Chapitre 5

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En descendant du traineau, Soona prit le temps d'observer les pins qui l'entouraient et de s'imprégner de leur parfum doux et hivernal. Soudainement, elle se sentit submergée par une vague de mélancolie. Durant un temps, son existence avait été ce qui se rapprochait le plus d'une vie d'elfe verte ; elle avait habité aux côtés des plantes et les avait étudiées, comprises et utilisées. Cette époque était révolue et cela laissait place à un profond sentiment de vide en elle. La vie d'elfe verte qu'elle avait tenté de se créer était partie en fumée en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire.

Le cœur serré et pleine d'appréhension, elle suivit un valet qui vint les accueillir tandis qu'un autre emportait les beaux élans blancs qui avaient tirés le traineau. Les fenêtres et grandes baies vitrées qui ornaient le palais étaient parées de merveilleux vitraux aux couleurs vives et joviales qui représentaient des motifs extravagants. La pierre bleu nuit dont était fait le monument luisait dans la lumière grisâtre qui les entourait, semblable à un ciel nocturne parsemé d'étoiles. Le tout semblait presque irréel.

Le valet les conduisit à l'intérieur, et Soona en eu le souffle coupé. Les murs du hall de réception étaient tapissés de glace et d'une pierre blanche éclatante sur laquelle de long fils d'or décrivaient d'impressionnantes arabesques. Un grand lustre était suspendu au centre, jetant une lumière vacillante sur les dalles de marbre au sol. En face d'eux se dressait un imposant escalier couvert d'un tapis aussi noir que l'encre.

Le domestique interrompit la jeune elfe dans sa contemplation :

— Mademoiselle...

— Soona, bredouilla-t-elle.

— Mademoiselle Soona, veuillez me suivre.

La jeune fille lança un regard au prince Arran.

— Ewen sera de retour bientôt, l'informa celui-ci en consultant de nouveau sa montre à gousset. En attendant je te laisse découvrir tes quartiers. Nous nous retrouvons au souper, d'ici là, tâche de te reposer du mieux que possible.

Soona acquiesça en silence et observa le prince s'éloigner. Elle suivit machinalement le valet dans l'escalier et traversa à sa suite de nombreux couloirs tous aussi luxueux que le hall avant de finalement s'arrêter devant une porte en bois ornée de motifs floraux.

— Voici votre chambre, Mademoiselle Soona. Vous trouverez des tenues de rechange dans la penderie. Quelqu'un va venir vous aider.

Soona le remercia d'un sourire et sur ces mots, le valet tourna les talons et disparu au bout du couloir. La jeune fille pénétra dans la pièce avec hésitation, et ses yeux s'écarquillèrent d'émerveillement à la vue du lieu dans lequel elle allait passer ses nuits. Un imposant lit à baldaquin trônait contre un mur, sculpté en bois d'acacia par une main délicate, et décoré de tissus colorés. Le lustre qui éclairait la pièce était enjolivé par des pierres d'améthystes qui semblaient tomber comme des gouttes et brillaient de mille feu dans les rayons de lumières qui filtraient à travers l'immense baie vitrée donnant sur les sommets. Au sol, un tapis de pétales de roses couvrait une partie du parquet en latte d'un bois clair et luisant. La pièce était si joliment décorée que Soona en eu les yeux qui pétillèrent. Elle effleura du bout des doigts les meubles et les tissus, et s'arrêta devant un beau miroir à pied entouré de lierre doré.

Son allure lui fit esquisser un sourire, qui s'estompa aussitôt qu'elle croisa ses yeux bruns dans le reflet. Combien de fois avait-elle souhaité les avoir verts ! D'un vert clair et éclatant comme ceux d'Ambroise, ou bien sombre et aux reflets gris comme sa mère ! Son regard terne se perdit dans celui de son reflet de longs instants, jusqu'à ce que la porte s'ouvre en grand dans son dos. Soona sursauta en sortant de sa torpeur, et fit face au nouvel arrivant.

L'EtrangèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant