Chapitre 9 - NAISSANCE (partie 1)

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Pandore

Depuis que j'ai demandé à Zeus pourquoi j'étais toujours en vie, j'ai l'impression qu'une éternité s'est écoulée. Même les oiseaux se sont tus pour entendre la réponse. À vrai dire, c'est comme si tout l'Olympe se retenait de respirer afin d'entendre les mots du dieu.

Perdant patience, je me relève et commence à contourner ce dieu si imposant. Sauf qu'il me retient par le bras. Sa poigne me fait mal mais je serre les dents, ne montrant aucun signe de faiblesse.

– Où comptes-tu aller comme ça ?

– Où voulez-vous que j'aille ?

– Cette manie de ne répondre que par des questions est agaçante.

Je hausse les épaules, mais n'ajoute rien de plus, de peur de voir ma tête rouler à mes pieds. Il me lâche brusquement et passe ses mains dans ses cheveux, accrochant quelques mèches avec ses bagues. Je n'ose pas bouger de peur d'aggraver sa colère, mais je commence à perdre patience devant son silence. L'envie de prendre un bain chaud pour détendre mes muscles endoloris est beaucoup trop tentante et l'idée de m'éclipser commence à germer dans mon cerveau. Cependant, je n'ai pas le temps de mettre mon plan à exécution, Zeus me devançant.

– As-tu déjà pu observer le sang des dieux, Pandora ?

Je secoue la tête, captivée par la dague que Zeus promène sur sa main. Je n'ai même pas le temps de me demander d'où il l'a sort, qu'il commence à s'entailler la paume. Un liquide doré, étincelant dans le soleil, suit la trajectoire de la lame.

– Maintenant, si.

La plaie commence déjà à se refermer et un trouble s'installe. Pourquoi Zeus voudrait-il me montrer son sang subitement ?

– Tu ne vois rien de surprenant ?

Je fronce les sourcils. Comment ça ? Il doit lire la confusion sur mon visage. Zeus plonge alors ses yeux dans les miens, levant mon menton à l'aide de son index.

– Regarde mieux. Regarde-toi ma Pandora.

La nausée remue mon estomac pourtant vide. Je n'ose pas baisser le regard, comme hypnotisée face à celui du dieu des dieux. Le froid envahit de nouveau mon corps, laissant courir des milliers de frissons sur mon épiderme. C'en est trop pour moi, alors je me recule lentement de Zeus. Puis je baisse les yeux, sur le sol maculé de mon sang. Un rayon de soleil s'éternise à un endroit. Soudain tout fait sens.

Je me fige, incapable de bouger davantage. Je lève lentement les yeux vers Zeus, qui arbore un large sourire.

– C'est que tu comprends vite.

Je secoue la tête, incapable de prononcer un mot. Mes yeux se pose à nouveau sur la tâche de sang qui étincelle dans la lumière. Je repense à la fois où Arès a vu le liquide s'échapper de mon corps et à sa réaction. Je me souviens là aussi avoir aperçu des paillettes d'or. J'ai alors des tas de questions qui s'agglutinent dans ma tête, prêtes à être posées. Prêtes à recevoir une réponse. Cependant, une seule franchit mes lèvres.

– Pourquoi ?

– Pourquoi quoi Pandora ?

Je sens que Zeus veut m'entendre le dire. Qu'il n'attend que ça. Je serre les poings, le regard toujours rivé à mon sang.

– Pourquoi brille-t-il ?

Le dieu en face de moi éclate de rire. Le tonnerre se joint à la partie, étourdissant mes sens. La tête me tourne et la nausée revient au galop, mais impossible de flancher devant lui. Au bout d'une éternité, il arrête enfin, et la vérité trouve refuge dans mon cerveau.

– Tout simplement car tu es une hybride. Mi-mortelle, mi-déesse. Une demi-dieu qui servira mes plans ! Eructe-t-il, le regard avide.

– Quels plans ?

Là encore, je réponds par une question, agaçant certainement le dieu, mais la tempête qui fait rage en moi n'est rien comparée à celle qui se profile à l'horizon.

– Tu ne veux pas savoir comment tu te retrouves avec notre sang dans tes veines ?

– Pourquoi le voudrais-je ? Seul vous pouvez en donner l'ordre.

Il ricane, et l'atmosphère change imperceptiblement. Ne serait-il pas à l'origine de trait physique chez moi ? Il se rapproche de moi, et une lueur argenté traverse son regard.

– Effectivement, pourquoi vouloir tout savoir.

Il attrape mon visage, avec une poigne solide et je me fige davantage. Si je pouvais m'enfoncer un peu plus dans le sol pour disparaître, je le ferai, mais Zeus exerce une telle pression sur moi que tout mouvement m'est impossible.

– Maintenant, petite maligne, tu vas m'écouter attentivement.

Ses yeux accrochent les miens et je n'y vois rien de bon. Son désir de contrôle et de vengeance tourbillonnent dans un lente danse, dans le seul but de m'envoûter. De me faire flancher.

– Si tu tiens à la vie, et je suis persuadé que c'est le cas, tu as intérêt à faire tout ce que je te dis. C'en est terminé des petites escapades et de ton entêtement à ne pas vouloir apprendre pour ton mariage. Et si tu ne comprends pas, je te montrerais qu'il y a de nombreuses façons pour que cela rentre dans ta petite tête de misérable hybride. Tu n'es pas irremplaçable, bien au contraire.

Les larmes affluent mais je refuse de les laisser couler. Je refuse de paraître faible. Je refuse les termes de Zeus, mais il a raison sur un point : je veux vivre. Je veux découvrir, apprendre, aimer et détester.

Je veux tellement vivre et me connaître. Je veux tellement goûter la large palette d'émotions qui animent les hommes et les dieux.

Alors, fermant les yeux, je commence à hocher la tête. Mais le souffle de Zeus près de mon oreille m'arrête immédiatement.

– J'ai du monde partout Pandora. Vraiment partout. Je suis au courant de bien de choses, des choses que tu as faites, que tu fais et que tu vas faire. Alors ne pense pas être plus maligne que moi.

Il me lâche subitement et commence à s'éloigner, laçant un éclair dans le ciel à l'aide de son poing. Mon coeur bat la chamade et j'ai du mal à reprendre mon souffle tant ma tête tourne. Je pense enfin être tranquille et pouvoir assimiler tout ce que m'a dit Zeus, pourtant, il vient marquer le coup de grâce en se retournant.

– Il est bien dommage que j'ai promis à ce vieux mortel d'Epiméthée ta virginité ma Pandora, tu aurais été un met succulent pour les soirs d'ennui. Peut-être devrais-tu prévenir mon fils de cet arrangement, cela m'éviterait de le punir.

Je n'attends pas de voir s'il a disparu ou non avant de m'écrouler au sol.

Il sait tout.

Mes agissements.

Mes sentiments.

Mes envies.

Et mes peurs.

Il sait pour Arès, alors que j'ai tenté d'être la plus discrète possible. De quoi d'autre est-il au courant ? Est-ce qu'il va jusqu'à connaître les heures auxquelles j'urine et mange ? J'ai envie de me rebeller et de tout envoyer valser autour de moi. Pourtant, je ne le fais pas. Parce qu'il a raison sur un point.

Je me recroqueville sur moi-même, laissant le ciel se couvrir de gris puis pleurer avec moi. Zeus est un être abject mais il a raison. Il a raison sur un point. Je veux vivre. Et si pour ça il me faut rayer de ma vie toutes émotions et les enfermer au plus profond de mon être, je le ferai. Si pour cela il me faut rayer toutes personnes de ma vie, alors qu'il en soit ainsi.

Je viens de signer un accord avec le Mal en personne. Avec le Kakό.


***

Kakό = Le Mal en grec.

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