Notre monde, à nous.

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« Allô » dit une voix féminine à l'autre bout du téléphone. Je regarde Myrtille, ne comprenant pas la situation. Elle a l'air autant choqué que moi. Nous gloussons, pensant avoir interrompu un moment intime. « Je peux parler à Nicolas s'il vous plait ? » parvient-elle à dire entre deux ricanements. « Nicolas ! Y a une fille qui te demande ! » hurle la personne. Nous attendons patiemment l'arrivée du personnage principale. « Allô ? C'est qui ? » demande Nicolas. « Alors, mon vieux, t'as une nouvelle conquête ? » interroge Myrtille. « Pas du tout. » dit-il désintéressé. « Bref, pourquoi t'appelle ? » continu-t-il. « Tu te rappelles de Julie ? » dit Myrtille, gênée. « Ah oui ! Ton crush du lycée là ! » répond-il. « Pourquoi, tu l'as revu ? » continu-t-il. « Euh... Elle est avec moi là enfaite... » avoue-elle. Elle rougit petit à petit. Je trouve ça trop mignon. « Ah... Bah... Salut Julie ! » dit-il. Je sens qu'il a compris qu'il a fait une connerie. « Bon, bah je vous laisse ! Bonne soirée, pas de bêtises ! » lance-t-il avant de raccrocher. « Bon c'est gênant, mais du coup tu vois j'avais pas menti ! » rigole Myrtille. « C'est bizarre, j'arrive pas à me dire que tu avais un crush sur moi ! Je veux dire à l'époque je ressemblais à rien ! » expliquais-je. « T'étais déjà magnifique à l'époque. » affirme-t-elle en mettant sa main sur la mienne. Je rougis. C'est comme si elle avait décidé de prendre les choses en main. « Merci, t'es pas mal toi non plus ! » bégayais-je. Je ne sais pas quoi dire dans ces moments-là. Elle caresse le dos de ma main en réponse. J'ai des papillons dans le ventre mais j'essaie de les étouffer. Ne te fais pas de film, ne te fais pas de film.

Nous finissons le repas en parlant de la situation actuelle, du corona virus et toutes ces restrictions qui commence à peser même si elles sont nécessaires. « Je commence à me dire qu'on va jamais sortir de cette situation. » désespérais-je. Un long soupire sort de la bouche de Myrtille. D'un coup, elle se lève et ouvre grand les bras. « Et si tu me racontais une histoire ? Comment tu voudrais que ça se passe ? Oublie le corona virus et pense à ce que tu aurais fait pendant ces derniers mois ? » dit-elle. Elle est tellement passionnée que je n'ose pas couper son délire. « Tiens prends un pinceau et dessine le monde dans lequel tu aimerais vivre aujourd'hui. » continu-t-elle en me montrant un pinceau avec un peu de peinture sèche dessus. Elle va chercher un seau d'eau qu'elle met entre nous et plusieurs pots de peinture. « Les murs de mon atelier sont tes toiles ! » s'exclame-t-elle. Je me lève et la rejoins. J'attrape le pinceau et regarde les pots, ne sachant pas par où commencer. « Dans mon monde, il y a beaucoup plus de forêts ! » dit-elle en plongeant son pinceau dans le pot de peinture verte. Elle trace un énorme trait sur le mur en face d'elle. « Et plus d'eau dans les océans ! » dis-je en faisant de même avec de la peinture bleue. « Les oiseaux chantent ! » dit-elle. « Et les gens aussi ! » continuais-je.

Au fil du temps, nous traçons des traits droits, ondulés, des espèces de personnages qui ne ressemblent à rien. Quand je regarde de son côté, je vois qu'elle a un œil artistique, les couleurs qu'elle a choisis se marient parfaitement et même si ses bonhommes sont primaires, ils vont bien avec le thème général. Je suis épuisé alors je m'assois sur le sol. « Je suis morte ! C'est vraiment trop amusant ! » rigolais-je. Je sens un poids contre mon dos. Je tends mes jambes pour faire balance avec le poids de son corps contre le mien.

« Et moi alors, je suis où dans ton monde ? » demande Myrtille. Je réfléchis, j'ai envie d'être sincère. Nous sommes toutes les deux, entouré de silence, dans une espèce de dimension parallèle où je me sens en sécurité. « Honnêtement, je ne sais pas encore. Je pense que tu peux en faire partie mais en même temps, je ne te connais pas romantiquement donc j'attends de voir. » avouais-je. Elle pose délicatement sa tête contre la mienne. « Je pense que c'est la première fois qu'on me répond avec sincérité et franchement ça fait du bien. » explique-t-elle. Je pose ma main sur la sienne. « La maintenant, j'ai juste envie de vivre à fond chaque seconde, chaque minute et chaque heure du meilleur rendez-vous que je n'ai jamais eu, sans forcément me prendre la tête. » dis-je, doucement. Je la sens se retourner alors je fais de même. Nous nous regardons en silence, comme pour figer dans nos mémoires les traits de nos visages. Elle se rapproche doucement. J'ai envie de faire de même mais mon corps ne répond plus. Elle fait tout le travail, elle n'est plus qu'à quelques centimètres de moi, pourtant, elle s'arrête. Elle veut me laisser franchir les derniers centimètres, c'est sa manière à elle de me dire qu'elle ne m'oblige à rien. C'est trop tard, je suis totalement absorbé par l'atmosphère. Je me laisse aller, et bientôt mes lèvres touchent les siennes. 

Myrtille (histoire lesbienne)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant