Le club des Interdits - 𝔅𝔩𝔞𝔠𝔨 𝔖𝔢𝔯𝔦𝔢𝔰 III

Chapitre XIX

Cygnus observait de l'angle de la salle Bellatrix se faire examiner par le médicomage. Ses mains potelées s'élevaient dans l'air comme si elle espérait attraper un jouet invisible. Elle observait tour à tour le médecin et sa mère, celle-ci debout à côté de la table d'examen, les traits tirés par l'inquiétude. Ses boucles blondes étaient assemblées en un chignon bas, lui donnant une allure stricte, accompagnées d'une robe et d'une cape noire et austère. Une Black en chair et en os, pour prouver à tout le monde qu'elle faisait partie intégrante de cette famille.

Il en eut un sourire attendri.

Le sourire de Bellatrix se transforma en une grimace quand le médicomage écarquilla ses paupières pour osculter ses yeux. Un premier pleur la secoua, mais aucune larme ne s'échappa. Son dos se convulsa brusquement et un cri aigu traversa ses lèvres.

— Voilà, ce sont ces genres de crises qu'elle fait, déclara Druella par-dessus le hurlement.

— Je vois, marmonna le médecin. Et c'est récent ?

Cygnus soupira tout en se pinçant le nez. Ils le lui avaient répété trois fois. Un Doloris infligé. C'était Druella qui l'avait annoncé rien qu'en passant la porte du cabinet, mais il n'avait pas cillé une seule fois, comme si rien n'était choquant.

— Depuis l'accident. Il y a un mois, affirma-t-elle patiemment.

Il lui avait dit que le personnel à Saint-Mangouste n'était pas compétent. Alphard leur avait proposé un médecin privé, le plus prestigieux d'Angleterre et s'était compromis à les aider pour les frais. Mais Druella avait fait la sourde oreille, répondant que les patients de l'hôpital étaient pris en charge plus rapidement. Visiblement, la rapidité ne faisait pas la qualité. Bellatrix continua de hurler et de se convulser. Pour lui, c'était plus qu'évident. Ce n'était qu'un bébé, mais elle revivait le moment où le sort l'avait frappée. Ça la marquerait peut-être à vie. Une vérité que Druella refusait d'entendre.

— Je peux lui prescrire du Vita dulcem, proposa le médicomage en reposant ses lunettes.

Cygnus sentit sa mâchoire se contracter. Druella ne connaissait certainement pas la nature de cette potion, car elle hocha la tête tout en enveloppant Bellatrix d'une couverture en soie. Ravi que cette mesure plaise, le médecin retourna à son bureau et commença à écrire sur un parchemin.

— Donnez cela à l'apothicaire du chemin de Traverse. Il vous fournira les instructions.

— Merci beaucoup, souffla Druella.

Elle prit Bellatrix dans ses bras, les lèvres étirées d'un sourire. Cygnus attrapa le menteau qu'il avait laissé sur le dossier de la chaise. Ils n'avaient fait que perdre leur temps ici. Bellatrix n'était pas malade, il n'y avait que le temps  qui pouvait l'apaiser. Ce n'était qu'un nourisson. Les enfants oubliaient vite.

— Au revoir, lança-t-il sèchement.

Druella s'apprêtait à prendre le parchemin mais Cygnus l'attrapa avant elle et le réduit en boule dans sa main. Le médicomage ouvrit la bouche en grand, choqué.

— Qu'est-ce que tu fais ! s'exclama-t-elle.

Il plaqua sa paume de main dans son dos et la poussa vers l'avant.

— Sors.

— Cygnus, laisse-moi récupérer le...

— Sors j'ai dit.

Avec Bellatrix dans les bras, elle ne pouvait pas se démener bien longtemps. Et elle n'était pas non plus du genre à tenir tête. Il claqua la porte du cabinet en ignorant l'appel indigné du médicomage. Il n'y avait pas grand monde dans le couloir, seulement une vieille femme et un homme qui toussait jusqu'à s'en arracher les poumons. Druella se retourna, le visage marqué par la colère.