Cœurs brisés

Chapitre 2

La vie de Harry avait basculé une fois de plus lorsqu'il avait dû aller acheter des potions pour nettoyer son organisme de ses excès, sur les conseils d'un médicomage de Sainte-Mangouste.

C'était par hasard que Harry avait poussé la porte du premier magasin de potionniste sur sa route et il s'était retrouvé nez à nez avec Drago Malefoy.

Après la chute de sa famille, le Serpentard avait dû travailler pour vivre et il avait accepté le premier emploi venu : vendeur dans une petite boutique. Compte tenu de ses antécédents, il avait dû apprendre l'humilité et supporter les commentaires désobligeants.

Le jeune homme avait perdu une bonne part de sa fierté et il était resté de marbre en voyant Harry Potter devant lui, se contentant de lui demander ce dont il avait besoin d'un ton neutre et poli, comme s'ils étaient des inconnus.

Harry était resté figé par la surprise, dévisageant son ancien camarade avec fascination. Il avait tendu la liste des potions dont il avait besoin sans un mot, et Malefoy avait emballé ses achats sans une moquerie, sans la moindre réflexion.

Le jeune homme ne put jamais expliquer pour quelle raison il avait presque supplié Drago de boire un verre avec lui, pour discuter. Sur le moment, il avait pensé qu'il se sentait seul, ou qu'il avait besoin de quelqu'un qui ne le traiterait pas comme un enfant irresponsable.

Il avait besoin de l'ancien Drago Malefoy, un peu méprisant, qui ne prendrait pas de gants avec lui.

L'ancien Serpentard avait capitulé avec un regard inquiet en direction de son patron et lorsque l'homme avait demandé à Harry si son employé l'avait importuné d'un ton menaçant, le jeune homme avait compris qu'un seul mot négatif de sa part pourrait faire perdre son emploi à son ancien rival.

Harry avait souri et assuré que son employé était parfait, avant de mentionner sur un ton de conspirateur qu'ils étaient amis proches et qu'il était désolé d'avoir monopolisé son temps pour l'inviter... Drago avait semblé choqué de son initiative, mais le patron de la boutique s'était aussitôt détendu et il avait lancé un regard perplexe en direction de Drago. Perplexe, mais bien plus amical qu'à l'arrivée de Harry.

Alors que depuis la guerre Harry n'avait rien pris au sérieux, il se retrouva à tourner en rond et à s'inquiéter pour son rendez-vous avec Drago. Il ne voulait pas tout gâcher, comme tout ce qu'il avait fait jusqu'à présent. Sans compter qu'ils s'étaient tellement battus tous les deux, qu'il ne savait pas ce qu'ils pourraient se dire lorsqu'ils seraient face à face.

Il entra timidement dans le bar qu'il avait choisi, regardant autour de lui, bien loin de l'assurance qu'il montrait habituellement. Lorsqu'il vit Drago installé à une table, devant une bouteille de bière moldue, l'air maussade, il avança, les paumes moites et le cœur battant.

Ils se dévisagèrent un long moment, Harry debout devant la table, attendant l'autorisation de prendre place, puis Drago soupira et lui fit un vague signe du menton, l'incitant à s'asseoir.

Les souvenirs de Harry sur cette première soirée étaient un peu flous, parce qu'il avait été si stressé qu'il avait été dans un brouillard un peu hébété.

Cependant, il en gardait un souvenir ému, parce que c'était un nouveau départ. Pour lui, dans sa nouvelle vie d'adulte, pour eux, dans une étrange relation teintée d'amitié prudente.

Passé le premier moment de gêne, ils avaient commencé à parler, apprenant à se connaître petit à petit. Se découvrant autrement. Ils étaient restés ensemble jusqu'à la fermeture du bar, incapables de se séparer et ils s'étaient quittés avec la promesse d'un autre rendez-vous, très prochainement.

Ils s'étaient revus deux jours plus tard, appréciant la compagnie de l'autre. D'un commun accord, ils avaient rapidement délaissé les bars anonymes pour se retrouver chez Harry ou dans le petit appartement loué par Drago, et ils passaient l'intégralité de leur temps libre tous les deux.

Ils parlaient, plaisantaient. Parfois, ils restaient silencieux, lisant juste un livre côte à côte. L'important était d'être ensemble.

Quand Hermione était intervenue, l'air grave, s'interrogeant sur cette soudaine proximité, Harry l'avait rassurée aussitôt, un peu sèchement. Il lui avait fermement rappelé qu'il était un adulte et que s'il avait eu quelques soucis par le passé, ce n'était plus le cas. Ensuite, il avait conclu en annonçant tranquillement que Drago Malefoy était devenu un bon ami et qu'il le verrait autant qu'il en aurait envie.

Bouche bée, Hermione avait finalement acquiescé et marmonné quelques conseils de prudence avant de rentrer chez elle, perplexe quant à ce soudain changement, mais surtout soulagée de voir que son ami semblait soudain avoir retrouvé un peu de bon sens et qu'il semblait avoir oublié ses anciens excès.

Près de Drago, Harry se sentait bien. Il oubliait ses anciens démons et il avait enfin trouvé une paix qu'il n'aurait jamais imaginé rencontrer un jour.

Harry avait confié tous ses secrets, même les plus sombres, révélant à Drago des choses qu'il avait enfouies au fond de son cœur. Il avait exorcisé une partie de ses cauchemars en avouant qu'il s'en voulait de toutes les morts autour de lui, qu'il avait regretté d'avoir survécu une fois de plus lorsqu'il s'était sacrifié volontairement et en reconnaissant enfin qu'il s'en voulait terriblement d'avoir dû tuer Voldemort.

Drago avait également ouvert son cœur, décrivant son mal-être lorsqu'il avait été marqué et son dégoût de devoir obéir, mais également sa peur de provoquer la mort de ses parents.

Après six mois à se côtoyer, se voyant chaque jour, incapable de rester loin de l'autre, personne ne pouvait nier leur amitié presque fusionnelle. Harry avait organisé quelques rencontres avec Drago et Hermione et Ron, et tout s'était parfaitement passé pour son plus grand soulagement. Après tout, ils étaient tous des adultes et les petites disputes datant de Poudlard semblaient insignifiantes après ce qu'ils avaient tous traversé.

Leur premier baiser avait été presque accidentel.

Ce jour-là, Drago avait annoncé qu'il avait repris ses études, comme Harry le lui avait conseillé. Harry, fou de joie et fier de son initiative, s'était précipité sur lui pour l'enlacer, et leurs lèvres s'étaient frôlées.

Ni l'un ni l'autre n'avait essayé de s'écarter et Harry avait initié le baiser suivant, en toute connaissance de cause, curieux et impatient de sentir encore son cœur s'emballer dans sa poitrine à leur contact.

Lorsqu'ils s'étaient séparés, aucun des deux n'avait parlé de ce qui venait de se produire et il y avait eu quelques jours où ils se dévisageaient, où leurs conversations étaient émaillées de silences pensifs avec des questions plein les yeux.

Cependant, ils étaient incapables de s'éloigner l'un de l'autre, ils étaient comme aimantés.