Les mensonges sont des bulles qu'il suffit d'éclater

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Torielle 

Torielle resta muette un instant, le regard planté dans celui du médecin. Elle s'était attendue à cela, elle l'avait préparé, alors pourquoi la réalité semblait s'abattre si durement sur elle ? N'était-ce pas uniquement pour cette raison qu'elle s'était rapprochée de Stéphane ? Elle déglutit, puis baissa les yeux, cherchant ses mots. Puis comme toujours, sa langue se délia toute seule : 

- Je ne peux pas. 

Sa phrase se perdit en un murmure dans sa gorge nouée. 

- Torielle, elle est inconsciente, elle saigne de...elle saigne des yeux ! grogna-t-il avec un air de dégout. 

Stéphane haussait rarement le ton ainsi. Ses yeux écartés brillaient d'incompréhension  et il avait le bras tendu dans la direction d'Athéna qui dormait paisiblement dans le lit poussiéreux. 

- Elle est recherchée dans toute la ville, je pense que tu l'avais compris ! Je ne peux pas me permettre de l'emmener à l'hôpital. 

Torielle avait avancé d'un pas vers lui, bien qu'il lui bloquât encore le passage jusqu'à la sortie. 

- Je ne sais même pas si elle respire encore, si elle est dans le coma il va falloir l'opérer ! 

Stéphane ne se laissa pas impressionner, et sans ses talons, Torielle restait la plus petite. Les deux se regardaient comme des adversaires en duel dans une arène. 

- C'est toi le médecin ici, tu devrais savoir quoi faire !

Torielle savait qu'elle allait trop loin dans sa pensée mais la machine était lancée. Elle n'allait pas pouvoir garder le secret bien longtemps. 

- Je suis neurologue ! répliqua-t-il. 

Il faisait semblant. Torielle s'emporta : 

- Tu t'occupes bien des maladies liées aux hôtes ! 

Le ton redescendit, la tension augmenta d'un cran. De son côté, Bellamy observait comme une statue de marbre dans un coin. 

- Comment sais-tu ça ? tonna gravement Stéphane. 

Torielle allait se remettre à balbutier, chercher ses mots, hésiter, se montrer vulnérable. Elle inspira :

- Je...C'est logique. 

- Je ne te l'ai jamais dit. 

- Peu importe, tu connais ton métier ? 

La pièce devint brutalement silencieuse. Le regard noir de Torielle ne faiblit pas, et elle dépassa le médecin qui la laissa passer sans un regard, le visage renfermé. Elle sortit dans le couloir et entendit quelqu'un claquer la porte derrière elle. Bellamy l'attrapa par le bras pour l'entrainer dans le salon. Elle avait juste besoin de respirer, l'avalanche de reproche qu'il allait déverser sur elle n'allait pas être une partie de plaisir. 

- Tu m'expliques ? 

Stéphane était resté dans la chambre avec Athéna. Maïsie de son côté s'était endormie dans le canapé en cuir marron rempli de plaids et de coussin aux couleurs délavées. Roulée en boule contre un accoudoir, elle semblait si paisible. Bellamy coinça Torielle entre l'entrée du salon et la vieille télévision, bras croisés, regard sombre. 

- Il n'y a rien à dire.

- Il sort d'où ce mec ? Sans mensonges. 

- Je l'ai rencontré par hasard.

Bellamy décroisa les bras en soupirant, le regard rivé au plafond. 

- Tu ne changeras jamais. 

- Je ne comprends pas ce qui te préoccupe. Maintenant laisse moi. 

L'anti-hôte [Partie 2] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant