31. JANN

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Moment présent...

—AQUILA—

Quand je prends conscience que ce que je redoutais est sur le point de m'exploser au visage, deux options s'offrent à moi. Nier ou avouer. La première est ridicule, et ne me mènera nulle part, tandis que la deuxième ne parvient qu'à me procurer un sentiment d'angoisse profonde. Le genre d'angoisse qui décide de se déterrer du trou dans lequel on l'avait enfoui au pire moment possible. Quelques heures plus tard, sans doute, auraient été un meilleur timing. Mais tandis que j'essaye de rassembler un semblant de courage pour faire face à ma deuxième option – qui est finalement la seule qui soit véritablement à ma portée –, Aurore décide de prendre les choses en main.

Du moins, elle pense qu'elle peut y parvenir. Si seulement ça avait quoi que ce soit à voir avec elle ou ce qu'on fait là. Mais malheureusement pour moi, c'est bien plus gros, et l'heure de répondre de mes choix – ou de mon absence de choix, en l'occurrence – a sonnée.

— Je ne vois pas en quoi ce qui se passe ici regarde qui que ce soit.

J'entends sa voix comme depuis l'autre bout d'un tunnel, et ça suffit pour me ramener à moi au moment ou Eddie, haussant les sourcils sans se départir de son sourire mauvais, rétorque:

— Tu ne vois pas en quoi une pandémie prête à anéantir l'ensemble de la population terrienne nous regarde ?

— Quoi ?

Je suis l'échange comme un match de tennis, mais mon père intercepte la balle.

— Jann ! Passe-le moi, Eddie.

Eddie s'exécute sagement, comme toujours lorsqu'il s'agit de se mettre dans les bonnes grâces de mon père.

Le temps que je réceptionne l'écran, Aurore s'est glissée de l'autre côté du couloir éclairé.

— Je peux savoir de quoi on parle ?

En parallèle, je me retrouve face au visage furieux de mon père, qui me beugle dessus dès l'instant où il m'aperçoit.

— Tu te fous de ma gueule ? Des semaines que tu évites mes appels et tu décides de dissimuler une information pareille ? Des voyages dans le temps ? Une pandémie ? Je peux savoir à quoi tu pensais ?

— Comment ça, une pandémie ? s'écrie Aurore. Marcie ! Qu'est-ce qu'il se passe ?

— Jann à découvert...

Je lui lance un regard noir, ignorant l'éclat de voix qui continue de sortir de l'écran. Évidemment, c'est à ce moment qu'elle décide de s'en décharger complètement. Oubliant par la même occasion qu'elle non plus n'a pas soufflé mot de ces découvertes.

— Il a découvert qu'une pandémie meurtrière allait éclore sur Terre dans un futur proche.

— Pardon ? Depuis quand ?

— Oui, Janny. Dis nous depuis quand tu le sais...

J'ai envie de disparaître sous terre. Les choses ne pouvaient pas s'enchaîner d'une pire manière. Je ne sais ni comment gérer mes propres réponses, ni comment appréhender la cacophonie qui s'ensuit.

— Jann, est-ce que tu m'écoutes ? reprend mon père, plus furax que je ne l'avais jamais vu. Tu vas rentrer sur-le-champ...

— Est-ce qu'on est sûrs de ça ? continue Aurore, visiblement choquée. Comment c'est possible ?

Je tente d'emmener l'écran, dans lequel la voix de mon père continue de retentir, plus énervé que jamais, mais Eddie ne m'en laisse pas l'occasion. Il se poste devant moi avec ses bras croisés.

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