Chapitre 2 - Black Coffee

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2 - "BLACK COFFEE"
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Todd

— Merci, John. On se voit demain !

Mon pote d'enfance frappe dans ma paume, la serre, me tire contre lui pour m'offrir une accolade amicale en tapotant le haut de mon dos.

Il quitte l'appartement et lorsque je décide d'enfin me poser, la poche arrière de mon pantalon se met à vibrer.

—Toddy, es-tu bien arrivé à Paris ?

La brune à la chevelure courte et dotée de quelques petites mèches blanches, agite son oreille face à l'écran, incapable de faire la différence entre un appel visio ou audio.

—Oui maman, soufflé-je en passant une main dans mes mèches chocolat. Tu as encore activé le mode vidéo par erreur.

—Oh oups ! Je ne comprends pas grand-chose à la technologie !

Elle pousse le téléphone de sa boucle, en forme de goutte, et le décale face à son visage. Son sourire est un vrai baume au cœur. Maman a toujours été joyeuse malgré la mort de sa fille aînée. Elle a su remonter la pente et se focaliser sur le présent.

— Ton père et moi souhaitons savoir quand tu pourras nous présenter ta fiancée.

— Maman, nous en avons déjà discuté. Elle est retournée dans le sud de la France profiter de sa famille pour les fêtes, mens-je.

Pourquoi ai-je inventé cette pseudo « petite copine » à qui j'ai passé l'anneau en moins de quatre mois ? Ah oui ! Parce que mon père est sur son lit de mort et qu'il veut savoir son fils aimé par une femme -aux jolies fesses rebondies, si possible- avant de disparaître de ce monde.

Je comptais arriver en Savoie et montrer une photo de moi avec une jolie blonde à mon bras. Rien de plus.

— Oui, oui je sais. Mais...

— Maman !

— Essaie de la faire venir pour que ton père puisse la rencontrer avant qu'il ne quitte son corps pour de bon. Il est persuadé que...

— Laisse-le Myriam, je suis sûre que sa nana a autre chose à faire que de rouler son cul pour venir en Savoie. Encore une greluche en talons aiguilles qui ne veut pas marcher dans la neige, râle mon père enlisé dans son canapé.

Maman lui somme de se taire d'un discret geste de la main.

— Je sais. Il me croit incapable de trouver quelqu'un qui m'aime pour qui je suis vraiment !

— Tu es un très beau garçon et le problème c'est que tu choisis toujours des femmes seulement attirées par ton avantageuse prestance et ton argent. Elles ne te méritent pas.

Ma mère n'a pas tort, mais moi aussi je sélectionne mes compagnes selon leurs attraits physiques et je dois bien avouer que j'ai plaisir à changer de partenaire comme de boxer. Je n'ai jamais eu envie de me poser avec une chieuse. Je chéris ma tranquillité et surtout si je devais me marier, ce serait très certainement avec mon piano - à queue (notez la petite blague).

— J'ai bientôt 30 ans maman, je sais prendre mes décisions tout seul.

— Justement, parlons-en de ton âge et du fait que tu ne sois toujours pas père ! Tu sais que l'horloge biologique tourne. Pas pour toi, mais surtout pour nous les femmes. Et puis tu vas pas supporter les courtes nuits quand tu auras 35 ans mon fils.

— Bon, maman je vais raccrocher, j'ai le plombier qui arrive. Je te rappelle plus tard et je vois si je peux venir avec ma douce.

— Je ne connais même pas son prénom !

— Laisse-moi la garder rien que pour moi pendant encore quelques jours.

Elle opine du chef derrière son téléphone en prononçant un léger « d'accord » grimaçant.

Je me dirige vers les boissons contenues dans mon bistro personnel puis me prépare un café en ajustant la musique sortant des enceintes de mon nouveau salon.

La douce interprétation de Peggy Lee sur le titre « Black coffee » m'enveloppe complètement pendant que je bois mon « Black Ivory » accoudé au bar, les yeux dans le vide, heureux d'avoir pu me procurer mon or liquide.

C'est le café le plus cher du monde avec ses 1 800€ le kilo.

Certes le procédé est franchement ragoûtant et ne donne pas envie de consommer le produit précédemment ingéré par les éléphants, mais ses notes de cerises chocolatées, de cuir et de tabac, fond de lui un café exceptionnel gustativement.

Je me cale au fond de mon canapé en cuir marron tout en admirant le salon merveilleusement décoré à mes goûts. Mon père serait fou de voir comment j'ai modifié cet endroit.

Le parquet en chêne fumé est sombre et donne un style industriel à l'environnement, quant aux murs, la pierre et la peinture noire se marient parfaitement bien.

Malheureusement, il reste encore beaucoup de choses à faire et je visualise très clairement l'ampleur des travaux à superviser.

Robert Elis a tout laissé en plan, démoralisé par la montagne de choses à accomplir, suite aux nombreuses bourdes commises par les artisans peu consciencieux qui ont été embauchés.

D'ici quelques mois j'hériterai de la totalité de l'immeuble et j'en profiterai pour virer la voisine dans le but de vivre dans une tranquillité sans faille.

Je conçois que le mur qui nous sépare est aussi fin que du papier à cigarettes - une grosse erreur qui me vaut de grincer des dents à chaque fois qu'elle pousse la chansonnette- et c'est clairement la raison qui me pousse à expulser la blonde d'à côté.

Je n'ai jamais entendu quelqu'un chanter aussi faux. Je souffre le martyre dès qu'elle s'y met. Elle décolle mes tympans et tourmente mon oreille mélomane.

Dieu merci, ce calvaire et bientôt fini et la demoiselle va prochainement devoir plier bagage. Je vais m'en assurer personnellement.

Je désespère à l'idée de devoir accorder du temps à ce genre de futilités.

Je dois également trouver un acquéreur pour nos gîtes en Savoie dont je souhaite m'acquitter.

Ce projet est un plaie et seuls ma sœur et mon père pouvaient gérer ce gouffre financier.

Mon père... Tu parles... Un homme qui, depuis le décès de ma frangine, fume, boit et mate des pornos à côté de la femme la plus sublime qui soit dans ce monde.

Je n'ai pas d'atomes crochus avec lui et pourtant je suis constamment en train de chercher sa reconnaissance et sa fierté.

Il exècre le métier que j'ai choisi.

Musicien, globe-trotteur -ou plutôt vagabond si je dois reprendre ses termes- sans famille, ni attache. Je suis la risée de la famille Elis et loin de la parfaite Lidia qui n'est plus de ce monde.

Aujourd'hui c'est à son tour de se « battre » contre la mort. Il est atteint d'un cancer, mais il avoue qu'il se laisse mourir à petit feu et que ça l'arrange bien. Il répète qu'il ira rapidement rejoindre sa fille, la seule dont il est vraiment satisfait.

Je le soupçonne de toucher à l'herbe et aux boissons alcoolisées pour en finir plus rapidement.

Pourtant, Robert désire quelque chose avant de raccrocher son tablier.

Il a espoir que son crétin de fils trouve une demoiselle pour que le nom d'« Elis » prospère encore sur plusieurs générations.

Bref, je n'ai cas sortir d'ici et aller dans le même bar que l'autre soir afin de trouver une beauté qui serait surement prête à se pavaner à mon bras.

Je me redresse et attrape mon manteau noir avant de quitter mon appartement.

— Ce soir, j'inaugure mon lit avec une jolie blonde !

Sous Le Sapin ? Une Fausse Fiancée! - [ &H Edition ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant