La Prima Donna

Chapitre 35

Point de vue Noa Nianga

Monaco, Mai 2022

Le poids sur mon plexus plutôt que de s'alléger s'alourdit à l'approche du gala. La garce, en moi, avait fait une apparition fulgurante lors de la préparation de celui-ci. Il serait là et je voulais lui en mettre plein la vue, lui rappeler ce qu'il avait perdu.

D'abord, j'avais sélectionné l'une de mes plus belles tenues pour l'occasion. Ensuite, il y avait le choix des chansons. Bien évidemment, mon répertoire classique eut la priorité, mais j'avais à ma disposition quarante-cinq minutes. Aussi en plus de Schubert qui avait toujours mes faveurs. Je choisis également d'interpréter Lucia di lammermoor ainsi que the Diva Dance. Ces chansons avaient l'avantage de m'avoir fait plus ou moins connaître auprès des fans d'opéra monégasques et de contenir des souvenirs en commun avec Charles. Oui, j'étais ce genre de garce et si cela n'était pas suffisant pour le prouver, ma tracklist contenait également la solitudine et pour encore un peu plus de modernité, We belong together de Mariah Carey.

La dernière chanson avait été choisie parce qu'il s'agissait d'une de ses préférées et qu'il adorait  m'entendre la chanter. Ces paroles étaient pépites. Dans sa chanson, Mariah demandait à un homme de lui revenir. Charles ne serait pas dupe, il me connaissait et saurait que c'était ma manière de lui dire que je ne reviendrais pas. En tout état de cause, je ne savais même pas s'il voulait me reprendre. Mais si c'était le cas...

Ça allait me faire un mal de chien de la chanter, mais cela lui en ferrait tout autant, de l'entendre. La partie de moi qui voulait lui faire du mal avait gagné cette manche. Je n'étais pas désolée et je ne m'en excuserais pas.

Je devais reconnaître à Catherine qu'elle avait parfaitement fait son travail. Quand je sortis de l'aéroport, une voiture m'attendait et m'amena jusqu'à l'hôtel dans lequel je résiderais pour l'occasion. J'avais refusé de passer plus de temps que nécessaire à Monaco, aussi j'étais arrivée le matin du gala et j'avais prévu de repartir dès le lendemain.  Le timming était serré, j'avais à peine eu le temps de préparer mes affaires pour ma représentation que déjà Gianlu toqua à ma porte.

C'est le sourire aux lèvres que je lui ouvris la porte. Il m'avait manqué. Quand je m'étais installée à Monaco, nous nous étions beaucoup rapprochés et c'était étrange de ne plus être en mesure de le voir aussi souvent qu'avant.

-Mia Prima Dona, il dit en claquant deux bises sur mes joues. Tu es prête ? La circulation est folle avec les préparatifs pour le grand prix, il va nous falloir un moment avant de parvenir à l'Opéra.

Je me préparais pour une bataille et j'avais l'avantage d'être en terrain conquis. Il n'avait pas trouvé mieux pour leur gala que de le faire à l'opéra de Monte-Carlo. Ce qui d'ailleurs expliquait pourquoi il tenait absolument à ce qu'une chanteuse d'opéra fasse partie du divertissement pour les invités. Le gala était également une levée de fond pour permettre la démocratisation des sports mécaniques chez un public défavorisé et plus particulièrement chez les femmes. Entre autres, des pièces de collection relatives à la formule 1 comme des casques et des pièces de voiture allaient être mis en vente et j'allais servir d'entracte avant la mise en vente d'une des voitures pilotaient par Ayrton Senna. Le clou du spectacle. L'attention de l'ensemble des invités serait tournée vers moi dans l'attente de la voiture.

L'opportunité était trop belle. Je n'avais pas le droit de me louper. Si ma prestation plaisait, le bouche-à-oreille chez les trusts found baby comme disait Sissi pouvait m'assurer plusieurs étés au soleil. Peut-être même une place de résidente dans un opéra reconnu. Et encore mieux, une popularité suffisante pour sortir mon propre album d'interprétation. Pour une chanteuse d'opéra, vendre des disques sur son seul nom était le saint Graal. Je méritais le saint Graal et je me jetterais avec force dans toutes les opportunités qui me permettraient de l'obtenir.