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Je ne me suis pas décrit, d'ailleurs, j'étais sûrement trop occupé à parler de Nathalie. Je ne suis pas spécialement beau, mais je pense que je suis « pas mal ». J'ai la peau un peu mate, des yeux marrons foncés, et des cheveux noirs bouclés, mi-long comme Finn Wolfhard ou Timothée Chalamet (c'est bien, Matt, compare toi à des acteurs célèbres, t'auras pas du tout l'air prétentieux...).

On dit souvent que je dégage une énergie positive et dynamique, mais bon, je n'en sais trop rien.

Pourquoi je pense à ça ? Tout simplement parce que je suis devant un miroir, et que pour une fois, sans raison apparente, je me regarde. Je ne m'admire pas, (hum, la prétention est un sujet délicat chez moi !) je m'observe, je m'étudie.

Je me demande si je suis beau. J'espère que je suis beau. Enfin, je voudrais juste que Nathalie me trouve beau. Moi je la trouve tellement belle !

Bon, il faut que je me réveille, là, le temps passe et je fais n'importe quoi.

Je sors de la salle de bain, cours dans ma chambre et attrape mon sac de sport avec un sourire : Je vais au patinage !

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Ce qui est cool quand on habite juste à côté de la patinoire, c'est qu'on peut partir au dernier moment et ne pas arriver en retard.

Enfin, là, je suis un peu juste quand même.

Pour compenser, j'attache mes patins à toute vitesse. Résultat : je suis obligé de recommencer parce que j'ai fait n'importe quoi. C'est une loi de la nature, ce truc ; quand tu es pressé tu fais toujours n'importe quoi et tu mets beaucoup plus de temps que d'habitude. C'est très chiant.

Bref, finalement, je n'ai que quelques minutes de retard. Les autres sont en train de faire des tours de glace et je m'insère facilement dans le groupe. Immédiatement, je me mets à discuter avec l'autre garçon, tout en patinant (en arrière, pour rajouter du fun).

Après avoir lancé une playlist, Jeanne, la prof, nous rejoint.

-Salut tout le monde ! Bon, aujourd'hui, j'ai envie qu'on fasse un cours un peu différent.

J'arrête de faire des pirouettes pour l'écouter.

-Je voudrais qu'on se mette en binômes et qu'on essaye de faire du patinage de couple.

Tout le monde se met chuchoter : certains sont super contents, d'autres ronchonnent et se plaignent de la difficulté.

-Chuut ! Dit Jeanne. Si vraiment c'est trop dur pour vous, on... Matteo !!

Je me retourne vers elle. Pourquoi c'est toujours moi qu'elle interpelle ? Bon, ok, je suis peut être le seul qui discute ou patine pendant qu'elle parle...

Jeanne fronce les sourcils puis reprend comme si de rien était.

-Donc, vous allez vous répartir en groupes de deux. Les garçons, comme vous êtes deux, vous pouvez vous mettre ensemble et on fait des groupes...

Sans l'écouter, je tend la main à Nathalie.

Celle ci me regarde, un mi-étonnée, mi-hésitante, puis elle prend ma main.

« Yeees ! » je hurle dans ma tête. Non seulement j'ai toujours rêvé de faire du patinage en couple, mais en plus avec Nathalie ! Trop bien.

Jeanne m'aperçoit à côté de Nathalie et soupire.

-Bon, il semblerait que Matteo n'en fait encore qu'à sa tête. Qui se met avec qui, là ?

J'espère que l'autre garçon, Daniel, trouvera une partenaire parce que désolé pour mon égoïsme mais je préfère largement patiner avec mon crush...

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-Alors, il faut qu'on patine à la même vitesse, en se tenant la main... Mais tu es plus grand que moi ! Attends... On lève quelle jambe ?

Je rigole.

-Mais c'est pas grave si je suis plus grand, être synchronisé ne signifie pas faire la même taille ! Et pour la jambe, on lève la gauche ?

-Ok. Ouais, je suis droitière donc je préfère lever la jambe gauche aussi.

Avec plus ou moins de difficultés, les binômes se mettent en place sur toute l'étendue de la patinoire. Dans un premier temps Jeanne nous a simplement demandé de patiner en nous tenant la main, histoire de nous habituer à travailler à deux.

Je n'ai pas pu m'empêcher de repenser à la nuit de Noël où Nathalie et moi avions patiné ensemble.

Du coup, c'était assez facile pour nous. Maintenant que tout le monde a réussi à patiner en synchro (à part deux filles qui ont foncé dans la balustrade et sont tombées par terre, ça allait globalement), Jeanne nous demande des trucs plus compliqués. Nathalie et moi devons patiner main dans la main puis monter la jambe en arabesque.

En fait, on pourrait penser que c'est casse-figure, mais c'est assez facile. Les bases qu'on a déjà apprises nous permettent d'être stables et assurés ; la seule chose qui change, c'est qu'on doit apprendre à fonctionner à deux. Et ça marche.

Enfin, pour nous en tout cas. Du côté des autres binômes, ça ne se passe pas toujours bien. Beaucoup s'emmêlent les pieds, ou n'arrivent pas à suivre un même rythme. Plus de peur que de mal, heureusement, et même plus de rire que de mal, puisqu'on n'entend presque pas les bruits des patins avec tout les pouffements et les rires.

En sortant, je rattrape Nathalie. J'essaye de ne pas être collant, mais bon, c'est difficile.

Elle fait toujours une tête un peu... comment dire... pas contente. Mais je ne pense pas que ce soit moi, j'ai l'impression qu'elle est toujours comme ça : grognonne. Je me demande si c'est son père qui lui manque.

Quand elle m'a raconté le divorce compliqué de ses parents, j'ai senti que quelque chose se relâchait en elle. Je suis content qu'elle se soit confiée, car non seulement ça veut dire qu'elle me fait confiance, et en plus, ça l'a soulagée d'en parler.

Mais j'aimerais l'aider plus que ça.

-Au fait, il s'appelle comment ton père ? Sans vouloir être indiscret.

Nathalie échange un instant sa tête grognon contre une tête déconcertée.

-Marc Royer, pourquoi ?

-Non, comme ça, pour savoir...

Mon cerveau s'envole dans un petit nuage. Si seulement j'étais Sherlock Holmes, je pourrais retrouver son père ! Ou alors, il faudrait que je sois un agent secret, ou... Pff, dans les histoires, c'est trop facile.

N'empêche, je ne peux pas m'arrêter de penser à la joie que ressentirait Nathalie si elle retrouvait son père...


Esprit givréOù les histoires vivent. Découvrez maintenant