17.1. Trevor

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Les rendez-vous avec les responsables des salles de concert, producteur ou directeur de studio m'exaspéraient. Si cela ne tenait qu'à moi, je leur aurais balancé une signature au bout de leur paperasse et point final. Du moment que nous avions un lieu où jouer, le reste, je m'en fichai. Heureusement, Michael gérait cette partie comme un chef. De la gestion des clauses en passant par le côté technique des équipements, il ne laissait rien passer et ne rechignait pas à la tâche. Par contre, il ne transigeait pas sur notre présence lors de l'accord final. Selon lui, l'image du groupe passait aussi par cet aspect commercial.

Assis sur le canapé en cuir de la salle de réunion, je prenais mon mal en patience, amusé de voir que je n'étais pas le seul à trouver ces moments rébarbatifs.

— J'ai l'impression de me trouver dans un cabinet de psy, râla Seth.

Je ne lui donnais pas tort. Entre les cadres aux illustrations plus que psychédéliques, la peinture d'un ocre chaud et les plantes vertes, il ne manquait plus que les bougies.

— Alors Mr Hawkins, dites-moi ce qui vous amène ici, singea Link en mimant une prise de notes.

J'étouffai un rire tandis que Mike levait les yeux au ciel. La porte s'ouvrit sur un gars en costume, ce qui calma les deux loustics. Les habituels échanges de politesse effectués, l'homme sortit d'un porte-document les papiers qui nous intéressait. Le calvaire commença. Je priai pour que l'affaire soit vite expédiée.

*

Mes poings se serrèrent. Les cons, sérieux. Les coups d'œil vers l'horloge se succédaient. Les minutes filaient sans que je trouve une occasion de m'échapper. Mon pied battait la mesure. Un coup de coude de la part de mon frangin me fit grogner. Même lui s'y mettait. Je n'étais vraiment pas d'humeur. Pas question que je lui pose un lapin au premier rendez-vous. Ils prenaient tout leur temps les boulets. C'était juste un paraphe, putain. La liasse passa à Evan. Encore Mike avant que le tas arrive à moi. J'ébouriffai pour la centième fois mes cheveux.

— Vieux, tu t'sens pas bien ? On dirait que t'es branché sur du mille volts.

La vanne d'Evan attira l'attention du groupe entier sur ma personne. Incapable d'encaisser plus longtemps, je bondis sur mes pieds et profitant de la stupeur générale, attrapai les feuillets et y apposai ma signature sans me soucier de froisser la paperasse. Mike me saisit le poignet au moment où je faisais mine de sortir.

— Trev ?

— Je serais là pour la répét, sans faute.

Il fouilla dans mes prunelles à la recherche d'un indice. Apparemment, ce qu'il y lut le convainquit de me lâcher. Une fois passé les double-battant, je traversai le couloir et dévalai les escaliers. Une fois sur le parking, j'enfourchai ma moto après avoir mis mon casque. Je n'étais pas inconscient non plus.

A peine quelques kilomètres me séparaient du lieu de rendez-vous. Un endroit loin d'être anodin pour moi. Il représentait l'un des rares, si ce n'était le seul, où je me sentais chez moi en quelque sorte. Un port d'attaches dans l'errance de ma vie d'artiste. Le gérant me connaissait depuis mon adolescence. Figure paternelle pour un jeune en perte de repères, je lui devais d'être celui que j'étais aujourd'hui. Là-bas, je me sentais en sécurité aussi. Je pouvais me dépouiller pour un temps du fardeau de la célébrité. Je pouvais me retrouver.

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