Chapitre 4 : Abigail

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   Abigail était presque sûre d'avoir manqué un épisode. Un instant elle était en train de parler avec Alexandre, comme deux étrangers essayant de briser la glace, la seconde d'après son petit ami faisait un numéro de jalousie et lui prenait sa coupe de champagne. La voilà qui était à nouveau seule dans ce couloir et sûre d'une chose : elle avait très certainement loupé quelque chose à un moment et elle n'aimait pas cela.

"Comment a-t-il pu être si impoli ?!" La jeune femme fulminait et aurait aimé pouvoir hurler sur Luc mais ils étaient entourés de beaucoup de leurs amis et elle ne voulait pas causer de scène. Au lieu de ça, elle avait prit la tangente et préférer sortir sur le perron. Elle n'avait même plus sa coupe de champagne pour boire et ses cigarettes étaient quelque part dans son sac dans l'une des pièces du manoir où ils se trouvaient.

Seule dehors, Abigail se refit le film de la scène qui venait de se dérouler. Luc lui rappelant qu'elle avait pris du poids puis insultant Alexandre. Alexandre qui avait giflé Luc. Ce dernier qui l'avait provoqué en retour. Alexandre partant. Luc l'insultant pendant cinq minutes puis se retournant contre elle.

"Pourquoi défends-tu celui qui t'a mise dans cet état."

"Tu es injuste."

"Il ne vaut rien."

"Il ne méritait pas ça."

"Arrête de le défendre. Tu ne devrais même pas le côtoyer."

"On parlait juste de la vie !"

"C'est le champagne qui parle. Tu ne sais pas ce que tu dis comme absurdités, lapin."

Abigail avait l'impression de se noyer sous les attaques de tous ceux qui l'entouraient. Et la musique à l'intérieur était trop forte. Elle ne s'entendait plus penser. Elle ne pouvait plus respirer.

"Non."

Elle ne connaissait que trop bien cette impression de noyade. Elle savait ce qu'elle annonçait maintenant. Hors de question de se laisser aller. Abigail savait qu'elle ne pouvait pas laisser les autres voir la crise d'angoisse qui la gagnait. Se levant brusquement, elle regagna l'intérieur et monta quatre à quatre les marches du grand escalier pour trouver la pièce où étaient entreposés les manteaux et sacs de tous les invités.

La fête battait encore son plein à l'intérieur et Abigail se sentait encore plus exposée face à tous ces gens qui lui parlaient, l'interpellaient dans sa marche. Lui demandaient des nouvelles de ses parents, de son frère, de Luc - qui ne devait pas se trouver loin et qui aurait dû être celui répondant à ces questions-. Abigail aurait voulu fuir mais elle savait qu'elle devait garder les apparences sauves et se prêter à ce jeu de dupes. Il lui fallut vingt minutes pour s'extraire de toute obligation sociale et s'enfermer dans ce qui servait de vestiaire. La tête appuyée contre la porte, elle s'autorisa à souffler avant de glousser nerveusement.

"Un mot et ils sont morts."

La rousse sursauta et se retourna rapidement, manquant de trébucher sur sa canne. Elle n'était définitivement pas seule dans cette pièce.

Assise au milieu des vêtements, se fichant complètement que ses Doc Martens reposaient sur des mentaux, une fille l'observait, une cigarette à la bouche. Ses cheveux bruns étaient coupés courts et accentuaient sa mâchoire volontaire. Ses grands yeux bleus étaient cernés de khôl. Ils étaient également la chose la plus envoûtante qu'Abigail ait vu depuis longtemps. Elle portait une petite robe noire asymétrique la moulant parfaitement. La seule touche de couleur : son rouge à lèvre rouge assorti à ses chaussures. Abigail était certaine de ne jamais avoir vu quelqu'un transpirant autant la confiance en soi que cette fille.

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