7. Retrouvailles

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Le soleil se lève, marquant une nouvelle journée d'échec.


Cela va bientôt faire une semaine que je tente tant bien que mal de convaincre Marc de me laisser retourner en ville. Pour plus de désespoir, j'ai remarqué que depuis le début de la semaine, Marie m'évite comme la peste, tout comme Riley. Malheureusement pour Carson, lui n'arrive toujours pas à m'échapper, et ça me fout la rage de savoir qu'ils ne me veulent pas aux alentours.

Assis sur un rocher à l'extérieur du village j'observe les enfants jouer malgré l'heure matinale. Ici, peu importe l'heure, les enfants se lèvent avec le soleil et se couchent avec lui. Ça me tue de penser que si je ne la retrouve pas, elle ne pourra plus jamais courir avec eux.

J'observe la partie de chat en court, plongé dans mes pensées et les premières gouttes de pluie tombent, forçant les enfants à renter. Mon regard, lui, ne quitte pas le point fixe qu'il s'est choisi, bien que le froid du vent sur mes vêtements me donne froid.

- Tu ne rentres pas ?

Je tourne la tête vers l'adolescent qui me parle. Il n'est pas bien vieux, 16, peut-être même 17 ans. Il me rappelle moi quand je me suis engagé dans la défense du QG aux côtés d'Harry et de mon père. En me rendant compte qu'il attend encore ma réponse, je secoue la tête avant de lui répondre.

- Non, je vais rester encore un peu.

Il part, et mon regard se porte sur deux autres ados, adossés contre un mur en train de s'embrasser. Lentement, des souvenirs d'il y a cinq ans ressurgissent. Des souvenirs de mon frère, mais aussi de Léo. Surtout de Léo. Je me rappelle de la chaleur de ses bras quand je m'endormais avec lui. Du son de son rire quand Harry nous sortait une de ses blagues stupides. De son regard toujours posé sur moi lorsque j'entrais dans la pièce. Submergé par mes souvenirs, je détourne le regard et le repose sur l'horizon. Là, seul face aux montagnes et aux plaines, je laisse mes larmes couler. Pour la première fois depuis la trahison de ma famille, je me laisse aller.

Je perçois alors des bruits de pas derrière moi, mais n'y prête pas attention.

- Eli ?

L'entente de la voix me fit me crisper.

Impossible. Il ne peut pas être là.

- Eli c'est bien toi ?

Rapidement, je sèche mes larmes et me tourne vers cette voix si familière. Mon regard se fixe sur la personne en face de moi et mon corps entier se fige.

- Harry ?

Il s'avance vers moi et me prend dans ses bras alors que je reste figé. Je ne comprends pas. Je ne comprends pas comment il peut être là, comment il a survécu.

- Dieu merci, tu es vivant. Je l'entend murmurer

Toujours figé, les souvenirs de mon frère qui me jette dehors ressurgissent à leur tour. Je tente tant bien que mal de les refouler, mais ils continuent de m'ensevelir. Les souvenirs deviennent plus forts, plus insistants et la voix dans ma tête me dit de fuir. Qu'il va me trahir à nouveau. Qu'il n'a aucun droit d'être là, de me serrer dans ses bras alors que j'aurais pu mourir par sa faute. Mais je n'en fais rien, et au lieu de l'envoyer bouler, de lui hurler dessus, de l'insulter des pires noms, je me colle un peu plus à lui et pleure sans aucune retenue.

- Pourquoi ?

Ma voix est faible, tremblante de peur et de tristesse, mais il n'y fait pas attention.

Il se passe quelques secondes avant qu'il ne soupire et s'éloigne de moi.

- Honnêtement ? commence-t-il, par jalousie. Tu avais tout. Notre père t'aimait, tu étais presque marié, et tu étais le meilleur des soldats. À côté, moi j'avais rien. Donc par jalousie, j'ai prétendu que tu avais collaboré avec les Démons et que tu avais emporté Charlie...

Je le regarde et l'écoute sans l'interrompre. Ce qu'il vient de me dire n'est pas nouveau. Si je devais être honnête avec moi-même, je dirais que je le savais. Que c'est l'une des premières choses qui me sont venues à l'esprit quand je me posais mille et une questions. Quand mes nuits étaient constamment remplies de cauchemars. C'était logique. Il prend une inspiration et reprend :

- C'est quand l'équipe m'a récupérée que j'ai eu l'idée, alors j'ai inventé un mensonge gros comme une montagne, j'ai fait passer les incohérences sur le coup du choc. Je n'avais pas de remords après coup, mais quand j'ai vu Léo s'effondrer après que tu ais été banni, j'ai su que j'avais merdé.

Au fur et à mesure qu'il avance dans son récit, sa voix faiblit et son regard se baisse peu à peu vers le sol, mais il continue tout de même.

- Alors je leur ai dit, à papa et Léo. Je leur ai dit que tu n'avais rien fait, que j'avais tout inventé et pourquoi. Papa m'a pardonné, mais pas Léo. Maintenant, je m'en veux parce qu'il m'a sauvé, mais qu'il est resté là-bas. Il est peut-être mort à cause de moi...

En face de moi, mon frère fond en larmes, alors que je reste droit comme un piquet, toujours en choc de la scène qui se déroule sous mes yeux. Je ne lui réponds pas. Je n'arrive même plus à respirer. Je ne veux pas le croire. Je refuse. Même si je me suis fait à l'idée qu'il ai pu me faire ça, l'entendre le dire, l'approuver... Ce n'est pas la même chose.

Les minutes défilent et nous ne bougeons pas. Lui pleure, assit au sur le rocher où j'étais quelques minutes avant lui. Quant à moi, je reste debout devant lui. Je ne sais pas pourquoi, ni comment cette idée me traverse l'esprit, mais je me dis que peut-être. Peut-être qu'elle est avec eux. Peut-être que Mélissa est à la maison, en sécurité.

A cette pensée, mon cœur se met à battre plus vite. Il me reste encore un espoir.

- Harry ? Quand tu t'es enfui, tu n'aurais pas croisé une petite fille par hasard ? Sur le chemin jusqu'ici ?

Cette fois, la tristesse laisse place à la confusion.

- Non, pourquoi ? j'aurais dû ?

Cette phrase provoque en moi un vide, et pour la énième fois depuis le début de la semaine, une nouvelle fissure vient se loger dans mon cœur.

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⏰ Dernière mise à jour : Nov 18, 2023 ⏰

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