Elle a traversé une nuit sans étoiles, a vu un amandier sans fleurs et des tournesols fanés. Entre mots et coups de pinceaux, Lyne raconte sa bataille contre la maladie et le deuil, dans une lettre adressée à celui qu'elle aime.
« Pour mon précieux...
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Mon univers n'a pas toujours été dénué de sens, sombre et effrayant. Auparavant, mon monde était coloré, lumineux, tout de toi vêtu, de nous deux. Il n'était pas une heure sans que mon crâne ne fasse résonner dans mon cœur ton prénom, ton doux visage ; mon Vincent. Il a été un temps où ma seule inquiétude était de savoir ce qui allait composer notre repas du soir, où ma seule préoccupation était de t'embrasser assez en souriant, de te serrer dans mes bras innocemment. Dans ce conte de fée aux couleurs de ces tournesols que tu aimais tant, nous vivions si loin de la réalité. Si loin de ce monstre qui nous a rattrapés.
Il s'est répandu en toi sans aucune pitié, et il t'a dévoré tout entier.
Ton état s'est dégradé au fil des années. Ton corps s'est affaibli, et avec lui, ton appétit. Mais le sien n'a fait que grandir. Il te dévorait de l'intérieur, il s'attaquait à tout ce qui passait à sa portée. Il a commencé avec ta peau, puis tes jambes, et quand on l'en a chassé, il a filé vers tes poumons. Tout semblait normal avec le temps, nous avions tous assimilé le fait qu'il te fallait vivre avec une tonne de cachets, avec des quintes de toux toujours plus lourdes et des jambes si douloureuses qu'il ne t'était plus permis de marcher sans grimacer. Mais tu souriais encore, tu riais et ronchonnait toujours.
Lorsqu'elle en a eu assez d'attendre, impatiente, la maladie s'est acharnée sur ton corps entier. Elle t'a grignoté de l'intérieur, elle t'a rongé sans une once de pitié. J'ai été égoïste et je me suis demandé ce que j'avais fait à l'univers pour mériter tout ceci, pour te voir souffrir dans mes bras.
J'aurais plutôt dû demander au Ciel pourquoi il voulait te garder pour lui, et t'arracher à moi.
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Van Gogh, Nature morte : vase avec douze tournesols (août 1888)
