Les Feuilles Mortes - Rantbook

Lettre 2

Même jour. Même heure. Un an en arrière. Je lisais du prévert sur cette même table. C'est beau Prévert, tu sais.

Même jour. Même heure. Un an après Tout est pareil. Sauf toi. Ton absence est plus pesante. Cette fois tu ne respires plus nulle part.

Quelques vers pour remplir mon monde de douceur. Mon vernis bleu écaillé. Le vent dans mes cheveux ondulés. Les yeux plissés. Le soleil. Mon maquillage qui coule. Et de belles personnes autour. L'été qui s'enflamme. Et toujours ton absence.
Mais cette fois c'est différent.

Tout devient mélancolie. Ce ne sont pas les rimes de Prévert qui sont devenues laides. C'est moi. Le regard que je jette sur le monde.

J'ai nos discussions dans la tête. Ta colère. Ta tristesse. Je les ai dans mon ventre.

On n'était pas si différents. La rage dans nos paroles. La solitude autour de nous. Mais j'en ai marre de toute cette colère. Je veux sortir de ma tête, tu comprends ? À la différence, tu n'as jamais accepté de grandir. Tu t'es accroché au chagrin jusqu'à ce que la mort vienne te chercher. Tu t'es construit un monde de mensonges dans lequel te cacher.

Ils ne peuvent pas comprendre, tu sais. Ce que ça fait. La douleur. Perdre le peu qu'on a. Perdre notre plus grand espoir. Ils ne peuvent pas comprendre que le peu qu'on a, c'était déjà beaucoup.

Enfin voilà. Je voulais juste te dire que je ne t'en veux pas. J'imagine que c'est trop tard pour te le dire. Mais je te le confie quand même.

Ils ne peuvent pas comprendre, tu sais, que je te pardonne tout. Parfois, moi non plus d'ailleurs. Mais je préfère garder les étoiles, l'écriture, les chansons, et ta voix à en faire saigner mes oreilles.

J'ai compris, maintenant, que ce n'était pas de ma faute. J'ai compris que tu ne savais pas comment aimer. Comment prendre soin de toi. Je ne peux pas t'en vouloir. Je suis cabossée, moi aussi. Mais je vais me consoler, tu sais. Demain, ça ira mieux.

Tu me manques,
H.