Alyzée (3)

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Bellamy

Bellamy essaya de retracer la chronologie des événements dans son esprit.

Il y a de cela des centaines d'années, Algore était une petite péninsule paisible avec très peu d'habitants. Au fur et à mesure qu'elle a commencé à se remplir, à s'implanter dans le commerce maritime, à s'ouvrir au monde et devenir une région très active, les dirigeants de l'époque avaient voulu se l'approprier. Algore fut alors annexée et resta la propriété du continent adjacent pendant de très longues années. Son existence fut alors rythmée par les taxes, les réglementations, le pillage et la débauche. Le continent lui volait tout, les habitants n'avaient plus rien. Alors, une centaine d'années avant la naissance de Bellamy, avait eu lieu la Révolte de Décembre. Le soulèvement des algoréens fut général, chacun voulait défendre ses droits et ceux de sa ville. Mais ils manquaient cruellement d'organisation et de moyens. La population fut écrasée, les restrictions redoublèrent en guise de punition et en plus de milliers de morts sur les bras, Algore dût faire face au long centenaire de malheur qui se profilait pour elle. Comme le déroulement d'un immense tapis rouge sang, parsemé çà et là par des obstacles semant la misère.

Bellamy se retourna dans son lit. Ça c'était ce qu'on leur apprenait dans les livres d'histoire. Ce que les professeurs récitaient comme une vieille fable, ou un hymne national.

Puis vint le Grand Tremblement, dix ans avant la naissance de Bellamy. Des réalisateurs algoreens en avaient fait des films, des courts métrages, des documentaires... Bellamy n'avait vu pratiquement que ce genre de film à la télé, car on ne diffusait plus rien qui puisse provenir du continent. La terre s'était ouverte en deux, des dizaines de kilomètres de terre avaient disparu dans la mer, engloutissant des centaines d'habitants au passage. Dont les grands parents du jeune homme. Les cimetières s'étaient encore agrandis.

Domoto avait alors trouvé sa fameuse source d'énergie, enfermée dans une pierre fluorescente. Le Cœur. Et en même temps qu'il accomplissait son projet des hôtes, il était devenu président et avait promulgué l'indépendance d'Algore. Mais il manquait une partie de l'histoire. Selon les dires d'Alyzée, le continent avait protesté. Il était même prêt à riposter et reconquérir ses droits sur Algore, mais Domoto en avait profité pour construire des armes. Des armes de destruction massive jusque là encore inconnues. Tout cela grâce au pouvoir du Cœur. Et alors que le continent préparait une attaque et un débarquement sur les plages de l'île, Domoto avait envoyé une bombe. Un missile très petit, très discret, impossible à repérer par radar. Les défenses anti missiles du continent avaient échoué à le détourner, et l'explosion avait ravagé le siège du gouvernement tout entier, tuant avec lui des dizaines d'hommes politiques. Le père d'Alyzée avait miraculeusement survécu. Pas sa mère.

Bellamy enfonça sa tête dans son oreiller. Il aurait voulu crier. Mais c'était inutile. Il aurait voulu s'enfuir, mais c'était trop dangereux. Il ne pouvait tout simplement rien faire.

Le lendemain, il resta un long moment face à l'écran de son téléphone. Le numéro d'Athéna était devant ses yeux. Il fallait qu'il lui en parle. Qu'il la mette au courant du danger qu'ils encouraient tous. Il avait besoin de parler.

Il finit par éteindre son téléphone. Assis sur une chaise, tête compressée entre ses mains, il cherchait de l'air. Domoto avait juste voulu protéger la population. Il n'était pas si mauvais au fond.

Dans les jours qui suivirent, son mal être ne fit que s'accentuer. Alyzée s'était mise à lui faire la liste de tous les gens que Domoto avait fait assassiner.

L'anti-hôte [Partie 2] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant