Chapitre 4

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Le réveil du lendemain fut dur, très dur et Stiles eut bien du mal à sortir de son lit si moelleux, si grand, si confortable. Et même alors qu'il se frottait les yeux, il se sentait à nouveau appelé par le sommeil et son oreiller – le seul avec lequel il arrivait à dormir depuis tout petit. Néanmoins, il ne céda pas. L'air de rien, il avait une journée de cours à assurer... Et une réunion de meute à assumer. Si les deux se fusionnaient dans sa tête en une seule et même épreuve titanesque, Stiles se devait de les affronter comme deux entités distinctes. L'attention que l'on aurait sur lui ne serait pas la même, idem pour son intensité. Au lycée, on se centrerait sur les cours. A la limite, on lui demanderait la raison de son absence, s'il était plus en forme, rien de plus. La réunion s'avèrerait toutefois être une autre paire de manche. Puisque le loft serait exclusivement rempli de métamorphes – Lydia mise à part –, Stiles devrait faire d'autant plus attention à ce qu'il laissait s'échapper de lui en termes d'odeurs. Dans une salle de classe, elle pouvait aisément se fondre parmi celles des autres humains : déceler d'éventuelles émotions négatives s'avèrerait quelque peu difficile. A sa manière, Stiles noyait le poisson en se permettant quelques écarts lorsqu'ils étaient en cours. A contrario, il n'avait pas la moindre envie d'avoir à exercer un contrôle total sur sa personne. En temps normal, cela ne le dérangeait pas tant que ça – il avait l'habitude. Néanmoins, pour une raison qui lui échappait, Stiles avait cette fois-ci un petit peu plus de mal à garder la tête froide, à ignorer sa condition. Il n'avait pas l'habitude que celle-ci le rende triste, tout comme il n'était pas accoutumé à cette fatigue de plus en plus lourde. Au départ, ça allait, c'était à peine s'il avait envie de dormir. Les choses étaient allées crescendo et voilà où il en était.

A se lever, fatigué au possible alors qu'il avait passé la moitié de la journée de la veille plus cette nuit à dormir comme un bébé. Il était clair qu'il mettrait du temps à rattraper tout ce qu'il avait perdu en énergie durant sa purge. Cela signifiait donc qu'il réduirait au maximum ses sorties après les cours pour ainsi s'accorder le plus de repos possible et ainsi de suite, jusqu'à ce que son corps n'en puisse plus. Stiles soupira et s'étira. En attendant, il se devait de vivre. En ce qui concernait l'organisation quelque peu étrange et dissimulée de sa vie, il aviserait au fur et à mesure.

C'était là que la réunion de la meute l'embêtait.

Stiles se savait menteur. Par la force des choses, certes, mais les faits étaient là : il ne passait pas un jour sans mentir. Il cachait qui il était, ce dont il était capable... Ne donnait à voir que ce personnage qu'il s'était construit : celui d'un humain dont l'arme principale se résumait à la parole. Il s'agissait là d'une belle ironie qui s'avérait d'autant plus visible lorsque l'on connaissait la vérité à son sujet. Si ce fait le dérangeait moyennement en général, l'hyperactif se retrouva pris de remords qui retardèrent un peu plus encore son lever officiel. Il resta un moment là, assis au bord de son lit, pensif. Était-ce réellement juste que de faire perdurer cette mascarade ? En réalité, la question ne se posait même pas et Stiles le savait. Le mensonge était, pour Noah et lui, l'unique moyen de vivre un semblant de vie normale. C'était ainsi qu'ils survivaient depuis des années... Ainsi qu'ils finiraient leur existence, l'un plus tôt que l'autre.

Mais pour Stiles, ce n'était là qu'un détail.

L'hyperactif vit avec mollesse la porte de sa chambre s'ouvrir sur son père, déjà en uniforme, prêt à travailler. Il se fit alors la réflexion qu'il y en avait au moins un qui était motivé à affronter sa journée... Et s'imagina que la situation ne le touchait pas vraiment, contrairement à lui. Si Stiles se fourvoyait complètement, cette idée lui donna néanmoins la force de se dire qu'affronter tout ça était possible. Il lui suffisait de faire des efforts, de se bouger les fesses. Si son paternel y arrivait, pourquoi pas lui ?

Ainsi, il força un sourire fatigué.

- Salut papa, fit-il d'une voix pâteuse.

- Bonjour Stiles, répondit Noah en haussant en sourcil. Tu es presque...

- En retard, je sais, le coupa le châtain avant de se frotter les yeux. J'ai un peu de mal à me lever ce matin, désolé.

Noah le toisa un instant avant de lui faire un signe de tête. Si une personne extérieure pouvait trouver l'attitude du shérif froide, il n'en était rien. C'était juste l'habitude : ici, on économisait les mots et es gestes depuis toujours. Il n'y avait que depuis quelques temps que les deux Stilinski tentaient l'un et l'autres des rapprochements de ce type.

Stiles se leva alors et le suivit jusqu'à la cuisine, où il eut la surprise de découvrir sur la table un petit-déjeuner de roi. Il le fixa quelques secondes avant de sentir la main de son père se poser sur son épaule. De là, une chaleur certaine l'envahit de l'intérieur. Si Stiles n'était pas du genre à se retenir, il aurait déjà pleuré. Noah avait toujours été un bon père, mais le voir faire des efforts de ce genre et lui faire plaisir avec des choses aussi simples que celle-ci le touchait réellement. Il savait son père toujours très pressé d'aller travailler et Stiles ne comptait plus les fois où il était parti au lycée sans avoir pu le voir car déjà parti. S'il lui était déjà arrivé d'avoir un petit pincement au cœur à ce sujet, jamais il ne lui en avait voulu. Tant que Noah était heureux dans son travail, ça lui allait. Pour le reste, il s'adaptait.

Constater qu'il prenait un peu plus de temps pour lui le ravissait et faisait naître en lui une émotion qui n'aurait pas dû être aussi forte qu'à cet instant précis. Alors, le « merci papa » qu'articula Stiles fut un peu rauque et le regard qu'il lui lança, fébrile. Mais son sourire gagna en sincérité. En fait, l'attention lui mit suffisamment de baume au cœur pour qu'il puisse se convaincre que cette journée allait bien se passer, qu'il réussirait à en affronter chaque obstacle sans encombre. Noah sourit à son tour et toute cette froideur de façade prit un autre sens.

L'étreinte qui réunit ensuite les deux Stilinski fut brève, mais pas sans sens. Leur relation père-fils évoluait un peu tard, et chacun tendait vers l'essentiel... Même si c'était quelque chose qu'ils auraient dû faire avant. Avant. Avant. Ce mot, qui ne cessait de tourner dans la tête de Stiles, atténua quelque peu la joie qui l'avait envahi, mais pas suffisamment pour l'éteindre.

Un quart d'heures plus tard, il se retrouva seul devant son petit-déjeuner de roi, à le dégommer comme si c'était la dernière fois qu'il mangeait. Quitte à devoir assurer toute une journée ainsi qu'un bon début de soirée – la durée d'une réunion de meute variait en fonction de son sujet –, autant ne pas négliger le repas le plus important de la journée. Honorer la petite attention de son père était également obligatoire à ses yeux. Ensuite et même s'il n'avait plus beaucoup de temps devant lui, Stiles se doucha et se prépara correctement. Avant de sortir de la salle de bain, il se regarda dans le miroir. Il restait peu convaincu par ses lentilles mais si son père trouvait qu'elles faisaient parfaitement illusion... Il devait le croire et surtout, ne rien montrer de sa peur, une fois qu'il serait au lycée et surtout, faire comme si rien n'avait changé chez lui. Parfois, c'était en se persuadant soi-même d'une réalité qu'on parvenait à convaincre les autres qu'elle l'était.

Stiles verrait bien si ce dicton fonctionnait ou non.

La résurgence du phénix 2.0Où les histoires vivent. Découvrez maintenant