Chapitre 6

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Ron attrapa Drago par le bras, décidé à l'empêcher de fuir, et Hermione se plaça devant lui, déterminée.

— Nous devons parler.

Sans s'occuper de la jeune femme près de lui qui protestait, Drago hocha la tête mollement, tout en dégageant son bras de la prise possessive de celle qui se présentait comme sa fiancée.

Lorsqu'elle commença à se plaindre, Drago siffla, furieux, en la fixant avec un mélange de dégoût et de colère.

— Si tu n'es pas contente, va te plaindre à ton père. Tu avais des courses à faire, je crois ? C'est bien pour cette raison que tu m'as traîné ici ?

Vexée, elle s'éloigna à grands pas rageurs, comprenant que toute protestation serait vaine, et les épaules de Drago s'affaissèrent comme s'il portait le poids du monde sur les épaules.

Hermione dévisagea Drago avec attention et elle murmura, avec douceur et gentillesse.

— Qu'est-ce qui vient de se passer ?

Drago soupira et haussa les épaules.

— Je ne voulais pas qu'il l'apprenne de cette façon, mais cette dinde voulait... probablement se rendre intéressante.

Ron fronça les sourcils, perplexe, tandis que Hermione secouait la tête, essayant de comprendre.

— De quoi parles-tu ?

— De mon mariage.

La grimace dégoûtée de Drago était une indication de ce qu'il en pensait et Hermione écarquilla les yeux, stupéfaite.

— Tu vas te marier ?

Drago se frotta le visage, un peu perdu, puis il croisa le regard des deux gryffondor et répondit, sur la défensive.

— C'est le prix à payer pour être retourné chez mes parents. Tant que j'étais indépendant, ils ne pouvaient pas me demander... de respecter les traditions familiales, mais quand...

Hermione l'attira dans ses bras, les larmes aux yeux, touchée par sa détresse évidente même s'il faisait bonne figure.

— Viens avec nous. Je pense que nous avons beaucoup de choses à discuter et nous serons mieux au calme.

Drago les dévisagea l'un après l'autre, un peu perdu. L'entente entre eux reposait sur Harry et il était persuadé que les amis du Gryffondor lui en voudraient de leur séparation brutale. Il ne s'attendait pas à être réconforté et traité comme un véritable ami... loin de là.

Il se laissa entraîner sans un regard en arrière, ne se souciant même pas de sa fiancée non désirée.

D'aussi loin qu'il se souvienne, Ron avait entendu parler négativement de la famille Malefoy.

Ils étaient de ces sangs purs prétentieux qui avaient contribué à faire courir la rumeur que les Weasley étaient des « traîtres à leur sang », sans compter que Lucius était soupçonné par Arthur de faire en sorte de bloquer son avancement au ministère.

Que ces soupçons soient fondés ou non, Ron avait détesté Drago Malefoy avant même d'arriver à Poudlard, sans même connaître le garçon de son âge.

Il était un Malefoy après tout, et dans le monde magique, les Weasley et les Malefoy se méprisaient.

Lorsque Harry Potter en personne l'avait choisi, lui, pour être son ami et qu'il avait repoussé Drago Malefoy, Ron avait été ravi et il avait largement pris part à la guerre entre Serpentard et Gryffondor, n'hésitant jamais à encourager Harry lorsque ce dernier se battait avec Drago.

Parfois, il se demandait si Hermione avait senti qu'il y avait une attraction particulière entre Harry et Drago et si c'était pour cette raison qu'elle tentait de les empêcher de se battre de son mieux. Il n'osait pas poser la question cependant, parce qu'il se doutait qu'il aurait probablement droit à un sermon sur son comportement de l'époque — et sur le nombre de points qu'il avait fait perdre à sa maison.

Lorsque Harry était soudain devenu ami avec Malefoy, Ron avait été vexé. Il aurait probablement tenté de récupérer l'attention de Harry pour lui seul si Hermione ne l'avait pas un peu bousculé en lui rappelant que mieux valait cette amitié étrange qu'un Harry se détruisant à petit feu, brûlant la chandelle par les deux bouts et vivant d'excès en tout genre.

Mécontent, Ron avait prédit des ennuis à venir et il avait assuré que Malefoy ne pourrait qu'apporter plus de problèmes à Harry.

Il n'aurait pas pu avoir plus tort.

Non seulement Harry n'était pas retombé dans ses anciennes addictions, mais Ron ne l'avait jamais vu si heureux. Même à Poudlard, il y avait toujours une ombre dans son regard vert, ce qui avait fait soupçonner à Ron que Harry était malheureux chez ses moldus. Il en avait rapidement eu confirmation, mais il n'avait jamais pu faire quoi que ce soit pour aider son meilleur ami. Il avait juste fait en sorte de rester présent pour lui, prêt à l'écouter s'il voulait parler — ce que Harry n'avait jamais fait.

Or, depuis qu'il passait la majeure partie de son temps avec Malefoy, Harry souriait spontanément, riait aux éclats et il n'y avait pas la moindre hésitation dans son bonheur, en apparence. Tout ce qui pesait sur ses épaules semblait avoir disparu et juste pour cette raison, Ron avait fait l'effort de tolérer le Serpentard. Il pouvait même avouer qu'il commençait à l'apprécier, puisqu'il voyait un jeune homme libéré des diktats de sa famille qui prenait soin de Harry.

Le Drago Malefoy que Ron avait découvert était bien loin de ce qu'il imaginait. Loin de l'influence de ses parents, Ron pouvait avouer qu'il était plutôt correct...

Et puis, soudain, la relation entre Harry et Drago avait changé. Lorsqu'il avait vu les deux garçons s'embrasser, il était resté figé, incrédule, avec l'impression de n'avoir rien vu venir. Cependant, le petit sourire en coin d'Hermione lui avait fait comprendre que sa petite-amie n'avait rien manqué des signes précurseurs et qu'elle se doutait qu'ils en arriveraient là un jour.

Ron n'avait pas protesté, mais il avait eu beaucoup de mal à l'accepter. Probablement parce qu'il gardait l'espoir qu'un jour Harry entrerait vraiment dans sa famille en épousant Ginny — malgré le désastre de leur dernier affrontement — et qu'ils seraient légalement frères.

Il avait cru connaître son meilleur ami mieux que personne, pour au final découvrir qu'il s'était trompé sur toute la ligne. Il n'était pas stupide, cependant, et il n'avait pas l'intention de forcer Harry à faire un choix. Il avait dans l'idée que Harry n'abandonnerait jamais son serpent, mais surtout son ami était réellement heureux, et c'était à ses yeux une raison suffisante de le soutenir.

Il avait fini par s'y faire. Probablement grâce à Hermione, qui le sermonnait régulièrement lorsqu'il parlait de Drago en l'appelant « la fouine ». Probablement aussi à cause de la façon dont Harry regardait Drago, ou dont Drago regardait Harry. Comme s'il n'y avait rien d'autre autour d'eux, comme si leur monde entier se résumait à l'autre.

Il pouvait toujours être jaloux de leur entente fusionnelle, il aimait bien trop son meilleur ami pour le priver d'une relation aussi précieuse.

Cœurs brisésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant