensité de ce monde, entre les ombres et les démons qui nous entourent, entre les tremblements de terre et les mines cachées sur mon chemin.

Je voulais juste te prendre la main et t'emporter entre les mondes comme deux conquistadors. Nous naviguerons entre terre et mer, nous serons l'aube et la lumière, l'éternité du jour nouveau. Toi et Moi sur ce grand échafaud. Sans ton sourire, je me sens plus fragile que Pinocchio sans Gepetto. Je sais que je pourrai finir comme lui, pendu aux branches d'un vieux chêne. Mais je sais qu'en un baiser, les choses pourraient s'inverser. Ton départ me rappelle qu'il y a des fleurs qui ne peuvent être cueillies, qu'il faut savoir accepter leur liberté. Voilà maintenant six mois que je suis sans nouvelles de toi. Je cherche dans ma mémoire le souvenir de nos baisers, de ceux qui aident à respirer. Je sens des larmes s'abattre sur le stroboscope des souvenirs. Il faut que je te retrouve comme si ma vie en dépendait elle aussi. Wendy, je reviens vers toi. Je viens combler l'inachevé, te kidnapper et peut-être même t'aimer.

Nous attendions les étoiles comme dans un monde en éventail qui s'ouvre et se replie, sur lui-même, à l'infini. Nous attendions les étoiles, là-haut perchés sur un nuage, en joue, figés par des archers d'amour blessé. C'est une apnée, un long baiser, de ceux qui aident à respirer comme un amour sauvé des eaux. Je voulais juste te retrouver et puis t'aimer. À moins que tu ne m'aies déjà oublié, comme si toute notre histoire n'avait été qu'un rêve, un souffle qui passe et qui s'efface.

Quelque chose a changé dans ton regard. Je vois que tu as bien grandi, aussi. Je m'accroche à ton sourire, à ce chat sur la lune, à cette voix qui chantait pour les enfants-perdus. Tu fermes les yeux assise dans le cockpit d'un bombardier qui vole dans un ciel de misère à travers les éclairs et les fards à paupières. Ses réacteurs sont en flammes, sa carlingue tremble de toute part. C'est bien plus grand qu'un incendie. Tu sais, il finira bien par exploser, mon bel amour.

Les Femmes AssassinesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant