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Passant devant Emmanuel, j'entrais dans le modeste salon de l'habitation : une pièce que je connaissais bien, pour y avoir passé plusieurs heures à refaire le monde avec Laurent.

À travers la fenêtre, le soleil de l'après-midi se faisait une place dans la pièce, baignant celle-ci de lumière et d'une agréable chaleur en cette saison hivernale. J'observais distraitement la table installée au milieu de la pièce, sur laquelle plusieurs livres de philosophie étaient disposés dans un enchevêtrement dont seul leur propriétaire devait avoir le secret.

- « Laurent n'est pas là ? », demandai-je en me retournant vers celui-ci.

- « Non, il m'a dit qu'il aurait un peu de retard. », m'informa Emmanuel qui venait de me rejoindre après avoir refermé la porte d'entrée derrière nous. « Je crois qu'il est avec son amie, Sandrine, tu sais ? », ajouta Emmanuel d'une voix suggestive.

Son sourire en disait long et j'esquissais moi aussi un sourire amusé. Nous en avions été témoins : ces deux-là se tournaient autour depuis plusieurs mois, il devait forcément y avoir un petit quelque chose entre eux. De plus, Laurent rougissait comme une tomate quand on lui parlait de la principale intéressée : il n'y avait donc pas beaucoup de doutes à avoir sur la question.

- « Mais tu peux rester ici à l'attendre autant de temps que tu voudras. », renchérit Emmanuel alors que nous arrivions au milieu de la pièce. « Je ne pense pas qu'il rentre tout de suite mais il devrait rentrer quand même : il a un examen important demain matin. », fit-il remarquer, semblant réfléchir à la question tandis qu'il passait une main dans ses cheveux épais aux reflets blonds. « Ça ne te dérange pas de rester en ma compagnie ? », me demanda Emmanuel en esquissant un sourire.

Il posait simplement la question par politesse car il savait que j'étais venue voir Laurent mais il savait bien que cela ne me dérangeait en rien : Emmanuel était mon ami et, bien qu'il n'était pas celui des deux frères que je connaissais le mieux, il était celui des deux que je connaissais depuis le plus longtemps.

- « Non, bien sûr, Emmanuel : ça ne me dérange pas du tout. », lui souris-je, ce qui eût l'air de le satisfaire.

J'aspirais en réalité à passer davantage de temps avec Emmanuel et étais ravie que l'occasion se présente aujourd'hui mais, cela, aucun des deux frères ne devait l'apprendre. Ni personne d'autre, d'ailleurs. Pas tant que je ne serais pas sûre de moi à ce sujet : je risquais d'attendre un bout de temps avant d'être certaine mais je préférais ne pas risquer quoi que ce soit, ne pas prendre le risque de gâcher une amitié...

Emmanuel me sourit de nouveau avant de débarrasser la table du salon, ordonnant les ouvrages à côté d'une pile de feuilles qui portait, je ne m'en rendais compte que maintenant, son écriture manuscrite.

- « Ok, ben tu peux t'installer là si tu veux : j'ai du travail à finir mais on pourra discuter comme ça ? », me proposa-t-il en m'indiquant la chaise en face de la sienne.

- « Oui, d'accord, je vais faire ça. En discutant, on fera peut-être venir ton frère. », blaguai-je.

- « Oui, voilà ! », rit-il. « Je vais me faire un thé : tu veux boire quelque chose ? », me demanda-t-il.

- « Euh, je veux bien un thé aussi. », acquiesçai-je. « Merci, Emmanuel. »

- « Mais de rien. », susurra mon ami en souriant avant de s'éloigner vers la cuisine.

J'attendais qu'il soit sorti de la pièce pour souffler discrètement, ne m'étant pas rendue compte que j'avais retenu ma respiration pendant tout ce temps. J'avais beau le connaître depuis plus d'un an à présent, la présence d'Emmanuel me faisait toujours le même effet. Sans parler de son sourire, de son éloquence... et de ses yeux bleus.

baby it's cold outside | Emmanuel Macron (christmas story)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant