Elle a traversé une nuit sans étoiles, a vu un amandier sans fleurs et des tournesols fanés. Entre mots et coups de pinceaux, Lyne raconte sa bataille contre la maladie et le deuil, dans une lettre adressée à celui qu'elle aime.
« Pour mon précieux...
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On raconte souvent qu'avant l'aube, le ciel se teinte d'un noir bien plus sombre que durant tout le reste de la nuit. Après ton véritable décès, j'ai découvert une nuit bien plus dure que celle dans laquelle je baignais déjà. Tout est devenu flou, je ne savais plus quoi penser, quoi dire, quoi faire. Je me suis retrouvée désemparée, démunie.
Surtout, je n'arrivais pas à y croire. J'attendais indéfiniment un nouveau coup de fil des médecins, un bref appel durant lequel ils m'auraient encore dit : « finalement, son état s'est amélioré, il y a à nouveau de l'espoir». J'étais trop habituée aux mouvements des montagnes russes dans lesquelles j'étais coincée depuis le crépuscule, depuis le coucher de soleil où notre vie commune s'est éteinte. J'étais tout bonnement incapable de comprendre les choses, la vérité. Je crois que mon esprit déjà surchargé n'a rien voulu enregistrer, surtout pas ton décès.
Nous avons dû attendre si longtemps afin de pouvoir te donner un enterrement. Il a fallu qu'ils étudient ton corps pour tenter de comprendre ce qui s'était mal passé, il a fallu qu'ils repoussent la date et qu'ils me rongent encore plus. Ils n'ont rien trouvé, mais ta famille pense que tu as toujours su quelque chose que tu nous as dissimulé ; tes organes étaient en bien pire état que nous l'avions cru, et les médecins n'auraient jamais dû t'opérer dans de telles conditions. Mais tu n'as rien dit. Alors tout a déraillé. Et moi avec.
À ce stade, je refusais toujours de croire que je t'avais perdu. J'étais égarée dans les méandres de la nuit, dans un brouillard qui occultait la réalité et qui me faisait croire que tu étais encore là, que j'avais rêvé ce coup de fil fatidique. J'avais beau tenter de me faire avaler l'information, elle refusait de rentrer dans mon crâne, dans mon cœur. À mes yeux, tu étais encore là, et j'étais incapable de me persuader du contraire.
Tu es parti en silence, sans rien dire, sans prévenir ; comment aurais-je pu le voir ?
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Van Gogh, Promenade au clair de lune au milieu des oliviers (mai 1890)