Je n'ai jamais cessé de t'aimer

9. Amicus ad aras

Par miracle, Kylian se ressaisit et parvient à se remettre sur ses pieds, les mains d'Achraf à courte distance pour le rattraper si besoin. Le plus jeune le remercie d'un sourire sincère avant de disparaître dans la salle de bain adjacente et prend son temps sous la douche pour se remettre les idées en place et se reconcentrer sur la réalité. C'est comme si tous ses soucis s'écoulent avec l'eau qui ruisselle le long de son corps, quittant son esprit embrumé pour rejoindre les égouts. Il ne sait plus vraiment où il en est, ni ce qu'il veut, mais ce qu'il est sûr de ne pas vouloir, c'est créer des tensions dans l'équipe, parce que cette équipe, c'est tout ce qu'il a. Il le sait. Les négociations avec le Real ne se passent pas aussi bien qu'il le voudrait ; Paris ne veut pas le laisser partir et il peur que ça se transforme en incident diplomatique au vu des proportions que ça semble prendre. Il veut juste suivre son rêve et suivre les traces de son idole. Il a peine parfois à se rendre compte qu'il a le numéro de Zinedine Zidane, Zizou, son idole de toujours, avec qui il discute parfois.

Quand vingt-cinq minutes plus tard il descend dans son salon changé, Achraf est assit sur l'accoudoir du canapé, prêt à partir. Dès qu'il l'entend, il se lève sans un mot et presse son corps contre le sien, le tenant fermement mais tendrement.

"– Fait attention à toi, prends soin de tes sentiments parce qu'ils sont précieux" il murmure tout proche de son oreille. "Si jamais c'est trop difficile de le voir et l'avoir aussi proche, un regard suffira et je serai à tes côtés, d'accord ? Je suis sûr que Sergio sera là aussi parce qu'il a remarqué que quelque chose n'allait pas".

Kyian sourit, touché de la considération qu'Achraf lui témoigne. Parfois, il se demande pourquoi est-ce qu'il mérite un si bon ami dans sa vie, un frère qui est toujours là pour veiller sur lui et qui le comprend toujours.

"– Je suis sûr que tout se passera bien, je le sens" ajoute le Marocain en lui ébouriffant les cheveux.

"– Je te fais confiance" se contente de répondre Kylian en se détachant du corps de son meilleur ami.

Rapidement, ils se mettent en route pour le stade, tout juste dans les temps. Ils rient sur le chemin et chantent (un peu mal, il faut le dire) les refrains de leurs musiques préférées dans une cacophonie d'espagnol et d'anglais, les sentiments abîmés du plus jeunes totalement oubliés.

Quand ils arrivent, Kylian ne peut s'empêcher de chercher inconsciemment du regard son ex-petit-ami, rien que la simple pensée de cette appellation nouvelle envoie une décharge de douleur dans sa poitrine ; ex petit-ami. Achraf le remarque puisqu'il place sa main dans le bas de son dos, lui intimant gentiment d'avancer, mais surtout, le ramène à la réalité d'un simple geste, pourtant si anodin de l'extérieur.

En arrivant dans les vestiaires, Achraf et Sergio échangent un regard au-dessus de l'épaule du plus jeune qui ne se rend compte de rien, perdu dans son monde, les deux défenseurs ayant remarqué le mal-être du Français depuis plusieurs semaines. Un peu plus loin, les yeux de Marquinhos et de Leo sont aussi fixés sur le numéro sept. Si personne n'a abordé le sujet au sein de l'équipe, ne voulant pas se mêler d'affaires qui ne les concernent pas, ils savent tous que quelque chose ne va pas entre les deux attaquants, que quelque chose a changé et rompu leur amitié si fusionnelle. Leo et Achraf s'étaient blâmés de l'éloignement des deux amants, ils avaient tous les deux eu l'impression qu'ils étaient responsables, jusqu'à ce que le plus âgé se soit confié au défenseur pour lui faire part de ses doutes et de la culpabilité qu'il ressentait, le plus jeune lui avouant qu'il ressentait la même chose. Combien de fois Achraf avait-il eu l'impression de se mettre en travers de sa relation avec Neymar ? Pourtant, chaque fois, Kylian le rassurait, lui rappelait qu'il pouvait bien avoir des amis en dehors de Neymar, peu importe à quel point il aimait son Brésilien. Mais ce que Kylian ne voyait pas, c'étaient les regards noir qu'il recevait quand il le choisissait lui plutôt que son amant.