Les nuages se faisaient insistants. L'air devenait froid, plus froid, l'atmosphère plus sombre.
Même le sourire de Silas ne rivalisait pas avec les géants gris du ciel qui menaçaient à chaque instant de fondre sur la terre dans une pluie intense.
Dans sa voiture, malgré son inertie, Auphelius avait pris soin d'allumer le chauffage pour préserver son trésor à cordes des caprices de la température qui ne cessait de descendre. Ça n'empêchait pas Silas de grelotter dans son sweat sale. Sa tenue aurait pourtant dû être adaptée à la saison, mais le ciel en avait décidé autrement. Se préparait une pluie d'été, particulièrement froide, et peut-être même un orage.
Auphelius déplia une carte de France immense sur ses genoux.
À cause du temps, peu de gens prendraient la route ce jour-là. C'était le moment idéal pour fuir. Et il comptait bien disparaître derrière des rideaux de pluie, pour toujours. À la base, le musicien avait décidé d'emprunter uniquement des petites routes, des chemins de campagne si discrets qu'on en oublie leur existence, et de partir le plus loin possible. Il n'avait pas prévu celui qui s'était glissé dans sa vie sans prévenir et avait réduit ses plans originels en poussière.
Désormais, il lui fallait trouver la plus grande ville à proximité.
C'était sa nouvelle solution, qu'il avait trouvé un peu à la hâte, le meilleur moyen pour que Silas puisse rentrer chez lui sans qu'il leur faille faire demi tour. Sur ses petites économies, Auphelius aurait bien quelques euros pour que Silas prenne le train. C'était sa nouvelle solution et sans doute la meilleure pour eux deux.
<< On va où, alors? >>
Silas étincelait. Les nuages disparurent un instant aux yeux du musicien, et d'un coup, il faisait beau à nouveau. Ce dernier hésita avant de répondre. Il ne se voyait pas annoncer la vérité, au risque de voir s'éteindre le soleil sur ce visage rayonnant. Silas ne souriait probablement pas souvent, et ses éclaircies n'avaient sans doute jamais été aussi douces et intenses. Auphelius ne pouvait pas lui enlever.
<< Je t'emmène manger en ville. >>
Puis, comme Silas ne réagissait pas, il ajouta avec un clin d'œil:
<< Tu choisis où.
- C'est pas un peu risqué d'entrer en ville...? >>
Si, ça l'était. Le musicien plia la carte, lentement, le temps de réfléchir. Là encore, un mensonge lui parut plus sûr, si le prix de la vérité était la pluie dans ces yeux d'anges qui le fixaient impatiemment.
<< Mais non... pourquoi, t'as peur ? >>
À ces mots, Silas leva les yeux au ciel en riant.
<< Pfff pas du tout. Après tout, c'est pas moi le hors la loi ici. >>
Auphelius rejoignit son rire en faisant mine d'être offusqué, et les nuages, jaloux de leur complicité, choisirent ce moment pour joindre leurs voix à celles des deux garçons. Comme prévu, il pleuvait. C'était le moment.
<< Bon, il va bientôt être midi. On va manger ou quoi? >>
Silas haussa les épaules, enjoué et se moquant bien de l'averse. Il faisait si sombre, pourtant, que ç'en était presque inquiétant, mais il n'y prêtait pas attention. Il regardait loin, bien plus loin par delà la vitre. Il observait, semblait-il quelque chose que d'autres yeux ne pouvait pas voir. Et il resta comme ça, silencieux, une minute ou deux.
Puis trois, et quatre, et Auphelius arrêta de compter et fini par se concentrer sur la route.
Il venait de découvrir une nouvelle facette de Silas. Pure, rayonnante, comme une lumière céleste. Mais ce fut alors, quand les sourires du garçon commencèrent à se raviver et que la douleur vide dans ses yeux se cachait, vacillante, derrière une lueur d'espoir, que le musicien se demanda à quel point il avait pu souffrir. Il l'avait entrevu, l'espace d'un instant, quand il l'avait détaillé pour la première fois.
Et maintenant qu'elle semblait absente, la douleur de Silas le questionnait plus que jamais.
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L'appel Du Vide
Teen Fiction" Silas 𝚊𝚟𝚊𝚒𝚝 dix-sept 𝚊𝚗𝚜, 𝚞𝚗𝚎 𝚊𝚜𝚜𝚒𝚜𝚎 𝚙𝚎𝚞 𝚐𝚛𝚊𝚌𝚒𝚎𝚞𝚜𝚎 𝚎𝚝 𝚞𝚗 𝚟𝚒𝚜𝚊𝚐𝚎 𝚛𝚎𝚖𝚙𝚕𝚒 𝚍'é𝚝𝚘𝚒𝚕𝚎𝚜. Auphelius 𝚊𝚟𝚊𝚒𝚝 𝚟𝚒𝚗𝚐𝚝 𝚊𝚗𝚜, 𝚍𝚎𝚜 𝚢𝚎𝚞𝚡 𝚛𝚎𝚏𝚕é𝚝𝚊𝚗𝚝 𝚞𝚗 𝚝𝚊𝚕𝚎𝚗𝚝 𝚒𝚗𝚏𝚒𝚗𝚒 𝚎𝚝 𝚞�...