PROLOGUE

87 17 34
                                    

   Cela fait des heures qu'elle lui court après dans le dédale de ruelles sombres et sinueuses parcourant le district Obsidienne comme autant de veines noires pulsant d'un rythme malsain sur un corps gangrené, le filant depuis les toits. Ou qu'il la traque, difficile de savoir avec ces deux-là, tous deux chasseurs, pas du même type.

    La nuit est tombée, et elle commence à avoir froid. Elle devrait déjà être rentrée, le couvre feu a sonné depuis une bonne demi-heure au quartier général. Mais elle n'a pu se résoudre à abandonner la traque. pas tant que sa dague ne sera pas fichée jusqu'au cerveau dans l'oeil de ce monstre.

    Il l'a remarquée, mais elle ne le sait pas. En même temps, elle fait un boucan infernal avec son petit palpitant battant à tout rompre. Les humains étaient tombés bien bas s'ils étaient obligés d'accepter des créatures aussi délicates dans les rangs des « Serres d'Argent » comme se fait pompeusement appeler leur dernier groupe rebelle encore debout. « Les aigles mangent les serpents, et c'est ce que vous êtes. Des putains de serpents s'infiltrant et répandant leur venin partout. ».

   À cela s'ajoutant une superstition vieille comme le monde selon laquelle un simple contact à l'argent vous dézinguait un vampire, et le nom était tout trouvé. Il sourit à ce souvenir. C'était quoi déjà la suite? Ah oui. « Vous ne perdrez rien pour attendre, un jour, seulement vous têtes trôneront: Sur des piques autour du district rubis, et arglblblbbllb.... ». C'était ce que lui avait dit un jour sa proie, appartenant à la guilde. Malheureusement pour lui, c'était sa tête qui s'était envolée, jugulaire déchirée d'un puissant coup de crocs.

    Seulement voilà. Les vampires ont toujours été les prédateurs dans cette histoire. C'est ainsi, certains naissent supérieurs à d'autres, un point c'est tout, et les chasseurs autoproclamés se retrouvent chassés à leur tour.

    Il s'arrête. Il est grand, bien bâti, un beau spécimen, même pour son espèce. Il l'entend s'arrêter à son tour et se précipiter dans l'ombre d'une cheminée.

Lorsqu'elle se penche pour regarder s'il a repris sa route, il a disparu.

    Une main lui tapote doucement sur l'épaule, elle fait volte face, le découvrant avec horreur accroupi devant elle, crocs blancs brillant dans la nuit découverts par un sourire moqueur. Aucun son ne franchit ses lèvres, seuls ses yeux vairons écarquillés témoignent de sa terreur. L'éclat sauvage dans ses yeux sombres laissent à penser qu'il est affamé, au moins aura-t-elle droit à une mort rapide, pense-t-elle.

    Seulement, Wilhelm est un joueur, doublé, pour ne rien vous cacher, d'un salaud. C'est une jolie femme quoi, qu'un peu maigre. Wilhelm aime prendre son temps, et du temps, ce soir, il en a. Bonus, personne ne viendra l 'embêter sur un toit. Encore moins dans le district Obsidienne, SON district.

    Alors, tandis qu'il fait glisser la manche de sa tunique le long de son bras, elle ne crie pas. Lorsqu'il lèche langoureusement la griffure profonde que ses ongles ont laissé, de la pointe de son sein à la peau fine de son cou, elle ferme simplement les yeux, une larme unique roulant le long de sa joue.

    Ses dernières pensées vont à son unique fille, à ses yeux si semblables aux siens qui semblaient toujours sonder son âme depuis le berceau. Quand la vie l'abandonne enfin pour de bon par deux trous béants en haut de sa cuisse dénudée, rien, plus que le noir.

HUNTED HUNTEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant