Chapitre 1

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L'immense colonne de feu se s'élevait face à lui, à une bonne centaine de mètres de la voiture. Noah Stilinski regardait avec inquiétude les différentes nuances d'orangé et de cyan se faire la guerre au sein de ce feu des plus ardents. Un feu dont la véracité et la chaleur n'étaient plus approuvés. Il tourna la tête et regarda derrière lui. Sur la banquette arrière, une glacière, remplie de bouteilles d'eau. Il l'ouvrit une seconde, le temps d'en prendre une. Sur ce, il avala de grandes gorgées d'eau fraîche. Aller dans un désert en été... Ce n'était pas le plus conseillé et pour être honnête, Noah aurait préféré rester à la maison. Regarder le match de baseball qui passait à la télévision cet après-midi, avec Stiles. Echanger sur les performances des joueurs. Partager leur passion commune pour ce sport sans se soucier du reste. Au départ, c'était exactement pour cette raison qu'il avait posé un jour de congé. Il désirait simplement profiter de son garçon.

Oui, mais Stiles s'était levé en sueur, le cœur au bord des lèvres. Il avait levé des yeux rougis dans sa direction. Ses prunelles tricolores avaient pressé Noah de se changer et de l'emmener, tremblant, dans la voiture. Ses lentilles avaient fondu, ce qui signifiait que Stiles ne pouvait que tenter de se contenir avant que ne se produise l'inévitable.

Noah avait roulé vite. Trop vite. Il en était conscient. Peut-être avait-il déjà perçu des points sur son permis et qu'il ne recevrait la notification de ce fait que quelques jours plus tard, dans sa boîte aux lettres. Quoiqu'il s'en fichait complètement. Dans cette situation, la rapidité était de mise. Il en valait de la survie de Stiles... Et de la sienne aussi, dans un sens.

La route avait été longue. Trois heures d'une course contre la montre particulièrement difficile à mener, mais il avait réussi.

Et Stiles était là. Il se vidait. Laissait les flammes jaillir, magistrales et s'élever dans le ciel à un niveau tel que Noah préféra ne plus regarder tant ça lui donnait le vertige. Elles étaient belles, ces flammes. Si la manière dont son fils les maîtrisait le rendait fier, le shérif de Beacon Hills savait que ce n'était qu'une question de temps avant que tout dérape.

Et c'était exactement la raison pour laquelle il avait pris une décision, lorsqu'il roulait. Il y réfléchissait depuis un moment déjà, mais voir l'orangé se battre avec le cyan lui avait permis de se dire... Qu'il n'y avait plus lieu d'hésiter. Il allait démissionner. Noah savait ce qui était réellement important et ce qui comptait pour lui. De l'argent, il en avait un peu. Et ça suffirait largement le temps qu'il trouve un nouveau travail. Quelque chose de moins prenant, de plus léger. Un job qui lui permettrait d'être à la maison le soir et d'avoir du temps à accorder à Stiles – autrement dit, pas juste un jour de congés de temps en temps. Au commissariat, Noah ne comptait pas les heures tant il croulait sous le travail. Plus le temps passait, plus il se rendait compte à quel point c'était stupide. Dans un sens, il fonçait dans un mur. Il fallait que les choses changent, autrement... Il le regretterait fort.

En fait, c'était déjà plus ou moins le cas et la douleur qu'il ressentit en relevant les yeux vers la tour de feu était réelle. Elle lui perçait le cœur. Face à lui se trouvait le temps qu'il avait perdu et qu'il ne pourrait jamais rattraper. Ses doigts se serrèrent sur le volant et il se força à garder les yeux rivés sur l'œuvre de son fils.

Le pire, c'est que c'était magnifique à regarder.

Juste magnifique.

xxx

Stiles somnolait sur le siège passager pendant que son père roulait. Cette fois-ci, pas besoin de se presser. Ils avaient le temps et surtout, Noah tenait à ce que son fils se reposer sans problème. Alors, il y allait doucement. Prenait les dos-d'âne avec une délicatesse inouïe et évitait les secousses au maximum. Maintenant qu'il s'était purgé d'une partie de ces flammes qui menaçaient sa vie en permanence, Stiles était épuisé. Noah détestait la manière dont sa tête bougeait à cause d'une manœuvre un peu trop brusque. Dans ces moments-là, Stiles paraissait mort et l'on dirait une poupée désarticulée. Noah détestait ça. Son hyperactif de fils, c'était une pile électrique. Quelqu'un qui ne s'arrêtait jamais de bouger et qui débordait d'une énergie incroyable... Quand celle-ci ne le dévorait pas. Là, dans les vêtements que son père l'avait aidé à enfiler, Stiles semblait soudainement trop fin, trop petit. Comme s'il avait maigri, alors qu'il n'en était rien. Sa peau ? Son teint s'était éclairci et affadi au point d'en devenir pâle. Presque maladif. Noah savait que ce n'était qu'une question d'heures avant que son garçon ne récupère, mais... Chaque fois, c'était difficile à voir. A supporter.

Noah scruta les émotions de Stiles sans plus quitter la route des yeux. Il alla les effleurer sans un geste physique, juste avec son esprit. Elles étaient stables et quelque peu fades, à cause ou plutôt grâce à son épuisement des plus clairs. Dans un sens, c'était une bonne nouvelle, parce que cela voulait dire que Stiles allait bien. Il se gérait. Arrivait à réguler ce qu'il ressentait et ce, même après la purge qui avait commencé à montrer quelques différences avec les précédentes.

Déjà, c'était la première fois que Stiles faisait fondre ses lentilles au réveil et qu'il lui demande de le conduire au désert. Noah n'avait jamais été contre de l'accompagner mais d'ordinaire, c'était l'hyperactif qui s'y rendait seul, parce qu'il le pouvait et qu'il aimait se gérer à ce niveau-là. Evidemment, il prenait le temps de récupérer quelques heures avant de reprendre la route pour Beacon Hills. Cette fois-ci, ce n'était pas possible. Stiles avait eu besoin d'aide et ça, c'était mauvais signe. Quant à sa purge en elle-même... La colonne de feu dont il était à l'origine n'était pas comme d'habitude. Si Noah avait coutume d'apercevoir les flammes cyans au milieu des orangées, il ne les avait jamais vues à un tel niveau. Il y avait presque autant de bleu que d'orange. La première couleur était synonyme de mort tandis que la seconde représentait la vie. Elles se battaient férocement, mais l'orangé était doucement en train de perdre du terrain.

Enfin, ce que retenait Noah pour ne pas déchanter, c'était le bien-être – même s'il était quelque peu relatif – de son fils.

Stiles était un être extraordinaire, mais faisait partie d'une meute qu'en tant qu'humain. Officiellement, il n'était rien de plus qu'un jeune homme hyperactif qui allait et venait, aidait ses amis poilus à régler certaines affaires au ton surnaturel. C'était dangereux et il avait manqué de perdre la vie à plusieurs reprises, mais... Ça le rendait heureux. D'être un humain, également. Et même si Noah savait qu'il mourrait d'envie de montrer ce dont il était capable à ses amis et ainsi les protéger efficacement, Stiles se retenait et jouait la comédie à la perfection. A sa manière, il se fondait dans la masse et son amour pour l'humanité en tant que tel l'y aidait grandement. Car si Stiles était en réalité un concentré de puissance capable des pires comme des meilleures choses, il avait toujours rêvé de se retrouver dépourvu de pouvoirs. De vivre, en ayant juste à se soucier d'une manière de sauver sa peau comme s'il n'était pas capable de le faire.

Du coin de l'œil et alors qu'il continuait de rouler tranquillement, Noah vit Stiles papillonner des yeux mais ne lui dit rien. Le laissa se réveiller à son rythme, même si ce n'était que pour peu de temps. Et alors qu'il s'attendait à ce qu'il lui pose des questions comme il en avait l'habitude, Stiles resta silencieux. Il regarda l'horizon d'un air absent.

- J'ai chaud, souffla-t-il au bout d'un moment.

Sans un mot, Noah enclencha la climatisation.

- On a encore des lentilles à la maison ?

- Plus beaucoup, répondit le shérif. Pas plus de quatre paires. Il va falloir qu'on fasse attention.

Stiles soupira. Dire qu'il était fatigué serait un euphémisme.

- Désolé, Papa.

Sa bouche était pâteuse et il réduisait ses phrases au strict minimum. Economisait ses mots. Noah tapota son genou d'un geste paternel sans un sourire, ni un regard. Il conduisait lentement, mais il continuait de faire attention à la route.

- Ce n'est pas ta faute, fils.

Si Stiles ne rétorqua rien, Noah sentit dans ses émotions qu'il n'en pensait pas moins. Pas plus d'une minute plus tard, l'épuisement le happait de nouveau dans les limbes du sommeil dont il avait terriblement besoin.

Ce fut au tour de Noah de soupirer. C'était seulement le début, mais... Il avait l'impression que celui-ci avait déjà des échos de fins.

La résurgence du phénix 2.0Où les histoires vivent. Découvrez maintenant