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La première fois que je l'ai vue, je ne me suis même pas remis en question sur ma croyance que « le coup de foudre, ça n'existe pas ».

Je n'ai même pas réfléchi, en fait. C'est tombé comme ça ; je l'aimais.

Nathalie est très belle, bien sûr, avec ses yeux bleus, sa taille fine et ses longs cheveux bruns. Mais je ne pense pas que je l'aime pour son physique. Pourtant, côté caractère, je ne comprends pas pourquoi elle m'a attiré. Mais elle était tellement différente des autres. Silencieuse, mais pas timide. Simplement distante.

J'ai essayé de me rapprocher d'elle, mais elle était beaucoup plus inaccessible que prévu. Ça aurait dû me décourager, de voir qu'elle n'ouvrait la bouche que pour dire des trucs cassants. Mais non, de la voir si différente et inaccessible ne m'a fait que l'aimer encore plus.

J'ai essayé d'attirer son attention, mais elle restait insensible. Pire, j'avais l'impression de la saouler ou de l'énerver.

Bon, j'avoue, je faisais peut être un peu le crâneur...

Hé, quoi, c'est normal de vouloir montrer à une fille qu'on aime qu'on est fort !

Oui, je voulais l'impressionner. Résultat, à chaque fois que je faisait une démonstration devant elle, elle levait les yeux au plafond ou soupirait.

J'ai fini par comprendre qu'il fallait m'y prendre autrement. Enfin, je ne l'ai pas compris, je l'ai découvert.

Je me doutais que sous ses airs revêches, elle devait cacher un lourd secret, et j'étais bien décidé à lui soutirer.

Quand mon père, un soir qu'il parlait de son travail autour de la table, m'a raconté qu'il y avait des traces dans la glace le matin et qu'il devait la lisser, j'ai trouvé ça bizarre et j'ai voulu en savoir plus.

Je crois que j'ai toujours rêvé de faire des enquêtes comme dans les romans policiers, et faut croire que j'avais du flair ! Même si évidemment, je n'avais pas du tout deviné que c'était Nathalie qui venait patiner la nuit, je ne suis pas Sherlock Holmes non plus...

Du coup, à force d'espionner le travail de mon père, j'ai réussi à comprendre comment retrouver les enregistrements des caméras de surveillance. Et à les voir...

Et quand j'ai vu que c'était Nathalie... J'ai immédiatement cessé de l'aimer.

Mais non, je blague ! Bien sûr que si, au contraire, je la trouvais génialement courageuse de faire ça ! (s'introduire dans la patinoire au milieu de la nuit, oui oui, c'est un exploit, et non pas un méfait!)

Je suis donc moi-même allé dans la patinoire la nuit, jusqu'à la rencontrer. Et là... ça a marché ! Enfin, elle m'a parlé gentiment ; enfin, il a pu se passer quelque chose entre nous ! On a juste discuté, mais, c'était un bon début. Je veux dire, un meilleur début que ses soupirs excédés devant mes prouesses.

Et puis, j'ai de nouveau espionné mon père et j'ai réussi à trouver les numéros des inscrits du club de la patinoire. J'ai donc pu envoyer un message à Nathalie, et elle l'a bien accepté.

Est ce que je suis dingue ? Oui.

Complètement givré.

Mais je suis fou d'elle... de Nathalie.

Enfin bon, même avant Nathalie, j'ai toujours été un peu fou-fou. Petit, je faisait pas mal de bêtises. Mais je n'aurais jamais pensé fouiller dans le bureau du travail de mon père pour dénicher le numéro d'une fille...

Maintenant, on est amis, et c'est cool. D'ailleurs, nous nous sommes retrouvé dans un parc pour discuter.

-Franchement, je ne comprends pas comment t'as fait, me dit-elle subitement.

-Pour ?

-Les vidéos de surveillance, mon numéro de téléphone...

-Dixit celle qui rentre dans la patinoire à minuit...

En retour, elle m'adresse un de ses regards qui tue, son fameux magnifique regard glacial.

-Mais heu.. Au fait, ça ne t'avait pas dérangé que je te contacte comme ça, sans prévenir ?

-Non, ça m'a plus étonné qu'autre chose. Et je t'ai tout de suite enregistré ton numéro sous le nom « Matt la grosse tête ». Ajoute-t-elle avec un sourire narquois.

-Pfff, et moi qui t'avais gentiment enregistré sous le nom « Nathalie la jolie » ! Puisque c'est comme ça, je vais te renommer en « La foldingue mangeuse d'esquimaux » !

-Quoi ?! Même si j'aime les glaces, c'est toi le plus fou entre nous deux ! Alors moi je vais te renommer en « Matt le mec le plus givré » !

Je voulais continuer le « débat », mais je ne peux me retenir plus longtemps et j'éclate de rire. Nathalie, à mon plus grand bonheur, esquisse elle aussi un petit rire.

-Tu sais quoi ? Je crois que je préfère que tu me renomme en « Matt le givré » plutôt que « Matt la grosse tête »...

Elle me jette un regard indéfinissable.

-Tu sais que je plaisantais ? Sur mon téléphone, ton contact s'appelle bien Matteo, hein !

Je me frotte la nuque. Et oui, bien sûr, moi aussi je plaisantais... Hum hum...

-Bon, à part ça tu veux bouger ? Je demande pour détourner la conversation.

-Moui. Tu veux faire quoi ?

« N'importe quoi, tant que je suis avec toi », je pense. Mais bien sûr, je ne lui dit pas. À la place, je lui propose la seule chose qui vient en tête :

-On peut aller au ciné, voir si il y a un truc bien...

Je regrette aussitôt ma décision. Le cinéma, c'est un gros cliché de date amoureux !!!

Nathalie fronce les sourcils, l'air de pas trop comprendre. J'espère qu'elle n'a pas compris...

-Pourquoi tu veux aller au ciné ? On ne va au cinéma que si on a vu qu'il y avait un truc bien au programme, on ne va pas voir comme ça, à n'importe quelle heure, si jamais on peut tomber sur un truc bien !

-Bah... Pourquoi pas ?!

Elle se met alors à réfléchir à ma proposition. Ouf, elle n'a pas compris, elle était juste étonnée parce que ce n'est pas dans son fonctionnement habituel.

-Ok, allons voir, et si il n'y a rien d'intéressant ça nous aura fait faire une petite marche.

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Au cinéma, rien ne lui a plu. Je lui ai proposé un dessin animé, à la limite, mais elle a dit que ça avait l'air débile. La façon dont elle a prononcé le mot "débile" m'a bien fait rire, d'ailleurs. Et du coup, on est repartis.

Nous avons passé le reste du chemin a discuter, puis je l'ai raccompagnée jusqu'à chez elle et je suis rentré chez moi.

C'était une après-midi très simple, et pourtant je l'ai appréciée.


Esprit givréOù les histoires vivent. Découvrez maintenant