Chapitre 11

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La première journée de réflexion a été longue à passer, puisque je n'avais pas besoin de temps pour réfléchir et pour décider de qui je choisirais lors de la cérémonie : mon choix était déjà fait depuis la veille et rien ne pourrait me faire changer d'avis.

J'ai passé la plupart de mon temps dans mon lit, sur mon téléphone. Je ne voulais parler à personne, je ne voulais pas avoir à sociabiliser aujourd'hui et je préférais me retrouver seule après ce que j'avais appris ce matin. J'aurai aimé en parler à quelqu'un, m'ouvrir sur ce que j'avais découvert, mais une autre partie de moi souhaitais garder ma découverte secrète et ne pas créer de rumeurs au sein de La Plage.

Mon bloc note a été mon meilleur ami, je devais tout de même libérer tout ce que je pensais et mettre des mots sur ce que je ressentais. J'ai laissé mes doigts pianoter au fil des secondes, exprimant tout ce que j'avais sur le cœur depuis mon arrivée ici, à La Plage, en un long texte.

« Cher journal, est-ce vraiment bizarre de te parler comme si je parlais à une vraie personne, comme si j'écrivais une lettre que quelqu'un d'autre, en dehors de moi, lirait ? Je ne sais pas, mais tout ce que je sais est que j'ai besoin de mettre des mots sur ce que je ressens.

Pourquoi est-ce qu'il faut que mes sentiments soient si puissants ? Je ne supporte plus de tout ressentir en double, voire en triple, à cause de ma sensibilité. Je ne comprends pas pourquoi est-ce que cette sensibilité est si extrême, au point de pleurer pour peu. J'aimerai être comprise, mais je ressens comme un rejet de la part des personnes qui m'entourent et j'ai l'impression que je devrai avoir honte de ces sentiments, de ce que je peux ressentir quotidiennement.

Pourquoi est-ce qu'il faut que je me sente mal lorsque des personnes autour de moi me regardent, famille, amis, ou inconnus, et pourquoi est-ce que l'affirmation qui me vient constamment en tête est « ils sont en train de te juger, tu as fait quelque chose de trop, tu es de trop ici. »

Pourquoi est-ce qu'il faut que quand quelqu'un me complimente ou me dit qu'il aime quelque chose chez moi, je refuse d'y croire et pousse cette personne à penser le contraire jusqu'à ce que cela arrive, plutôt que d'accepter les compliments et m'en réjouir comme tout le monde ?

Je ne dis pas que je me déteste, loin de là, parce que me détester est la dernière chose que je choisirai de refaire. Pourtant, je n'arrive pas non plus à aimer celle que je suis, celle qui vit en moi et qui continue de vivre même lorsqu'elle ne le veut plus, car elle n'a pas le courage de se retirer la vie.

Je ne sais que faire face à tous ces défauts, toutes ces petites choses qui viennent gâcher les bons moments que la vie m'offre, et qui m'empêchent de profiter de la vie lorsque je me sens enfin bien dans celle-ci.

Ces derniers jours ont changé, je me suis évadée dans un autre univers, un univers différent du mien, à des milliers de kilomètres de mon ancien monde. Peut-être à quelques kilomètres plutôt. Pour être honnête, je n'en ai aucune idée. Je me suis réveillée il y a 3 jours devant le portail de la villa dans laquelle je me trouve actuellement, allongée par terre avec le pyjama que je portais lorsque je me suis endormie dans mon lit, chez moi.

Lorsque je me suis réveillée, Chapelier était là, et semblait perplexe face à mon arrivée. J'ai reconnu cette expression sur son visage, celle de la confusion, mais je ne savais pas à quoi associer cette réaction. Je me disais que, peut-être, il semblait heureux de rencontrer quelqu'un, ou peut-être que mon arrivée l'avait plutôt dérangé, mais je sais désormais pourquoi est-ce qu'il a tenu ce regard.

Je suis ici depuis trois jours, et je dirai avec certitude que ces trois jours ici ont été plus heureux pour moi que le reste des jours que j'ai pu vivre précédemment, lorsque je me trouvais dans mon ancien monde, en compagnie de ma famille et de mes amis. Je me sens à l'aise, je ne crains plus d'affirmer ce que je veux ou ce que je ressens, et j'ai rencontré des personnes qui ont été tellement parfaites et attentionnées envers moi.

Vivante malgré moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant