Chapitre 6

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Stiles avait l'habitude de vivre dans l'analyse. Il scrutait chaque chose qu'il voyait, sentait, entendait. Si ses capacités surnaturelles étaient largement bridées par ses lentilles aux inhibiteurs surpuissants, l'hyperactif gardait un semblant de perception psychique. C'était d'ailleurs aussi rassurant que frustrant. Il n'était pas complètement aveugle sur le plan mental, mais passablement vulnérable physiquement parlant. Il se savait fort... Avec ses pouvoirs. Sans, il était aussi fragile qu'un enfant perdu sur le territoire d'une troupe de mercenaires surentraînés. Car si les Psis ne régnaient pas sur Beacon Hills, il n'était pas à l'abri d'une attaque surprise. Sa vie, elle était ainsi depuis le début de leur désertion, à son père et lui : la désertion d'un monde qui ne tolérait pas leur existence.

Ainsi, il avait méticuleusement suivi la réunion de meute qui avait eu lieu quelques jours plus tôt, tout comme il avait scruté l'entièreté de la route pour rentrer chez lui et surveillé qu'on ne le regardait pas pénétrer à l'intérieur de sa maison. Les voisins fouineurs ou tout simplement curieux, ça existait : mais Stiles connaissait leurs regards.

Et il savait ce genre de personnes très enclines à la collaboration.

Par chance, son voisinage ne l'était pas, mais il faisait attention. La moindre imprudence pouvait lui coûter cher. Aussi se montrait-il aussi précautionneux que possible tout en ayant l'air naturel. La comédie, il connaissait. Des années qu'il se fondait dans la peau d'un humain tout à fait lambda dont la seule particularité était de connaître le surnaturel, de faire partie d'une meute. Au niveau de son comportement et de sa couverture, il était irréprochable. Il était même rare qu'il aborde avec son père le sujet de leur nature commune. L'oublier, c'était être davantage humain. Et si cette condition avait ses désavantages, elle restait celle que Stiles aimait le plus malgré tout. Qu'il était simple de vivre ainsi, sans rien... Parfois, ses pouvoirs lui manquaient tant qu'il devait se faire violence pour les garder enfouis au fond de lui, mais... Leur sommeil entretenait sa tranquillité. Alors oui, l'humanité était le meilleur choix qu'auraient pu faire les deux Stilinski.

Mais Stiles, lui, était fatigué. Par chance, les vacances étaient arrivées fort vite et avec elle, une liberté certaine quant à son repos. Ainsi, plus besoin de faire semblant, d'axer sa comédie sur sa forme, ni même de se justifier : l'on connaissait Stiles et l'on savait qu'il aimait s'enterrer dans son lit des jours durant... Sans jamais penser à autre chose qu'à un amour pur et simple du sommeil. Qu'on le juge comme étant un flemmard lui allait parfaitement car de cette façon, on ne lui posait pas la moindre question et Stiles pouvait occuper ses vacances comme bon lui semblait. L'exception ? La meute. Si un danger débarquait à Beacon Hills ou si on l'appelait en urgence... Là, il couperait court à son enchaînement de siestes.

Et c'est ce qui se passa ce jour-là.

- J'espère que tu as une vraie bonne raison pour détruire ma grasse matinée, Scotty, maugréa Stiles.

Il venait de décrocher l'appel dont la sonnerie avait transformé son téléphone en un orchestre fou. L'hyperactif aurait pu le mettre en silencieux s'il ne ressentait pas le besoin de se rendre disponible. Ça collait à son personnage... Et à sa personnalité en elle-même. Quitte à ne pas utiliser ses pouvoirs et, par extension, à compliquer la résolution de leurs différentes missions, autant compenser en se sachant prêt à utiliser son cerveau et à aider dès qu'on l'appelait.

Néanmoins, cela n'enlevait rien au fait que Stiles était devenu, par la force des choses, un gros dormeur. Le sommeil, il en avait besoin... Peut-être plus que n'importe qui en ce moment. Les choses n'iraient pas en s'arrangeant et il en avait diablement conscience, alors il tenait à profiter au maximum de ces quelques jours de tranquillité où la majorité de son temps libre serait utilisé dans ce but des plus simples.

Mais Stiles était véritablement serviable et à ses yeux, la meute pouvait passer avant tout le reste.

- Des morts, lui répondit directement Scott. Je pense que c'est suffisamment important pour que tu remettes ta grasse matinée à plus tard.

Stiles cligna des yeux, complètement réveillé cette fois-ci.

- Toi, tu sais comment me parler, fit-il en se redressant, désormais complètement alerte.

La mort, c'était quelque chose qu'il connaissait, qu'il côtoyait de façon si régulière qu'il avait appris à ne plus en avoir peur – excepté concernant son cas. Ça, c'était une autre histoire... Elle faisait partie de celles qu'il ne partageait pas. Son jardin secret devait bien contenir quelque chose pour continuer d'exister...

- C'est surnaturel comment ? S'enquit directement l'hyperactif. Surnaturel avec des crocs ? Surnaturel avec de la magie ? Surnaturel avec...

- Je ne sais pas, le coupa son meilleur ami en soupirant. Je n'ai jamais vu ça, j'ai l'impression que c'est quelque chose de nouveau, quelque chose auquel on n'a peut-être jamais eu affaire. Peut-être que je me trompe, mais ce que j'ai vu... Ça ne me rappelle rien.

Si Stiles comprenait parfaitement l'horreur qui se laissait entendre dans la voix de Scott, il n'en mesurait pas encore l'importance. Loin de se douter qu'elle ferait bientôt écho en lui, il laissa sa curiosité morbide demander de plus amples détails.

- Je vais t'envoyer les photos que m'a transmises Parrish et tu me diras ce que tu en penses. Accroche-toi, c'est vraiment... Ça secoue.

Stiles fronça finalement les sourcils tout en repoussant sa couette. Il connaissait Scott comme étant un garçon sensible, mais des horreurs, il en avait vu des tas – en particulier ces dernières années. Que s'était-il donc passé ? A quoi ressemblaient ces morts qui semblaient le secouer si fort qu'il le mettait lui, Stiles Stilinski, en garde ? Pourtant, Scott le connaissait et savait qu'il en avait vu autant que lui, si ce n'est plus – son père laissait parfois traîner des dossiers aux éléments particulièrement... Choquants. Mais Noah était un peu tête en l'air parfois et... Ne s'imaginait pas à quel point son fils pouvait se montrer curieux. Stiles lui-même devait reconnaître qu'il regrettait certaines de ses investigations... Dont certaines images avaient marqué à vie son esprit malléable d'enfant, puis d'adolescent. Il y avait des choses qu'il n'aurait pas dû voir. Qu'est-ce qui pouvait être pire que cela ?

- Tu les analyseras et... Tu me rappelleras pour me faire part de tes conclusions le plus vite possible. Peut-être que tu as déjà vu quelque chose de semblable dans une des encyclopédies que Deaton t'a prêtées...

Et Stiles entendait l'espoir dans son ton, l'espoir de pouvoir mettre un nom sur ce qui avait causé la mort de ces gens. Quelques instants plus tard, ce fut le silence. Scott avait raccroché. Le téléphone de l'hyperactif vibra, affichant une notification de message. De la part de son meilleur ami, il avait reçu deux photos. Il en conclut donc qu'il y avait deux morts, deux cadavres. Et si même affronter ce genre de vision ne l'enchantait pas vraiment, il appuya sur la notification.

Et se retrouva figé.

Bien sûr que les images en elles-mêmes étaient horribles. Regarder un cadavre n'était jamais plaisant. Stiles, ça lui donnait toujours des frissons malgré l'habitude qui s'était doucement installée dans sa vie. Mais là, les choses étaient différentes... Tant et si bien qu'il manqua de lâcher son téléphone.

Scott lui avait dit de s'accrocher : Stiles faisait au mieux et même ça, ce n'était pas suffisant. Comment cela pourrait-il l'être ? Scott l'avait, sans le vouloir et surtout, sans le savoir, mis face à une chose... Une dimension qu'il pensait bien loin de lui. Alors oui, par ces photos, Stiles vécut l'enfer. Se rendit compte qu'ils n'étaient pas à l'abri... Ni son père, ni lui. La gorge sèche, il s'efforça de réagir. De ne pas rester paralysé par la terreur qui s'emparait si rapidement de lui. Il enleva ces photos de sa vue, éteignit son téléphone. Un sentiment d'urgence le prenant, il n'hésita pas une seconde et malgré la dangerosité de son geste, il le fit.

Il retira ses inhibiteurs.

La résurgence du phénix 2.0Où les histoires vivent. Découvrez maintenant